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Service militaire au Cambodge, inquiétudes au sein de la communauté LGBT+

La mise en place du service militaire obligatoire au Cambodge suscite des craintes parmi les personnes transgenres et homosexuelles, qui appellent à une prise en compte de leur identité.

Une réforme annoncée pour 2026

Le 14 juillet, le Premier ministre Hun Manet a annoncé l’application effective en 2026 de la loi sur le service militaire obligatoire, adoptée en 2006 mais jamais mise en œuvre. Cette décision a soulevé de vives préoccupations au sein de la communauté LGBT+, notamment chez les femmes transgenres et les hommes homosexuels au genre non conforme.

Selon la législation actuelle, les citoyens âgés de 18 à 30 ans, hommes et femmes, doivent effectuer un service militaire de 18 mois. Les femmes, toutefois, peuvent choisir de servir sur la base du volontariat. Le projet de réforme prévoit d’allonger la durée à 24 mois : six mois pour le recrutement, la formation et l’affectation, suivis de 18 mois de service actif.

Risques de discrimination pour les personnes transgenres

Pour de nombreuses personnes transgenres, cette réforme représente une menace. Soth Peosamnang, militante des droits LGBT+ et femme transgenre, s’est dite inquiète.

« Je devrai probablement servir car je n’ai pas subi d’opération de réattribution sexuelle, même si je vis en tant que femme », explique-t-elle. « Cela signifie que je serai placée dans un environnement exclusivement masculin, dans lequel je ne me sens pas à ma place et où je pourrais être harcelée. »

Elle souligne également les difficultés pour les hommes à l’expression de genre féminine : « Certains ne s’identifient pas comme femmes, mais expriment une féminité visible. Ils pourraient avoir du mal à accomplir les tâches militaires classiques et être victimes de stigmatisation. »

Une exigence de reconnaissance de la diversité

Pour Soth Peosamnang, le non-respect de la diversité de genre dans l’application de la loi constituerait une atteinte aux droits individuels. « Si la loi n’intègre pas de critères inclusifs, elle oblige des personnes comme nous à servir sans choix ni dignité. »

Une autre femme transgenre, qui a souhaité rester anonyme, abonde dans ce sens. « J’étais enthousiaste à l’idée du service militaire. Mais avec les traitements hormonaux féminisants que je prends, je ne peux pas imaginer vivre avec des hommes. Je suis biologiquement un homme, mais je vis et ressens comme une femme. Ce serait très difficile, physiquement et psychologiquement. »

Elle évoque aussi l’impact émotionnel de devoir couper ses cheveux ou adopter un comportement masculin : « Ce serait humiliant. J’espère que le gouvernement fixera des directives claires et inclusives pour les personnes trans, gays et queer. »

Des exemptions ou aménagements demandés

Soth Peosamnang souhaite que le gouvernement envisage des exemptions pour les femmes transgenres, ou au minimum des aménagements spécifiques : logements séparés, entraînements moins intensifs ou durée réduite à un an.

« Même les hommes et femmes hétérosexuels seraient mal à l’aise de vivre avec des personnes transgenres sans conditions appropriées. Les femmes transgenres sont des femmes, et nous devons être traitées avec dignité. »

Une femme transgenre anonyme suggère aussi des alternatives inspirées de pays voisins. « En Thaïlande, les femmes trans peuvent demander une exemption avec un certificat médical. En Corée du Sud, celles qui ont subi une opération et changé légalement de genre sont exemptées. »

Dans ces pays, l’exemption repose sur des critères médicaux ou juridiques. En Corée du Sud, ceux qui n’ont pas modifié officiellement leur genre peuvent être affectés à des rôles civils ou à une formation militaire basique.

Inquiétudes sur l’équité de l’application

Soth Peosamnang exprime également ses doutes quant à une application équitable de la loi : « J’ai peur que seuls les enfants de familles riches ou de hauts responsables obtiennent des exemptions, pendant que les autres seront obligés de servir. Il doit y avoir de la transparence. »

Maly Socheata, porte-parole du ministère de la Défense, a déclaré que les préoccupations liées à l’identité de genre seraient prises en compte une fois que l’équipe d’experts aura rendu ses recommandations.

Une mobilisation en ligne et un appel à l’inclusion

Pour recueillir les avis, Soth Peosamnang a lancé un sondage en ligne sur Facebook. De nombreux répondants ont exprimé leur fierté à servir leur pays, tout en évoquant des craintes : discrimination, problèmes de santé et pression psychologique liés à leur identité.

Malgré les inquiétudes, elle reste confiante : « Je pense que le gouvernement nous écoutera. Nous ne demandons pas l’exemption parce que nous sommes différents. Nous demandons à être traités avec équité et dignité. Le service national doit unir, pas exclure. »

Par Teng Yalirozy – Cambodianess /Lepetitjournal.com – 19 juillet 2025

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