Birmanie : des milliers de civils fuient la reprise des combats à la frontière thaïlandaise
Des milliers de civils fuient les combats à la frontière entre la Birmanie et la Thaïlande, alors que les rebelles font pression pour débusquer les troupes de la junte birmane retranchées depuis plusieurs jours sous un pont.
Après une semaine de calme relatif, les combats entre la junte birmane et des groupes ethniques armés ont repris à proximité de la frontière thaïlandaise, forçant des milliers de civils à fuir la zone. Les affrontements ont éclaté près de la ville de Myawaddy côté birman, une localité stratégique pour le commerce avec la Thaïlande, et dont les troupes gouvernementales ont été contraintes de se retirer le 11 avril face à la pression des rebelles.
Des témoins des côtés thaïlandais et birman de la frontière ont déclaré à Reuters avoir entendu des explosions et des tirs de mitrailleuses nourris près d’un pont stratégique entre vendredi soir et samedi. Lors de précédents affrontements, l’Union nationale Karen (KNU), qui combat la junte, avait indiqué que des soldats birmans s’étaient réfugiés sous un pont reliant Myawaddy à Mae Sot, en Thaïlande.
Dans un message publié sur les réseaux sociaux X, la chaîne de télévision thaïlandaise NBT précise que les forces de résistance ont fait usage de mitrailleuses et largué 20 bombes depuis des drones contre environ 200 soldats de la junte, qui ont battu en retraite après un assaut coordonné des rebelles.
Dans son journal télévisé du soir, la chaîne d’État MRTV du Myanmar a déclaré que les milices et les rebelles des minorités ethniques avaient eu recours à des bombardements pour attaquer les troupes de la junte, et que les forces gouvernementales avaient répondu par des frappes aériennes pour tenter de maintenir la stabilité, poussant les rebelles à se retirer après avoir subi de nombreuses pertes.
Mais une unité de l’armée thaïlandaise stationnée près de la frontière avec la Birmanie a indiqué qu’aucune « perte n'(avait) été signalée » pour le moment.
Entre 2 000 et 3 000 réfugiés
Le chef de la police de la ville de Mae Sot, en Thaïlande, a déclaré à l’AFP samedi après-midi que les combats « s’intensifiaient ». « Environ 2 000 personnes » ont franchi la frontière et ont été fouillées par les autorités locales, selon cette source. « Nous leur avons donné de la nourriture et les avons déplacées vers un endroit plus sûr », a-t-il ajouté. Selon les chiffres compilés par l’armée thaïlandaise et les autorités provinciales, 3 027 personnes avaient traversé samedi la frontière pour chercher refuge temporaire dans la ville de Mae Sot.
Le Premier ministre thaïlandais, Srettha Thavisin, a dit sur X qu’il suivait la situation de près et qu’il fournirait une aide humanitaire. Il a toutefois prévenu que la Thaïlande était « prête à protéger ses frontières et la sécurité de son peuple ».
L’armée birmane est confrontée à son plus grand défi depuis qu’elle a pris le contrôle du pays. Elle fait face à de multiples conflits de faible intensité et s’efforce de stabiliser une économie qui s’est effondrée depuis le coup d’État de 2021 contre le gouvernement d’Aung San Suu Kyi. Le pays est plongé dans une guerre civile entre les militaires d’un côté et, de l’autre, une alliance d’armées de minorités ethniques établies et un mouvement de résistance né de la répression sanglante des manifestations anti-coup d’État par la junte.
La prise de Myawaddy et d’avant-postes de l’armée qui l’entourent constitue un revers important pour une junte sous le coup de sanctions occidentales, la ville étant un point de passage pour les échanges commerciaux frontaliers. Le ministère thaïlandais des Affaires étrangères a déclaré qu’il espérait que la situation se normaliserait rapidement et qu’il avait demandé au gouvernement birman de veiller à ce que les combats ne débordent pas de la frontière.
Radio France Internationale – 21 avril 2024
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