Derrière les canons, les mensonges
L’opinion publique cambodgienne a eu fort à faire ces dernières heures et jours, entre des “fake news” annonçant des armes chimiques thaïlandaises répandues, avec un nuage de gaz toxique pouvant se déplacer vers Siem Reap, ainsi que divers bulletins d’information de l’administration et du ministère de la Défense, confirmant que des militaires s’approchant pour négocier sur le site même du temple de Preah Vihear auraient, en fait, fait prisonniers 20 soldats khmers au lendemain du cessez-le-feu ! L’un d’eux s’étant depuis échappé.
Qui donc a intérêt à continuer les combats ?
La jeunesse se rassemble dans des manifestations de soutien aux soldats et aux déplacés. Certains envoient des messages aux jeunes Thaïlandais sur tous les réseaux pour leur dire de ne pas croire les informations qui circulent dans leur pays, et que les Khmers ne veulent que la paix.
Beaucoup estiment, à Phnom Penh, que la crise des frontières est instrumentalisée par les élites militaires et les partis conservateurs de Thaïlande. Les anciens “Chemises jaunes”, sans doute. Pour les Cambodgiens, c’est la politique intérieure de ce pays qui conduit à un tel drame d’une guerre stupide et certainement pas voulue par le petit Cambodge.
Sinon, pourquoi ?
Ce n’est pas un cessez-le-feu qui pourra arrêter ce conflit. Seule l’internationalisation du dossier devra, un jour ou l’autre, contraindre les Siamois à accepter les cartes d’un traité de 1907 qu’ils avaient négociés, et à s’en remettre au jugement d’une décision internationale, l’accepter et la mettre en œuvre. Vite, des observateurs impartiaux !
Il faut sans délai que cela arrive (ASEAN, Malaisie, Trump ?) car une guerre peut toujours dégénérer vers une invasion, redoutée aujourd’hui, d’une partie du Cambodge. Et un embrasement que pas un Khmer pacifiste ne pouvait imaginer il y a quelques semaines.
Pour arrêter ce risque pesant d’une vraie guerre de conquête, qui, à Bangkok, pourra — osera — se confronter aux militaires qui semblent avoir pris le pouvoir ?
Par Yann Moreels – Gavroche-thailande.com – 31 juillet 2025
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