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En Thaïlande, le boycott des manifestants fait plier des annonceurs

Plusieurs enseignes thaïlandaises ont retiré leurs campagnes publicitaires de la chaine Nation TV après un appel au boycott de la part des manifestants anti-gouvernementaux qui jugent le media biaisé

Le propriétaire de la franchise Burger King en Thaïlande a rejoint mercredi le groupe des entreprises qui ont plié face aux appels au boycott des manifestants les accusant de faire de la publicité sur la télévision du groupe Nation Multimedia, un groupe de presse qu’ils qualifient de pro-gouvernement.

Les manifestants demandent depuis plusieurs semaines le départ du Premier ministre Prayuth Chan-O-Cha, ancien chef de la junte, de nouvelles élections, et certains ont également appelé à des réformes de la monarchie du roi Maha Vajiralongkorn, un sujet extrêmement tabou depuis plusieurs décennies.

Excédés par une couverture de leur mouvement qu’ils jugent biaisée par certains médias, tout particulièrement le canal télévisé du Nation Multimedia Group, les manifestants étudiants et leurs partisans ont lancé une campagne en ligne pour exhorter les gens à éviter les enseignes du groupe Minor International ainsi que d’autres entreprises qui faisaient de la publicité via la chaîne Nation TV.

Une porte-parole de Minor Food Group a déclaré que le groupe retirait ses publicités.

« La compagnie accepte le point de vue de ses clients et envisagera l’utilisation de médias plus appropriés, avec effet immédiat », a déclaré le groupe dans un communiqué à Reuters.

Le président de Nation Multimedia Group, Shine Bunnag, a cependant déclaré à Reuters que le boycott était de « l’intimidation sociale émanant d’un groupe de voyous du clavier ».

Cela met en tout cas en évidence la détermination et la dextérité de ce mouvement de protestation qui a démarré sur les campus thaïlandais et dispose d’un très fort soutien sur les réseaux sociaux, en particulier chez les jeunes.

Autre entreprise très prudente sur ses prises de positions dans cette crise politique et sociétale, Facebook a déclaré mercredi qu’il contesterait la légalité de la demande de blocage d’accès à un groupe critique de la monarchie -demande à laquelle le géant américain a toutefois accédé dans les délais qui lui étaient impartis.

« La division politique de la société s’infiltre dans les affaires (…) mettant les entreprises dans une situation très difficile », a déclaré Ben Kiatkwankul du Maverick Consulting Group, qui conseille les entreprises sur la réputation et les affaires gouvernementales.

« Il est quasiment impossible de plaire à tout le monde », a-t-il souligné.

On peut y voir un parallèle avec Hong Kong, où les partisans pro-démocratie ont boycotté les entreprises considérées pro-gouvernementales, ou « bleues », en faveur des entreprises « jaunes » perçues comme soutenant le mouvement.

La plus grande des dizaines de manifestations de rue organisées à travers la Thaïlande depuis le 18 juillet a attiré plus de 10.000 personnes à Bangkok le 16 août. Mais l’effervescence pro-démocratie sur les réseaux sociaux traduit un soutien bien plus large, certains mots dièses de protestation étant utilisés ou partagés par plusieurs millions de comptes.

Boycott par mot dièse

Le mot dièse en thaïlandais correspondant à #BannirLesSponsorsDuNation est devenu tendance à la fin de la semaine dernière après qu’une journaliste de Nation TV, largement perçue comme conservatrice, a obtenu des interviews de manifestants sur un rassemblement en se faisant passer comme une journaliste travaillant pour un autre media.

Le groupe Nation Multimedia, qui opère également le site d’information en anglais The Nation, a dit avoir réprimandé la journaliste pour son manque d’éthique, même si Shine Bunnag, son président, a déclaré qu’elle avait été effrayée par « la foule ».

« Nous ne sommes pas la voix du gouvernement. Nous sommes des médias qui soutiennent le peuple. Nos principes ici sont clairs: nation, religion, monarchie. Insistez sur la monarchie », a-t-il dit au téléphone.

Shine Bunnag a affirmé que les cotes de Nation Multimedia avaient augmenté de 20% au moment de l’incident concernant la journaliste, certaines entreprises ayant augmenté leurs achats de publicités, assurant que les retraits de campagnes n’avaient eu aucun impact.

« L’intimidation sociale est un procédé déloyal et antidémocratique », a-t-il déclaré. « Nous ne nous laisserons pas effrayer ».

Tanawat Wongchai, un étudiant protestataire, a souligné que le boycott visait à garantir la neutralité de Nation Multimedia. L’un de ses tweets avec le mot dièse appelant au boycott a été retweeté plus de 1.000 fois.

« Si nous voulons que les médias changent et s’améliorent, nous devons faire pression sur ces sponsors », a-t-il déclaré à Reuters.

En plus de gérer plus de 100 restaurants Burger King en Thaïlande, Minor Food est le propriétaire de la franchise thaïlandaise de Swensen’s et de Coffee Club. La société possède également sa propre marque, Pizza Company.

Ses actions ont chuté de 0,45% mercredi, contre une hausse de 0,44% de l’indice de référence. Le propriétaire mondial de Burger King est Restaurant Brands International Inc.

Le service de livraison de nourriture Foodpanda, une unité de Delivery Hero SE, a déclaré, après avoir été ciblé par l’appel au boycott la semaine dernière, qu’il arrêterait la publicité sur Nation TV et « améliorerait ses pratiques marketing ».

Le Thaïlandais Yanhee Vitamin Water a également déclaré qu’il arrêterait les publicités sur la chaine de télévision et attachait de l’importance à l’opinion de ses clients.

Lepetitjournal.com – Reuters – 28 Août 2020

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