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Entre Chine et États-Unis, le Vietnam joue la stratégie du bambou

Hanoï tente de poursuivre son rapprochement avec les États-Unis, indispensable à son économie mondialisée, tout en ménageant la Chine, qui est pour lui à la fois un modèle politique et un voisin menaçant. Un exercice qui exige de marier rigidité doctrinale et souplesse stratégique. En quoi consiste cette politique du bambou au Vietnam ?

Cela fait longtemps que l’on parle de politique du bambou, mais l’expression a vraiment été remise au goût du jour en 2021 par le secrétaire général du Parti communiste, Nguyen Phu Trong, l’homme fort du pays. Il a repris cette formule dans un discours où il comparait la diplomatie vietnamienne à un bambou avec « des racines solides, des tiges solides et des branches flexibles ».

En résumé, les Vietnamiens prennent soin de ne fâcher personne, et en particulier leur grand voisin du nord, la Chine, dont ils sont très dépendants, notamment au niveau économique. Mais dans le même temps, Hanoï cherche à s’affirmer par rapport à Pékin sur fond de rivalités territoriales. Car les deux pays se disputent des archipels en mer de Chine méridionale. Et le moment est propice pour s’affranchir de l’influence de Pékin. En effet, le pays bénéficie de la vague de délocalisations déclenchée par la guerre tarifaire de Donald Trump contre la Chine en 2019. Depuis cette date, de nombreuses entreprises coréennes, japonaises et même américaines arrivent pour y installer de nouvelles usines.

Et surtout, le Vietnam se rapproche des États-Unis. Le président Joe Biden s’y est rendu en septembre dernier et a signé toute une série d’accords économiques, notamment concernant la production de puces électroniques. Mais face aux avances américaines, le Vietnam joue la prudence. Il ne veut surtout pas braquer la Chine, car Pékin lui fournit la majeure partie des composants et des produits semi-finis qui alimente sa machine à exporter.

Mais au-delà de la dépendance économique entre la Chine et le Vietnam, il y a aussi des affinités idéologiques entre les deux pays

C’est certain, d’ailleurs, le mois dernier, le président chinois Xi Jinping et son épouse se sont rendus au Vietnam en visite officielle. Pour Xi Jinping, il s’agissait de s’assurer que Hanoï n’aille pas trop loin dans son rapprochement avec l’Occident. Et pour le régime vietnamien, il s’agissait d’obtenir des garanties de « sécurité politique », car Hanoï a peur que la porte ouverte aux investissements occidentaux n’aillent de pair avec la diffusion d’idées considérées comme « subversives ».

Finalement, on peut dire que la Chine reste pour Hanoï le modèle politique à imiter. Les deux régimes partagent la même obsession : prévenir toute révolution démocratique qui pourrait émaner de la société civile, « corrompue » par les idées occidentales.

Cette politique dite du « bambou » est-elle tenable sur le long terme ?

En fait, cette politique a pour objectif ultime de dissuader la Chine d’envahir le Vietnam ou de le contraindre par la force. Il y a déjà eu des guerres, il n’y a pas si longtemps que cela, notamment en 1979 après que le Vietnam a renversé le régime khmer rouge cambodgien, soutenu par Pékin.

Mais depuis, l’armée chinoise s’est considérablement modernisée et les Vietnamiens ne se font aucune illusion : ils n’ont en fait pas d’autre choix que de pratiquer une diplomatie mesurée. Et ils veulent à tout prix éviter que l’histoire ne se répète : le Vietnam avait payé très cher le fait d’avoir servi de champ de bataille entre deux grandes puissances, à l’époque l’URSS et l’Amérique, lors de la guerre du Vietnam.

Par Frédéric Noir – Radio France Internationale – 9 janvier 2024

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