Le groupe TotalEnergies se retire de Birmanie
Depuis le coup d’État survenu le 1er février 2021 en Birmanie, le groupe mondial fournisseur d’énergie était dans le viseur des ONG de défense des droits humains. Partenaire et opérateur du champ de gaz de Yadana, Total avait, dans un premier temps, refusé de mettre fin à ses activités dans le pays, préférant protéger les employés de sa filiale. Le retrait annoncé sera effectif à l’issue d’un préavis de six mois.
« Le contexte qui ne cesse de se dégrader au Myanmar, en matière de droits humains et plus généralement d’État de droit, depuis le coup d’État de février 2021, nous a conduits à réévaluer la situation et ne permet plus à TotalEnergies d’apporter une contribution positive suffisante dans ce pays », précise le géant de l’énergie dans un communiqué.
Les ONG faisaient pression depuis des mois en ce sens. Human Rights Watch avait, à nouveau, appelé les États-Unis et l’Union européenne à « imposer des mesures indispensables pour cibler les fonds qui financent le régime abusif de la junte », après avoir reçu une lettre du PDG de TotalEnergies, Patrick Pouyanné, soutenant « la mise en œuvre de sanctions ciblées ».
TotalEnergies est partenaire (31,24%) et opérateur du champ offshore gazier de Yadana, dans la mer d’Andaman, aux côtés des Américains Unocal-Chevron (28,26%), de PTTEP (25,5%), filiale de la société nationale d’énergie thaïlandaise, et de la société d’État birmane MOGE (15%).
En avril 2021, le fournisseur avait préféré maintenir sa présence en Birmanie et s’était engagé à verser l’équivalent des taxes dont l’entreprise s’acquitte auprès de l’État birman aux associations de défense pour les droits humains.
Total met donc fin à vingt ans de présence en Birmanie. EDF avait déjà jeté l’éponge en mars 2021, suspendant un projet de 1,5 milliard de dollars pour la construction d’un barrage hydroélectrique.
Sanctionner les revenus du gaz
C’est une décision très importante de la part du groupe, nous explique Bénédicte Jeannerod de l’ONG Human Rights Watch, au micro de Heike Schmidt de la rédaction internationale, « qui reflète l’importance d’éviter toute complicité dans les atrocités qui sont commises par la junte, en Birmanie ». La prochaine étape consiste à s’assurer que les revenus du gaz ne continuent pas à financer les crimes de la junte, aussi « la question des sanctions ciblées, pour stopper le paiement des revenus issus de l’exploitation du gaz, reste une priorité. Maintenant, la balle est encore plus dans le camp des gouvernements, pour travailler sur des sanctions ciblées, afin que l’argent du gaz ne termine pas dans la poche de la junte et ne finance pas les crimes contre l’humanité. En fait, jusqu’à maintenant, l’Union européenne n’a pas pris de sanctions sur les revenus du gaz. L’Union européenne a pris des sanctions ciblées sur un certain nombre de responsables de la junte – ce qui est très important – et sur un certain nombre d’identités, dans le secteur de l’exploitation du bois et des diamants – ce qui est aussi important – mais par contre, elle n’a pas pris de sanctions qui visent les revenus du gaz. Or, ce sont les revenus du gaz, qui fournissent les plus importantes ressources de la junte en devises étrangères. Et donc c’est là qu’il faut taper et sanctionner »
Il ne faut pas s’y tromper. Pour Total en termes purement business, la Birmanie ne pesait pas très lourd. Dans le choix « on perd du business mais on évite malgré tout de perdre en termes d’image », le calcul est assez vite fait.
Radio France Internationale – 21 janvier 2022
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