Phnom Penh : la fin des motodups, ces taxis-motos en voie de disparition
Autrefois omniprésents, les motodups disparaissent peu à peu des rues de Phnom Penh. Face aux tuk-tuks et aux applications de transport, ces chauffeurs luttent pour s’adapter ou survivre.
Motodups : un emblème de Phnom Penh qui s’efface
Il y a vingt ans, impossible de traverser Phnom Penh sans croiser un motodup, ces taxis-motos rapides et bon marché. Aujourd’hui, ils ne sont plus qu’une ombre dans la circulation, noyés parmi les tuk-tuks et les voitures.
Avec l’essor des véhicules privés, des bus et des applications de transport, les motodups n’ont plus la cote. Résultat ? Des chauffeurs contraints de se reconvertir… ou de lutter pour garder leur métier malgré des revenus en chute libre.
Des chauffeurs en perte de vitesse
Mong, 45 ans, a roulé en motodup toute sa vie. Autrefois, il gagnait jusqu’à 100 000 riels (25 dollars) par jour. Aujourd’hui, il passe des heures à attendre un client. « Je ne sais rien faire d’autre », dit-il, seul dans sa chambre louée à Phnom Penh, pendant que sa femme est retournée à Takeo avec leurs enfants.
Nhem Prem, lui, a commencé à conduire après le régime khmer rouge, dans les années 80. À l’époque, 50 000 riels (12,50 dollars) suffisaient à vivre confortablement. À 70 ans, il ne peut plus aller loin et se contente de petits trajets à 2 000 riels (0,50 dollar). Trop âgé pour passer au tuk-tuk, il complète ses revenus comme agent de sécurité.
Certains ont trouvé des alternatives. Un autre chauffeur anonyme fait désormais de la livraison pour le marché russe, transportant des fleurs et des colis. Ses revenus ? 40 000 à 50 000 riels (10 à 12,50 dollars) par jour, loin des 70 000 riels (17,50 dollars) qu’il gagnait autrefois en transportant des passagers.
Pour beaucoup, les motodups rappellent une époque révolue. Yem Sotheavik se souvient qu’enfant, elle les prenait avec sa mère. Depuis qu’elle a sa propre moto, elle ne les utilise plus. « Je n’y avais pas repensé depuis des années », confie-t-elle.
Même constat pour Kim Makara, qui se rendait à l’école en motodup pour 2 000 riels par jour. Il n’en a plus pris depuis huit ans.
Un métier en voie d’extinction
Pourquoi un tel déclin ? Les tuk-tuks et les applications de transport ont tout changé. Vorn Pao, président de l’Independent Democracy of Informal Economy Association, l’explique simplement : « Moins de clients, plus de technologie, plus de précarité. Certains chauffeurs ne peuvent même plus payer leur loyer. »
Chin Sochea, ancien motodup, a vite compris qu’il fallait évoluer. Il a acheté un tuk-tuk il y a dix ans après avoir perdu ses clients étrangers. Mais avec Grab et autres applications, il peine aujourd’hui à s’en sortir.
Sam Somoeun, lui, transportait autrefois des journalistes. Puis, quand les médias étrangers ont quitté le pays, il a dû passer au tuk-tuk. « Je vis au jour le jour », avoue-t-il.
Même Grab, qui a lancé en 2018 une offre de moto-taxis, n’a pas réussi à relancer ce mode de transport. Les tuk-tuks restent plus pratiques et plus sûrs. « C’est plus confortable et sécurisé », confirme Meng Seavmey, une employée de bureau.
Une disparition inévitable ?
Aucune donnée officielle ne recense le nombre de motodups encore en activité. Mais une chose est sûre : leur époque touche à sa fin. Autrefois rois des rues de Phnom Penh, ils ne sont plus qu’une option pour les plus modestes ou les nostalgiques.
Pendant que les tuk-tuks traditionnels cèdent eux-mêmes la place aux rickshaws modernes et aux applications, les motodups s’effacent peu à peu… et avec eux, un pan de l’histoire de Phnom Penh.
Par Teng Yalirozy – Cambodianess / Lepetitjournal.com – 8 février 2025
Articles similaires / Related posts:
- Les premiers tuktuks électriques du Cambodge Les premiers tuktuks 100% électriques vont commencer à envahir les routes de Phnom Penh durant toute l’année 2022....
- Le nouvel aéroport international de Phnom Penh devrait être opérationnel en 2025 Le nouvel aéroport, situé à environ 20 km du centre de la capitale cambodgienne, pourra accueillir 13 millions de passagers dans une première phase, puis 30 millions, puis 50 millions....
- Hun Manet plaide en faveur d’un métro aérien à Phnom Penh Le Premier ministre cambodgien Hun Manet a déclaré que le gouvernement avait mené des études sur des projets de train aérien et de métro à Phnom Penh, ainsi que sur l’amélioration des liaisons routières dans l’ensemble du pays, afin de répondre à l’augmentation de la population cambodgienne....
- Pas de prêt chinois pour la construction du canal Funan Techo Le Premier ministre Hun Manet a démenti les affirmations selon lesquelles le Cambodge emprunterait à la Chine pour construire le canal Funan Techo reliant Phnom Penh à la mer....
- Vols d’essai à partir du 8 septembre pour l’aéroport international de Techo Une nouvelle ère s’ouvre pour le transport aérien au Cambodge avec l’aéroport international de Techo, le plus grand jamais construit dans le pays, qui a débuté une série de vols d’essai le 8 septembre. ...