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Les expulsés de Kyaukphyu recevront des indemnisations

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« Le gouvernement birman indemnisera les habitants qui seront expropriés ou obligés de quitter leurs lieux de vie pour laisser place à la zone économique sino-birmane de Kyaukphyu », dans l’état de l’Arakan, a affirmé le vice-ministre du Commerce U Aung Htoo devant le parlement.

Se référant au précédent de la zone économique spéciale de Thilawa mise en place avec le Japon, le dirigeant a affirmé qu’à l’époque la procédure d’expropriation avait été correctement conduite, « les habitants avaient été indemnisés, à la fois pour la terre et pour les conséquences sociales, et ils avaient aussi eu accès à des formations afin de partir dans les meilleures conditions. Nous comptons faire de même à Kyaukphyu ». Mais le vice-ministre n’a pas évoqué les montants et les mécanismes en jeu pour établir qui aura droit à quoi. Une question pourtant sensible en Birmanie où presqu’à chaque fois que des schémas de compensations financières sont mis en place, des accusations de détournements et d’injustices font surfaces.

La zone économique spéciale (ZES) de Kyaukphyu pèse plusieurs milliards d’euros d’investissements et appartient à ce que Pékin nomme « les nouvelles routes de la soie » et constitue aujourd’hui l’un des projets phares du pays, avec des à-côtés politiques importants, et nul doute que ce sujet a occupé nombre de conversations lors de la visite officielle du président chinois Xi Jinping en janvier dernier. Ce sont plus de 1 800 hectares qui sont concernés : 240 hectares pour le port en eaux profondes, un bon millier pour la zone industrielle et le reste pour des projets immobiliers attenants, l’essentiel de ces surfaces étant aujourd’hui occupées par des cultivateurs et des pêcheurs locaux. Kyaukphyu est en effet une ville importante de l’Arakan, située au Nord de l’île de Ramree, au bord d’un port naturel d’eaux profondes qui historiquement a régulièrement relié pendant des siècles le Bengale et la Birmanie. Pour la Chine, ce sera un accès privilégié au golfe du Bengale et à ses richesses sous-marines, notamment le gaz et le pétrole dont le gisement de Shwe au large de l’Arakan. La compagnie pétrolière chinoise d’état PetroChina a d’ailleurs déjà financé un terminal d’exploitation de ces hydrocarbures sur la ZES.

Les habitants ne se réjouissent cependant pas vraiment de cette arrivée massive de capitaux et d’infrastructures, estimant être laissés pour compte du projet. Un militant associatif local considère que « l’exploitation du gaz et de pétrole représente avant tout une perte pour les pêcheurs car la pollution va tuer ou éloigner les poissons et les conditions de sécurité vont limiter les zones de pêches. Quant aux agriculteurs, nous attendons de voir ce qui leur sera réellement proposé. Ce que nous voulions été d’être associés au projet et que celui-ci apporte des emplois intéressants et bien rémunérés pour les riverains. Mais tout s’est fait à Nay Pyi Taw, sans nous consulter. Le gouvernement n’a pas été du tout transparent sur cette histoire ».

Un autre militant relève aussi les dangers militaires, avec les combats récurrents et de plus en plus intenses entre l’armée régulière birmane (Tatmadaw) et la rébellion de l’Armée arakanaise (AA) : « Le passage en force du gouvernement, sans bénéfices réels pour les populations de la région, attise le conflit. Ce qui évidemment crée beaucoup d’inquiétude ». Plusieurs organisations de la société civile (OSC) demandent que le gouvernement ne se limite pas à des indemnisations mais que soit aussi conduit un accompagnement vers l’emploi des personnes expulsées. Pour U Ba Shein, député de Kyaukphyu appartenant au Parti national arakanais, « le gros problème est le comportement des nouveaux-venus, qui n’ont aucun respect pour les locaux. Au vu de cette manière de faire peu amène, nous sommes donc très inquiets que les supposées indemnisations ne soient que de la poudre aux yeux, des montants très faibles et pas du tout proportionnés aux pertes ». Avec en filigrane le risque de grosses malversations au moment de payer, ce qui s’est vu et se voit malheureusement encore, si l’on en croit de nombreuses associations travaillant sur le sujet.

Lepetitjournal.com – 20 février 2020

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