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La Serpollet du docteur Alexandre Yersin

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À l’occasion du 160e anniversaire de la naissance du docteur Alexandre Yersin (22 septembre), Nicolas Leymonerie, directeur du Centre francophone Antenne de Dà Lat, souhaiterait partager une trouvaille faite au cours d’une recherche documentaire sur l’illustre savant.

Le 3 juin de cette année, une découverte remarquable a été faite lors d’une recherche documentaire sur le Docteur Alexandre Yersin. Il s’agit d’une bande dessinée datant de 1904, représentant ce célèbre savant se promenant dans les rues de Hanoï à bord d’une Serpollet 6 CV, en compagnie d’un enfant. Cette illustration avait été envoyée au concepteur du véhicule, Léon Serpollet. Bien que les documents concernant la vie de Yersin soient bien connus des passionnés, il semblerait que ce soit la première fois que cette image refait surface.

Ce dessin, publié en pleine page dans le journal satirique Le Rire le 20 février 1904, était l’œuvre d’un artiste vietnamien de l’époque.

La légende qui l’accompagne précise : “Au cours d’un dîner, le savant bactériologiste Yersin vante les aptitudes artistiques des Vietnamiens. Il promit à l’un des convives, M. Serpollet, de lui envoyer un dessin original réalisé par un local, illustrant de manière amusante les impressions produites dans ce pays encore primitif par une voiture automobile. Ce dessin en coloriage, qui vise à représenter le docteur Yersin lui-même dans sa voiture Gardner-Serpollet, est reproduit ici en tant que document singulier sur l’art vietnamien.”

Gardner-Serpollet est une marque franco-américaine d’automobile fondée par Léon Serpollet et Franck Gardner, pionnière dans ce domaine dès sa création en 1898. L’entreprise a cessé sa production à la mort de Serpollet en 1907. Ce dessin a probablement été réalisé à Hanoï, car Yersin y avait fondé l’École de médecine en janvier 1902, au Tonkin, et en avait été le premier directeur jusqu’en octobre 1904. 

Le docteur Yersin fut l’un des premiers à importer des voitures en Indochine. Passionné de sciences et de technologies, il cherchait un moyen de locomotion efficace pour se rendre de sa maison, et de l’institut Pasteur de Nha Trang, à ses plantations de Suôi Dâu. À partir de 1895, il utilisa des charrues tirées par des buffles, sa bicyclette, puis une voiture attelée à des chevaux.

En 1900, lors de son séjour à Paris, Yersin commanda sa première automobile à vapeur, (xe hoi en vietnamien) une 5 CV, à Léon Serpollet, pour la somme de six mille francs.

La voiture partit de Marseille en mai 1901 et arriva à Nha Trang en juillet de la même année. Devenu passionné de mécanique, Yersin reçut une Clément, une voiture plus légère et fonctionnant à l’alcool ou à l’essence, seulement deux mois plus tard.

Au printemps 1903, Yersin se rendit à Paris avec son aide-mécanicien, un certain Monsieur Qué, pour commander une nouvelle voiture chez Serpollet. C’est probablement à ce moment-là qu’eut lieu le dîner mentionné.

La Serpollet 6 CV de Yersin, embarquée en juin 1903, arriva à Hanoï à l’automne et fit sensation dans les rues de la capitale tonkinoise. Elle fut suivie d’une Serpollet 11 CV en 1905, d’une Alcyon en 1907, d’une Clément-Bayard 15 CV en 1921. Yersin se lassa finalement de la voiture avant de reprendre une Zèbre confortable et rapide en 1925.

Deux anecdotes remarquables sont liées à cette voiture. Un jour, alors que Yersin l’avait amenée dans un garage de Nha Trang, un voyageur parisien l’aperçut et, le voyant vêtu de vêtements usés, se plaignit qu’un Français puisse donner une image aussi déshonorante de la communauté coloniale. Le garagiste le pressa de se taire en lui disant : “C’est le docteur Yersin !”.

Une autre anecdote se déroula un soir de 1930. Alors qu’il conduisait sa voiture, un petit enfant se précipita devant lui sur la chaussée. Heureusement, Yersin ne heurta pas l’enfant, mais ce dernier, effrayé, trébucha et se fit mal, se mettant à pleurer. Yersin lui prodigua quelques soins, mais à partir de ce jour, il n’osa plus reprendre le volant.

Il se contenta de sa bicyclette Peugeot. C’était ça, Yersin. Un homme au cœur généreux et compatissant.

Par Nicolas Leymonerie – Le courrier du Vietnam – 15 septembre 2023

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