La vaccination anti-Covid-19 est lancée en Birmanie, avec des difficultés
La campagne de vaccination a débuté dans la plupart des états ou régions de Birmanie. Lashio, dans le nord de l’état de Shan, a ainsi reçu plus de 15 000 doses et plus de 10 000 ont été fournies à Hpa-an, la capitale de l’état de Kayin.
Des milliers de vaccins ont également été acheminées Myeik et Kawthaung, dans la région du Taninthayi, ainsi qu’à Nay Pyi Taw ou dans l’état de l’Arakan. Les régions de Bago et de l’Ayeyarwady ont aussi reçu leurs doses. A Yangon, des écoles ont été transformées en centre de vaccination dans certaines zones de la ville. L’acheminement des doses a été réalisé par des vols de la compagnie nationale Myanmar Airways ou par des avions militaires.
Selon le porte-parole du ministère de la Santé et des Sports, Than Naing Soe, « la vaccination est la seule solution à long terme pour contenir la Covid-19. Il faut être réaliste, il sera difficile de maintenir longtemps des mesures comme le port de masques, le lavage des mains ou la distance physique de sécurité. La meilleure solution est donc de vacciner et nous allons le faire ». Le ministère de la Santé et des Sports affirme avoir un plan cohérent de vaccination, « les soignants des hôpitaux publics puis ceux des hôpitaux privés sont prioritaires, puis les fonctionnaires. Après, ce seront les personnes âgées ».
Méfiance envers les produits chinois, qui ont mauvaise réputation
Un médecin birman, qui demande l’anonymat par crainte de représailles, estime que quelles que soient ses opinions politiques, « se vacciner est préférable à rien. Même si aujourd’hui les produits dont nous disposons sont moins performants que ceux utilisés dans les pays riches, un vaccin est bénéfique pour l’hôte et offre toujours une protection, ce qui est mieux que rien du tout ». Et d’enfoncer le clou : « Si tant de personnes ont été atteintes pendant cette troisième vague, c’est essentiellement parce que aucune campagne de vaccination n’a été effectuée lors de la deuxième vague, alors que c’était possible car le nombre de malades n’étaient pas encore énorme ».
Un autre praticien, aussi soucieux de rester anonyme, partage l’avis de son collègue sur l’importance de se faire vacciner mais il constate aussi de grandes difficultés sur le terrain : « De nombreux patients qui ont le droit au vaccin le refusent car ils ne font confiance ni aux militaires, ni aux produits d’origine chinoise ». De fait, indépendamment du soutien de Pékin à Nay Pyi Taw – qui n’améliore pas vraiment l’image de l’Empire du Milieu en Birmanie -, les Birmans considèrent ce qui vient de Chine comme de la camelote. Ils ont même un dicton en forme de contrepèterie (dans la langue birmane…) qui peut se traduire par « un objet chinois ne dure pas plus d’un jour ».
Déjà plus de 11 000 morts de la Covid-19 en Birmanie
Du coup, bien que le Sinopharm a été approuvé par l’Organisation mondiale de la santé (OMS), les gens restent souvent méfiants, voire doublement méfiants, le rejet de l’origine chinoise du vaccin s’ajoutant à celui des militaires en général. Comme l’explique l’un des deux médecins interrogés, « on ne peut pas vraiment en vouloir à la population. Des soldats ont tué des civils sans raison, ont torturé, ont arrêté des innocents. Comment leur faire confiance désormais ? ». Autre problème majeur, et là encore typique du pays : la communication autour de la vaccination est simplement catastrophique et ceux qui veulent se protéger ne savent pas du tout qui est éligible, où et quand se faire injecter…
Dans le cas d’une école de Yangon transformée en centre de vaccination, durant toute une journée la rue était bouchée par les voitures mal garées ou en attente appartenant aux centaines de personnes qui faisaient la queue pour recevoir une dose… et qui finalement n’y avait pas le droit. Disputes, accusations de corruption, chaos : la distance physique de sécurité n’a absolument pas été respectée et ce premier jour risque d’avoir répandu plus de Covid-19 qu’il n’a participé à protéger des personnes à risque. Le lendemain, des panneaux didactiques étaient exposés à l’entrée de l’école…
Même si les vaccins administrés ne sont pas tous chinois ou russes – le nouveau gouvernement bénéficie du programme Covax de l’OMS, lequel distribue 11 types de vaccins différents – une grande partie de la population demeure donc dubitative quant au bien fondé de se faire injecter. En outre, les quantités accessibles pour l’instant sont encore bien en deçà des besoins. Le chef d’état-major Min Aung Hlaing a affirmé récemment que l’objectif est de vacciner 50 % des 54 millions d’habitants du pays d’ici à la fin de l’année, ce sera certainement très difficile à réaliser. Officiellement, la Birmanie a confirmé environ 320 000 cas de Covid-19 pour près de 11 000 décès.
Lepetitjournal.com – 9 Août 2021
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