Les « marcheuses » de Pattaya sont désormais indésirables
Vous aimez vous promener le long de la mer à Pattaya. Les rencontres féminines sont nombreuses. Elles ne sont plus du goût de la police raconte notre chroniqueur Patrick Chesneau.
On croyait le sujet ensablé. Il est brusquement exhumé. Étonnement ! Stupéfaction générale ! Sidération ! Il y a plusieurs mois, la maréchaussée avait créé la sensation au cours d’une conférence de presse en compagnie de représentants de l’édilité à la mine réjouie. Ce fut alors le temps d’une annonce choc et sans détour : les péripatéticiennes sont une espèce inconnue à Pattaya. De mémoire de policiers, le plus vieux métier du monde n’avait même jamais pointé un carré de son joli minois dans la cité souvent décrite sous l’angle des turpitudes et des miasmes de l’âme humaine trop salace. Et d’expliquer avec un vrai semblant de conviction que dans la période récente, aucune once d’un début de phénomène licencieux n’avait été enregistré dans la station balnéaire la plus célèbre du Royaume…
Aucune débauche repérable à l’œil nu.
À la suite d’une enquête approfondie de terrain, les conclusions des Rouletabille siamois étaient alors sans appel. Walking street, Soi Buakaw et ruelles assimilées étaient expurgées de ces passions charnelles que tant de malotrus en déshérence affective viennent intentionnellement chercher sur place. En vain, précisent immédiatement les gradés du cru. Les bars sont des gargotes et des estaminets pittoresques. Rien d’autre. Leur licence leur enjoint seulement de veiller à l’accueil des clients écrasés par la canicule. Tout doit être prévu pour qu’ils puissent se désaltérer dans un cadre romantique. On se méprend donc sur les bar girls. Loin d’être des filles faciles. Leurs tenues aérées pourraient faire croire que… en demandant poliment… Eh bien non. Leur rôle serait plus proche de la profession de guides-conférencières au service du tourisme local. En charge de vanter les mérites des temples et des vestiges archéologiques auprès de visiteurs venus de tous les coins du monde initialement pour s’encanailler. Elles seraient donc préposées au rayonnement de la culture vernaculaire et de la religion bouddhiste. Leur savoir-faire ne consiste pas à dispenser papouilles et gratouilles contre menue monnaie… En résumé, pas la moindre trace de commerce énamouré. Pas de filles au bassin accueillant d’un côté et en vis à vis, une clientèle gorgée d’hormones mâles qui rapplique pour négocier un quart d’heure de râles extatiques. Pas de séduction et de jeux aguicheurs en contrepartie de devises à la hausse ou à la baisse selon les mouvements des bourses…Non, tout cela n’existe pas dans une destination à vocation familiale, scandaient les autorités. Pour pasticher la langue officielle des gogo-bars ou bars à gogos, ” No boom boom “. ” Me good girl “. Ce dont on ne doute pas.
Toujours est-il que les fins limiers lâchés en terrain miné, tout de bruns vêtus, ont certainement effectué un stage dans les magasins de l’enseigne Top Charoen.
Opticiens très connus s’il en est, dans le Royaume. Et là…miracle…ils ont recouvré la vue…Disons, une vision plus affûtée. Au point qu’on a affaire aujourd’hui à de véritables escouades de lynx dotés, pour éviter toute rechute d’attention, de nouvelles lunettes aux verres moins opaques. Et surtout moins déformants. Ils ont ainsi pu dresser un bien douloureux constat : l’amour rétribué a fait son apparition partout en ville. Les uniformes marrons excellent désormais à débusquer les manifestations trop ostensibles d’une libido fort rémunératrice. Que croyez-vous qu’il arrivât ? Un spectacle dantesque qu’on ne pouvait en aucun cas soupçonner jusqu’alors a soudain été révélé. Poignante réalité. Les policiers ayant investi le front de mer, ont aperçu des corps en pleines galipettes quasiment les pieds dans l’eau. Circonstance aggravante, le volume sonore des participants à ces agapes débridées empêcherait les pieuvres à ventouses de dormir. La magnifique baie de Pattaya, sorte de e-bay grandeur nature, résonne très régulièrement des ahanements intempestifs de Roméo consumés par le désir, en prise directe avec leur Juliette de comptoir. Sables émouvants propices aux transactions haletantes. Pourquoi à même la plage ? Terrain de jeu naturel pour les filles opérant en free-lance ? De quoi faire économiser aux clients une chambre d’hôtel pour les deux heures réglementaires. Une ” pa tchet tu ” (prononcer patchèttetoua) simple serviette en tissu éponge, suffit à ce moment de grâce.
Donc, les ” tamruat ” (tamelouatte, les policiers) se montrent désormais insensibles au dialogue des cultures né du frottement des corps.
Ils décident de porter un coup d’arrêt à ces interactions d’épidermes nouées à la seule lueur très crue de la lune. Comment en sont-ils arrivés à la découverte du pot aux roses ? Voire du poteau rose qui leur bouchait la vue ? Ont-ils bénéficié de tuyaux pas percés ? Disposent-ils d’indics ou d’agents infiltrés ? Certains ont-ils payer de leur personne pour dresser un constat aussi exact et véridique que possible ? Beaucoup, on le sait dans le moindre commissariat, se donnent corps et âme à leur métier, apparaissant enfin pour ce qu’il est, un véritable sacerdoce fait d’innombrables sacrifices. Côtoyer les filles de grande joie par exemple. La Police a livré peu d’indices quant à ses méthodes de pénétration du milieu de la nuit. Néanmoins, la vérité toute nue a fini par s’imposer à tous. Qu’on se le dise, le romantisme frelaté, version mercantile, ne sera pas hébergé avec enthousiasme et encouragement à des fins de vacances coquines par les autorités du plus grand lupanar à ciel ouvert de Thaïlande. Les valeurs morales et les bonnes mœurs dont les policiers du cru sont les défenseurs incorruptibles vont triompher. Mais cette prohibition des charmes tarifés en bord de mer plus l’interdiction simultanée des caresses appuyées censées venir en accompagnement, c’est tout de même un grain de sable dans une industrie des vacances en cours de redressement.
Favoriser le boom du tourisme sans boom boom… à Pattaya, est-ce possible ?
Par Patrick Chesneau – Gavroche-thailande.com – 17 juin 2023
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