Thaïlande : accusé de lèse-majesté, l’ex-Premier ministre Thaksin Shinawatra libéré sous caution
Jugé pour insulte contre la monarchie thaïlandaise, Thaksin Shinawatra, deux fois Premier ministre avant le coup d’État de 2006, a bénéficié, mardi, d’une libération sous caution. Le milliardaire, qui conserve une certaine influence dans le pays, n’a pas le droit de quitter la Thaïlande, sauf en cas d’accord de la justice.
En Thaïlande, l’ancien Premier ministre Thaksin Shinawatra a bénéficié, mardi 18 juin, d’une libération sous caution, dans une affaire de lèse-majesté hautement sensible dans un royaume habitué aux secousses politiques.
Le milliardaire âgé de 74 ans a quitté un tribunal de Bangkok après le versement d’une caution de 500 000 bahts (12 600 euros), ont indiqué les juges dans un communiqué.
L’ex-dirigeant, qui a fui le pays en 2008 pour échapper à d’anciennes condamnations ayant trait à ses années au pouvoir (2001-2006), n’a pas le droit de quitter la Thaïlande, sauf en cas d’accord de la justice, est-il précisé. La prochaine audience est prévue le 19 août.
Vieilles fractures
Ces poursuites rappellent de vieilles fractures en Thaïlande, entre le clan Shinawatra, soutenu par les milieux ruraux et pauvres du Nord et du Nord-Est, et l’establishment militaro-royaliste de Bangkok, attaché au statu quo.
Elles ont ouvert un nouveau chapitre d’incertitudes dans un royaume secoué par des crises cycliques, entre manifestations géantes parfois émaillées de violences, interventions de l’armée et décisions de justice contestées.
Le principal parti d’opposition et le Premier ministre, issu des rangs du mouvement des Shinawatra, font aussi l’objet de poursuites en justice, qui parasitent les débats et maintiennent sous pression le bloc historiquement hostile aux élites conservatrices.
L’inculpation pour lèse-majesté de Thaksin Shinawatra se base sur des déclarations tenues en 2015 lors d’une interview en Corée du Sud, quelques mois après un putsch de l’armée, dirigé contre sa sœur, Yingluck Shinawatra.
Thaksin Shinawatra nie les accusations, a assuré mardi son avocat Winyat Chatmontree.
L’ancien dirigeant n’a eu « aucune intention d’évoquer des personnes protégées par l’article 112 (qui régit la diffamation royale, NDLR) », a insisté son conseil.
Il est également poursuivi pour avoir enfreint la loi sur les crimes informatiques, qui prévoit jusqu’à cinq ans de prison.
Étouffer les voix contestataires
La loi sur la lèse-majesté, considérée comme l’une des plus sévères au monde de ce type, expose les accusés à des peines allant de trois à quinze ans d’emprisonnement.
Ce texte a été détourné pour étouffer toute voix contestataire à des fins politiques, notamment dans la foulée des manifestations géantes de 2020 et 2021 réclamant une refonte en profondeur de la monarchie, ont dénoncé ces dernières années des groupes de défense des droits humains.
Depuis les contestations populaires, plus de 270 personnes ont été poursuivies pour lèse-majesté, selon un collectif d’avocats thaïlandais.
Thaksin a vécu à l’étranger entre 2008 et 2023 pour fuir des condamnations en Thaïlande pour corruption et abus de pouvoir, qu’il estimait liées à son engagement politique contre des institutions jugées biaisées en faveur de la monarchie et des militaires.
Il est rentré au pays en août dernier, mais au prix d’un pacte secret avec ses anciens rivaux, selon des experts.
À peine rentré, il a bénéficié d’une grâce royale qui a réduit sa peine de prison de huit à un an. Mais il n’aura passé en tout que six mois en détention, en très grande partie dans un hôpital de Bangkok en raison de son état de santé et de son âge.
France 24 Tv avec Agence France Presse – 18 juin 2024
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