Le Comité du patrimoine mondial ne doit pas fermer les yeux sur les « expulsions forcées massives » autour d’Angkor Wat
Le Comité du patrimoine mondial doit aborder la situation préoccupante des expulsions forcées aux abords du site classé d’Angkor lors des réunions qui auront lieu ce mois-ci, a déclaré Amnesty International après avoir soumis ses résultats préliminaires de recherches à l’Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO) en prévision de la 45e session du Comité, organisée à Riyadh, en Arabie saoudite, du 10 au 25 septembre.
« Le Comité du patrimoine mondial ne doit pas fermer les yeux sur le déplacement par les autorités cambodgiennes de quelque 10 000 familles installées aux abords des temples d’Angkor Wat, qui s’apparente à des expulsions forcées massives au nom de la conservation selon les résultats préliminaires de nos dernières recherches, a déclaré Montse Ferrer, directrice régionale adjointe pour la recherche à Amnesty International.
« Le gouvernement du Cambodge a affirmé que ces expulsions ne concernaient que des “habitants illégaux”, par opposition à ceux des “villages traditionnels”. Cependant, nos recherches montrent que les autorités n’ont pas donné d’explication claire sur qui détient un droit légalement reconnu de rester sur place. De nombreuses personnes forcées à partir nous ont indiqué que leurs familles vivaient à Angkor depuis plusieurs générations dans ce qu’elles considèrent comme des villages traditionnels.
« Nous avons en outre constaté les conditions déplorables des sites où ces familles sont réinstallées. Ceux-ci ne comportent ni logements, ni toilettes, si bien que les familles expulsées sont obligées de construire leurs propres habitations, en violation des normes internationales relatives aux droits humains selon lesquelles les sites de réinstallation doivent inclure la mise à disposition d’eau potable, de logements et d’installations sanitaires avant leur arrivée sur place. »
En mars, Amnesty International a signalé que les autorités cambodgiennes procédaient à des expulsions forcées de masse en intimidant les familles pour qu’elles quittent le site d’Angkor et déménagent vers les sites de réinstallation du gouvernement.
Depuis, l’organisation a réalisé des entretiens en face à face avec plus de 100 personnes qui ont été expulsées ou risquent de l’être.
Les résultats préliminaires de ces recherches ont été soumis à l’UNESCO et au Comité du patrimoine mondial avant sa 45e session, organisée à Riyadh, où le site d’Angkor Wat est à l’ordre du jour des réunions.
« Ces expulsions forcées massives éloignent des familles qui vivaient à Angkor Wat depuis plusieurs générations de leurs logements et de leurs sources de revenus. Elles sont également synonymes de hausse de l’endettement et d’appauvrissement pour beaucoup d’entre elles.
« Les autorités cambodgiennes doivent cesser toutes les expulsions forcées et ne reloger des personnes sur les sites de réinstallation qu’une fois que les conditions de procédure régulière seront respectées et que les sites concernés répondront aux critères de logement adéquat prévus par les normes internationales en matière de droits humains.
« Lors des réunions où le site d’Angkor sera examiné, le Comité doit saisir cette occasion de s’assurer que les efforts de conservation ne se font pas au détriment des droits humains. Il doit exiger que l’État cambodgien respecte ses obligations au regard du droit international relatif aux droits humains et des normes connexes », a déclaré Montse Ferrer.
Complément d’information
Le Comité du patrimoine mondial décide de l’inscription et du maintien des biens sur la Liste du patrimoine mondial. Il examine les rapports sur l’état de conservation des biens inscrits et demande aux gouvernements d’agir lorsque des biens ne sont pas gérés correctement.
Le site d’Angkor a été inscrit pour la première fois sur la Liste du patrimoine mondial en 1992 par l’UNESCO et le Comité du patrimoine mondial.
Amnesty International – 10 septembre 2023
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