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Un royaume, deux pays: le rêve d’unité des Nagas d’Inde et de Birmanie

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Un labyrinthe de vallées étroites, de forêts semi-humides et de crêtes nimbées de brume : Tonyei Phawng, roi des Konyaks, une tribu naga d’anciens chasseurs de têtes, règne sur une quarantaine de villages scindés entre l’Inde et la Birmanie, un royaume très disparate qu’il rêve de réunir.

Le seigneur, qui a troqué son costume traditionnel pour des vêtements ordinaires et une paire de baskets, contrôle son fief depuis Longwa, un village perché à 1.500 mètres d’altitude à cheval sur la frontière indo-birmane.

Tout cela est artificiel, “nous partageons la même culture”, soupire-t-il.

Née de l’héritage colonial britannique, la frontière indo-birmane a coupé en deux le peuple Naga, une mosaïque de plusieurs dizaines de tribus redoutées pour leurs coutumes guerrières il y a encore quelques décennies. Quelque 400.000 vivent aujourd’hui en Birmanie et trois autres millions en Inde.

Les Konyaks sont installés dans 44 petites communautés réparties de chaque côté de la frontière, un royaume où les inégalités sont fortes.

Côté indien, des routes, des écoles, des hôpitaux ont été construits. La minorité peut aussi habituellement compter sur les revenus du tourisme, aujourd’hui à l’arrêt avec la pandémie de coronavirus.

Côté birman, ils habitent dans l’une des régions les plus pauvres et reculées du pays, vivant quasiment en auto-suffisance de la culture du riz et de denrées vivrières. Plusieurs jours de marche sont nécessaires pour atteindre la ville la plus proche, peu d’enfants étudient au-delà du primaire et seuls 40 % des villages ont l’électricité.

Seule solution: se rendre en Inde pour écouler leur modeste production agricole, étudier ou se faire soigner.

Mais la frontière entre les deux pays est aujourd’hui fermée à cause du coronavirus, interdisant les échanges et fragilisant encore davantage les Konyaks de Birmanie.

L’Inde a fait livrer des rations alimentaires d’urgence aux Nagas pour les aider économiquement face à la pandémie.

En Birmanie, “ils ne reçoivent aucune aide des autorités. Leur situation est très difficile”, déplore Nahmai Konyak, 34 ans, guide touristique à Longwa.

Utopique Nagaland

Des décennies après le retrait des Anglais, le désir d’un Nagaland uni reste fort

Mais la lutte pour l’indépendance menée par des fractions armées des deux côtés de la frontière est aujourd’hui plus sporadique.

Le combat est aussi politique, d’autant que les législatives qui doivent se tenir fin 2020 en Birmanie approchent.

Kail, député régional de la Ligue nationale de la démocratie, le parti politique d’Aung San Suu Kyi, est Naga et brigue un autre mandat pour tenter d’améliorer l’accès aux soins et à l’éducation.

Face à lui, une nouvelle formation a vu le jour il y a quelques mois: le Parti national Naga (NNP) qui ambitionne “d’obtenir au moins une dizaine de députés au Parlement pour défendre les intérêts” de la minorité.

Tonyei Phawng rêve, lui, encore d’indépendance, mais cela reste très utopique.

New Delhi a investi dans la région, réfrénant les aspirations autonomistes de ce côté de la frontière.

“Le gouvernement a lavé le cerveau” de nos frères en Inde, ils ne veulent plus se battre, déplore l’activiste Naga, Jacob Ngansa.

Malgré de nombreux points communs, les divisions restent aussi fortes parmi cette constellation de petites communautés.

Il faut d’abord privilégier l’éducation et la santé, estime le député Kail.

Ensuite, “les jeunes générations pourront reprendre le combat” d’un Nagaland uni et fort, se prend-il à rêver.

Agence France Presse – 28 avril 2020

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