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Dans la manifestation parisienne : « La Thaïlande est une dictature militaire aux ordres du roi »

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En dépit de l’état d’urgence, des arrestations de plusieurs leaders et de la répression policière, le mouvement pro-démocratie en Thaïlande ne désarme pas et s’étend à tout le pays. Le gouvernement et les royalistes commencent à perdre patience.

La tension ne cesse de croître en Thaïlande mais les manifestants pro-démocratie continuent de défier le pouvoir. À l’appel de plusieurs organisations étudiantes, de nouveaux rassemblements ont eu lieu lundi 19 octobre dans le nord de la capitale. En dépit de l’état d’urgence qui interdit les manifestations de plus de quatre personnes, des dizaines d’arrestations depuis plusieurs jours et de l’apparition pour la première fois des canons à eau ce week-end, le mouvement de protestation s’intensifie et s’étend dans tout le pays. Le premier ministre Prayut Chan-o-cha a convoqué en urgence lundi 19 octobre une session extraordinaire du parlement pour « résoudre le conflit ».

« On sent bien que la police et l’armée se préparent à intensifier la répression contre les manifestants à Bangkok », racontait dimanche 18 octobre à Paris, place de la République, Worravut Thueakchaiyaphum, 32 ans, réfugié politique en France depuis deux ans.

Il avait fui son pays en 2015 après avoir été poursuivi pour crime de lèse-majesté. « Après le coup d’État militaire de 2014 qui a installé le général Prayut au pouvoir, j’ai osé dire que c’était sous les ordres du roi que l’armée avait provoqué ce putsch, raconte cet ancien étudiant du nord de la Thaïlande, qui s’est échappé par le Laos. J’ai été arrêté, et avant mon procès, j’ai pu fuir ».

Appel à la création d’une « République de Thaïlande »

Face à une cinquantaine de personnes rassemblées à République, sous une banderole appelant à la création d’une « république de Thaïlande », Worravut Thueakchaiyaphum a rappelé les revendications majeures des étudiants : « démission du premier ministre, une nouvelle Constitution et une réforme de la monarchie ». Avant de lancer « la Thaïlande est une dictature militaire aux seuls ordres du roi », en déchirant une photo du roi Rama X, installé au pouvoir en 2016. De tels propos et un tel geste lui vaudrait une possible condamnation à la perpétuité en Thaïlande, même si le tabou de la monarchie est en train de se fissurer.

« J’ai été élevée par mes parents dans l’adoration du roi », témoigne Romchalee Sombulruttanakul, 32 ans, réfugiée politique en France depuis un an, vêtue d’une salopette rouge et du masque de la série espagnole « Casa de papel ». « Après le coup d’État de 2014 ordonné par le vieux roi Rama IX à la santé déclinante, j’ai basculé et je n’y crois plus. Pour moi, le roi est un homme comme tout le monde, ce n’est pas un dieu. La monarchie n’est pas au-dessus de la loi des hommes. »

À Bangkok, l’étau se resserre

Ces témoignages reflètent l’état d’esprit des jeunes manifestants en Thaïlande. Ils osent défier le roi et appellent à une vraie réforme de la Constitution pour mettre fin à l’instabilité politique du pays qui a connu 12 coups d’État depuis 1932.

À Bangkok, toutefois, l’étau se resserre lentement. Le premier ministre a averti lundi 19 octobre que le gouvernement devait protéger la monarchie : « C’est le devoir de tous les Thaïlandais. » Dans le même temps, le régime a commencé à censurer certaines messageries numériques comme Télégram et à supprimer plusieurs comptes d’associations étudiantes qui rassemblaient près de 200 000 membres. Quatre sites d’informations numériques ont également été censurés lundi 19 octobre.

« La répression s’accentue, confirme Worravut Thueakchaiyaphum, et je m’attends à ce que la police et l’armée utilisent bientôt des balles réelles pour réprimer les manifestations. Le roi est le seul maître en Thaïlande et ils lui obéissent aveuglément. Si la répression ne fonctionne pas, ce dont je suis certain, la prochaine étape pourrait être un coup d’État. »

Par Dorian Malovic – La Croix – 19 Octobre 2020

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