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La soie vietnamienne, une histoire millénaire à valoriser

Bien que le Vietnam ne soit pas une puissance mondiale en matière de fabrication de soierie, il reste connu dans le monde pour ce métier millénaire. Un savoir ancestral qui se transmet de génération en génération.

Dans une belle maison en bois, située à côté d’un jardin de mûriers verts du vieux quartier de Hôi An, province de Quang Nam (Centre), Lê Thai Vu, patron de la Compagnie par action de la soierie de Quang Nam, accueille une délégation d’hommes d’affaires venus de Chine, du Japon, de Thaïlande, de France et d’Italie.

Il leur présente la sériciculture, un métier traditionnel de son village natal. Ces commerçants, avant de discuter d’une éventuelle coopération, aiment observer attentivement  leurs partenaires, car la soie n’est pas simplement une marchandise, c’est aussi un produit culturel portant le cachet de chaque pays.

Un métier millénaire prestigieux

Il y a des milliers d’années, la soie était considérée comme un produit de luxe, et même comme un symbole de pouvoir car réservé essentiellement aux classes dominantes. Elle était même plus précieuse que l’or qui était utilisée comme unité monétaire pour les échanges de marchandises entre les pays de la légendaire « route de la soie ».

Selon une légende du village de Cô Dô, district de Ba Vi, à Hanoï, la sériciculture vietnamienne est née il y a 4.000 ans, sous les règnes des rois fondateurs Hùng. La soie vietnamienne est reconnue pour sa finesse, sa souplesse, sa douceur et sa résistance, et n’a rien à envier à ses homologues chinois ou japonais.

Au Nord, la soie du village de Cô Dô,  nommée « lua công », était utilisée comme tribut pour payer à la Cour. Celle du village de Van Phuc, à Hanoï aussi, fut saluée par les Français comme étant le produit le plus sophistiqué de l’Indochine. La soie tissée et teinte à la main sut fidéliser la clientèle étrangère. C’est pour cette raison qu’en 1931 et 1932, celle de Van Phuc fut présentée pour la première fois à plusieurs expositions internationales dans l’Hexagone, à Marseille puis Paris.

Dans le Centre du Vietnam, autrefois, le tissage de la soie se développa  fortement, notamment dans la province de Quang Nam grâce au port de commerce  de Hôi An, un arrêt important sur la route commerciale maritime. Entre les XVIe et XIXe siècles, de nombreux commerçants chinois, japonais, indiens, thaïlandais venaient y acheter des céramiques et des soieries.

Malgré bien des vicissitudes, ce métier s’est perpétué  et même développé dans quelques villages du pays. Aujourd’hui, en les visitant, les étrangers auront l’occasion de découvrir l’histoire millénaire de la sériciculture et du tissage de la soie.

Le village 2 de la commune de Dam B’ri, dans la ville de Bao Lôc, province de Lâm Dông, sur les hauts plateaux du Centre, est connu pour sa sériciculture. Dans  un immense champ de mûriers, Lê Thi Tho  cueille de jeunes feuilles pour ses vers à soie affamés. Après avoir ramené ces provisions à la maison, elle commence à les couper. « On doit les faire manger tout de suite, sinon ils dépérissent vite », partage-t-elle. Selon elle, l’élevage des vers à soie est plus difficile que de prendre soin d’un nouveau-né. Il faut constamment surveiller les vers et les feuilles de mûrier avant de les nourrir.

Mme Tho est cadre au Centre de recherche et d’expérimentation agro-sylvicoles de la province de Lâm Dông. En dehors des travaux au centre, elle élève aussi des vers de reproduction pour les fournir aux éleveurs de la région. Elle a investi dans la culture de 750.000 m² de mûriers. Son activité est difficile mais considérée comme une orientation efficace à Bao Lôc.

Les fameuses soieries de Bao Lôc

Par rapport aux autres villages de métiers traditionnels, la sériciculture à Bao Lôc est apparu plus tardivement mais se développe fortement. À tel point que la ville représente à elle seule, 70% de la production nationale de fils de cocons et de soie !

Grâce à ses conditions pédoclimatiques optimales, la province de Lâm Dông est ainsi devenue la « capitale » nationale de la sériciculture, avec de grandes usines de production. Actuellement, elle compte 5.000 ha de mûriers dont 500 ha dans la ville de Bao Lôc, qui donnent  5.000 tonnes de feuilles par an.  La ville compte 23 grandes compagnies spécialisées dans le commerce, la production et l’exportation de soie.

Les produits de Bao Lôc sont variés avec plus de 20 catégories différentes tels que fils de soie, satin, taffetas… qui servent de matières premières pour des maisons de couture de renommée mondiale et sont même exportés vers de grands  pays séricicoles tels que Chine, Japon, Inde, Italie, Brésil… Bien que le Vietnam soit parmi les premiers producteurs mondiaux de soie, il n’est pas encore parvenu à s’imposer sur la scène internationale.

Fei Jianming, secrétaire général de l’Association mondiale de la soie, estime que le Vietnam doit changer sa stratégie. Au lieu de se concentrer sur l’exportation de soie, il est nécessaire de promouvoir sa production. Selon lui, seuls les produits en soie de  qualité peuvent caractériser la marque d’un pays. « Le Vietnam est un pays avec une longue tradition de tissage de la soie, de vastes zones de matières premières et une soie de grande qualité. Il faut valoriser cette tradition pour produire mieux et plus. C’est ainsi que le pays s’affirmera à l’international », souligne M. Fei Jianming.

Par Huong Linh – Le courrier du Vietnam – 6 juin 2020

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