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Birmanie : «Faute de financements, nous allons être obligés de réduire l’aide alimentaire», alerte le PAM

C’est un cri d’alarme lancé par le Programme alimentaire mondial en Birmanie : en raison d’un manque critique de financement, le PAM ne sera pas en mesure de venir en aide aux personnes déplacées par la guerre civile qui déchire le pays d’Asie depuis des années. Entretien avec Michael Dunford, directeur régional du Programme alimentaire mondial (PAM) pour l’Asie et le Pacifique.

RFI : Quelles pourraient être les conséquences en Birmanie des problèmes de financement dont souffre actuellement le Programme alimentaire mondial (PAM) ?

Michael Dunford :  Nous avons besoin de 60 millions de dollars pour répondre aux besoins humanitaires d’ici la fin de l’année. Or, nous faisons face actuellement à une crise de financement majeure et actuellement, nous n’avons les fonds nécessaires que pour aider 35 000 personnes, bien loin des 300 000 que nous espérions aider. Les conséquences en seront dramatiques, car la situation en Birmanie est catastrophique. Plus de 15 millions de personnes souffrent d’insécurité alimentaire aiguë.

Si nous ne pouvons pas atteindre notre objectif, cela signifie que des milliers de personnes ne recevront pas d’aide alimentaire. Les niveaux de malnutrition vont empirer, la faim s’intensifiera et la situation humanitaire globale continuera de se détériorer. Depuis 2021, avec la dissolution du gouvernement élu et le coup d’État militaire, la situation humanitaire n’a cessé d’empirer. Cette année, l’ONU et d’autres organisations humanitaires prévoyaient d’aider plus de 19 millions de personnes ayant besoin d’un soutien. 

Cette crise intervient également juste avant moment critique pour les récoltes, la « soudure » entre la plantation et la récolte…

Nous entrons dans la « saison maigre », c’est-à-dire la période où les familles ont épuisé leurs récoltes et leurs réserves alimentaires. En plus du conflit, l’économie s’est effondrée, les prix des denrées alimentaires ont quadruplé en quatre ans et les opportunités d’emploi ont chuté. De plus, la Birmanie est vulnérable aux catastrophes climatiques : l’an dernier, nous avons subi de graves inondations et un typhon. Tous ces facteurs combinés rendent la population extrêmement vulnérable et soulignent le besoin urgent d’un soutien international.

Allez-vous devoir prioriser certaines catégories de bénéficiaires ? Qui allez-vous pouvoir aider et qui ne pourrez-vous pas soutenir ?

Pour les trois prochains mois, nous ne pourrons aider que 35 000 femmes et enfants ayant les pires indicateurs nutritionnels et qui sont les plus vulnérables. Cela signifie que 100 000 personnes déplacées à l’intérieur du pays, notamment dans l’État de Rakhine où certains vivent dans des camps depuis plus de dix ans, ne recevront pas d’aide. La situation est critique et je suis très inquiet des conséquences si nous ne parvenons pas à renforcer notre réponse humanitaire.

Quelles sont les causes de cette crise de financement ? Est-ce dû à une baisse des contributions des donateurs ?

Chaque année, le PAM indique ses besoins financiers. Malheureusement, cette année, pour diverses raisons, nous n’avons pas reçu les fonds escomptés. Cela nous oblige à réduire nos distributions alimentaires. Nous appelons donc tous les donateurs à continuer de soutenir la Birmanie et le Programme alimentaire mondial. Sans leur aide, nous ne pourrons pas répondre aux besoins de la population.

Y a-t-il un lien entre cette baisse de financement et la nouvelle administration aux États-Unis, avec la décision de Donald Trump de réduire drastiquement l’aide humanitaire américaine ?

C’est un facteur contributif, absolument. Le gouvernement américain a historiquement été notre principal soutien, tant en Birmanie qu’au niveau mondial. Cependant, nous sommes en discussion avec le département d’État américain pour connaître les niveaux de financement qu’ils pourront nous accorder. Une dérogation a en effet été prévue pour les activités humanitaires, notamment pour la sécurité alimentaire. Nous espérons donc que les fonds seront finalement disponibles…

Mais le temps presse et c’est la raison pour laquelle nous avons décidé de lancer cet appel public. Cependant, ce n’est pas seulement une question de financement américain : nous avons besoin du soutien de tous nos donateurs pour revenir à notre ambition initiale d’aider plus de 300 000 personnes en urgence.

Craignez-vous que cette réduction de l’aide humanitaire par les États-Unis aggrave encore la situation ?

La situation alimentaire mondiale est l’une des pires que j’ai observées en 20 ans. Aujourd’hui, dans le monde, plus de 343 millions de personnes souffrent d’insécurité alimentaire aiguë. Ce chiffre a fortement augmenté après la pandémie de Covid-19. Toute réduction de financement aura des conséquences graves pour ces populations. Nous appelons donc à une action urgente. 

Par Daniel Vallot – Radio France Internationale – 15 mars 2025

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