Non ! Le vin vietnamien ne vient pas que de Da Lat
Ils n’ont pas fini de nous étonner, ces Vietnamiens… Allez, avouons-le, les bons Gaulois que nous sommes ont l’imagination assez courte lorsqu’il s’agit d’admettre que l’on peut faire du vin hors de leurs frontières.
Ils devraient pourtant se rappeler que le Vietnam et la France ont une Histoire commune et que de cette Histoire, il reste de nombreuses traces, y compris viticoles.
C’est donc à la fin du 19e siècle qu’elle commence, cette histoire. Dès les années 1880, des colons français, entreprenants, essaient de planter des vignes en Indochine. Mais assez vite, ils doivent déchanter : la mousson rend impossible la création de vignobles dans les plaines.
Il leur faut donc prendre de l’altitude. Ce sera chose faite avec la découverte de Da Lat, dont le climat tempéré est idéal et qui va, de ce fait, devenir la capitale du vin vietnamien.
Il en ira ainsi jusqu’en 1976, date de la réunification du pays. La production viticole s’arrêtera alors pour reprendre finalement en 1998, sous l’impulsion de Ladora Winery, qui reste à ce jour le producteur numéro un, et dont le siège se situe bien sûr à Da Lat.
Production modeste de vins vietnamiens
Il faut par contre savoir que les vignes dont est issu le vin de Da Lat sont en fait installées dans la province côtière de Ninh Thuan (d’où l’étonnement du voyageur qui se rend à Da Lat et qui, ne voyant pas un seul pied de vigne à l’horizon, se demande d’où peut bien venir ce fameux vin). Les grappes de raisin sont acheminées par camion jusqu’à Da Lat, dont l’altitude assure des conditions optimales pour la fermentation et la vinification.
A l’heure actuelle, le Vietnam produit à peu près 12 millions de litres de vin par an, ce qui fait de lui un petit producteur (la production mondiale tourne autour de 250 millions de litres par an). Il y a aujourd’hui une vingtaine de domaines viticoles, qui produisent en moyenne 10 millions de litres par an, sur 3 000 hectares, soit des rendements de 33 hectolitres en moyenne.
Il s’agit essentiellement de vins de table à base de raisin, mais il est également possible de trouver du vin de litchi, d’abricot ou même de pomme. Pour ce qui est des cépages, le Cardinal est ultra-dominant (99% de la production), le Chambourcin et le Syrah se partageant les miettes : c’est le règne du raisin noir.
Très souvent, les vignes sont installées sur des pergolas, ce qui les protège tout aussi bien de l’ensoleillement trop fort que de l’humidité des sols. Mais il arrive également qu’elles soient cultivées en terrasse.
Le climat tropical étant ce qu’il est, la vigne pousse vite et il n’est pas rare de pouvoir faire 2 vendanges par an. Mais cela veut dire aussi que la vigne de se repose jamais et que son espérance de vie ne dépasse pas 8 années (on peut pousser jusqu’à 15 ans avec un porte-greffe).
Cela étant, cela veut dire aussi qu’il est possible de faire du vin toute l’année, en espaçant les périodes de taille sur différentes parcelles. Il en résulte un vin frais et non millésimé.
Le secteur vinicole promis à un bel avenir
C’est donc Ladora Winery qui domine le marché. L’entreprise applique à la lettre les standards de production européens. Ses vins sont du reste plus homogènes qu’ailleurs. Son produit phare, le Château Da Lat, créé en 2013, témoigne d’une volonté d’aller vers davantage de qualité.
Mais il faut savoir que Ladora Winery est également actif dans l’oenotourisme, qui est une activité naissante au Vietnam, mais conforme à une certaine tendance.
Le fait est que les Vietnamiens ne sont pas a priori de grands consommateurs de vins. Cela étant, la société évolue vite et l’émergence d’une classe aisée s’accompagne forcément de nouvelles habitudes de consommation, inspirées du modèle occidental. Et de fait, le vin est de plus en plus apprécié, au Vietnam. Il suffit, pour s’en convaincre, de voir à quel point le marché s’est développé, aussi bien à Hanoï qu’à Ho Chi Minh-ville, avec par exemple de grands distributeurs comme Warehouse ou Red Apron, qui ont désormais pignon sur rue.
Le vin vietnamien doit par contre faire face à une concurrence des plus rudes. Il ne faut pas se cacher que si le vin entre petit à petit dans les mœurs, ce n’est pas forcément le Château Da Lat qui tire son épingle du jeu ! Force est de reconnaître que les vins français, italiens, espagnols, argentins, chiliens, néo-zélandais ou encore australiens rencontrent beaucoup plus de succès.
Lepetitjournal.com – 13 février 2023
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