Pendant la visite du chef de la junte au sommet de l’Asean, la répression continue en Birmanie
Le général birman Min Aung Hlaing a rencontré à Djakarta les dirigeants de l’Association des nations d’Asie du Sud-Est. Son hôte, le président indonésien, l’a appelé à restaurer la démocratie et à cesser les violences contre les civils.
L’armée birmane a réprimé, samedi 24 avril, des manifestations qui se sont déroulées dans tout le pays, contre le coup d’Etat du 1er février, tuant au moins une personne.
Une manifestation à moto, où les opposants ont fait le salut à trois doigts de la résistance près de la capitale, Naypyidaw, a violemment dégénéré lorsque la police et les soldats ont ouvert le feu. Un homme de 50 ans a été arrêté et exécuté, a déclaré un témoin à l’Agence France-Presse (AFP). « Des policiers l’ont retenu de chaque côté, puis un soldat lui a tiré dans le dos », a déclaré le manifestant de 27 ans, ajoutant que les forces de sécurité avaient emporté son corps. « Nous n’avions que le salut à trois doigts, mais ils avaient des armes pour nous tuer », a-t-il ajouté.
Pour son premier déplacement à l’étranger depuis le coup d’Etat, le chef de la junte birmane, le général Min Aung Hlaing, a participé samedi, à Djakarta, à une réunion de crise avec les dirigeants de l’Association des nations d’Asie du Sud-Est (Asean), une présence qui a suscité la colère des manifestants en Birmanie.
Un plan en cinq points
A Djakarta, le président indonésien, Joko Widodo, a appelé la junte birmane à restaurer la démocratie, à cesser les violences contre les civils et à libérer les prisonniers politiques. Des déclarations d’une fermeté inhabituelle pour le leader d’un des plus grands pays de la région. Le premier ministre singapourien Lee Hsien Loong a, de son coté aussi, réclamé la libération d’Aung San Suu Kyi, placée en résidence surveillée.
L’Indonésie et Brunei, le pays qui préside actuellement l’Asean, organisaient, dans la capitale indonésienne, la réunion des dirigeants de la plupart des dix nations de cette organisation dont sont également membres la Birmanie, Singapour, la Malaisie, le Cambodge, la Thaïlande, le Vietnam, les Philippines et le Laos.
Selon le communiqué final du sommet, ces Etats sont parvenus à un consensus sur un plan en cinq points pour mettre fin aux violences et faciliter un règlement de la crise : ce plan prévoit notamment l’ouverture de la Birmanie à de l’aide humanitaire et à des émissaires de l’Asean qui auraient accès aux parties prenantes pour promouvoir le dialogue, comme l’avait évoqué le président indonésien dans la journée.
Samedi soir, un porte-parole du « Gouvernement d’unité nationale » (GUN) – un gouvernement fantôme constitué de députés déchus principalement issus du parti d’Aung San Suu Kyi (la Ligue nationale pour la démocratie, LND) – a salué l’appel à la fin des violences comme « une nouvelle encourageante ».
« C’est ce que demande le Gouvernement d’unité nationale », a déclaré le ministre de la coopération internationale de ce gouvernement, le Dr Sasa, qui est entré dans la clandestinité. « Nous attendons avec impatience une action ferme de l’Asean pour le suivi de ses décisions et pour restaurer la démocratie et la liberté pour notre peuple et pour la région », a-t-il ajouté. Les membres du GUN sont recherchés par la junte pour haute trahison.
Plus de 740 morts
Depuis le coup d’Etat militaire du 1er février, la répression a fait plus de 740 morts en Birmanie, et un rapporteur des Nations unies a estimé le nombre de réfugiés à plus de 250 000 personnes, menaçant de déstabiliser la région.
Les manifestations quasi quotidiennes pour demander le départ de la junte au pouvoir ont lieu dans les villes comme dans les zones rurales, les régions montagneuses isolées ou les territoires contrôlés par des rebelles.
Deux personnes, dont un civil, ont été tuées vendredi soir dans la ville de Thaton (sud) lors d’échanges de coups de feu entre l’armée et le mouvement rebelle Union nationale karen (UNK). « Personne n’a osé aller chercher les corps hier et les gens y sont allés ce matin », a rapporté un habitant à l’AFP, accusant l’armée d’être responsable de la fusillade.
Outre la violente répression, la junte a également restreint les moyens de communication dans tout le pays, avec des coupures d’Internet nocturnes depuis soixante-dix jours et une baisse de la couverture mobile, coupant de fait les accès à l’information.
Le Monde avec Agence France Presse – 25 avril 2021
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