La Thaïlande riposte à la campagne de désinformation menée par le Cambodge
Malgré le cessez-le-feu, les tensions entre la Thaïlande et le Cambodge restent vives, alimentées par une campagne de désinformation.
Au cours des cinq derniers jours, une vague d’accusations non vérifiées a inondé les médias d’État cambodgiens et les plateformes en ligne.
Ces accusations vont de violations de la frontière à un prétendu complot thaïlandais visant à assassiner l’ancien Premier ministre cambodgien Hun Sen, une accusation que Bangkok a qualifiée de « hideuse » et « sans fondement ».
Voir, par exemple, cet article à la une du journal Khmer Times :
Thai plot to assassinate Hun Sen and Hun Manet exposed (Un complot thaïlandais visant à assassiner Hun Sen et Hun Manet a été dévoilé).
Ce n’est pas de la diplomatie, c’est de la propagande
Le ministre des Affaires étrangères Maris Sangiampongsa a condamné ces accusations, affirmant qu’elles s’inscrivent dans une guerre de l’information plus large qui risque de compromettre le fragile calme rétabli le long de la frontière.
Lors d’une conférence de presse, il a accusé le Cambodge de déformer délibérément les faits afin de discréditer la Thaïlande sur la scène internationale.
« Ce n’est pas de la diplomatie, c’est de la propagande », a déclaré Maris.
« L’idée que la Thaïlande pourrait un jour envisager un complot d’assassinat est non seulement fausse, mais aussi ignoble.
Nous sommes attachés à la paix et au droit international. »
M. Maris a également souligné que depuis la conclusion du cessez-le-feu, la Thaïlande a respecté ses engagements, retiré ses forces et pris des mesures visant à instaurer la confiance.
Mais selon lui, le Cambodge est passé d’une posture militaire à une guerre narrative.
Selon le ministère des Affaires étrangères, au moins sept fausses informations visant la Thaïlande ont circulé sur les chaînes cambodgiennes en moins d’une semaine.
Il s’agit notamment de rapports fabriqués de toutes pièces faisant état d’incursions thaïlandaises, de mauvais traitements infligés à des prisonniers de guerre cambodgiens et d’opérations secrètes.
M. Maris a noté que bon nombre de ces informations ont été reprises par les chaînes de télévision publiques, les sites d’information pro-gouvernementaux et les pages des réseaux sociaux liées aux organismes officiels, ce qui suggère une orchestration centralisée.
« Nous voyons les mêmes titres, les mêmes formulations, le même timing », a-t-il déclaré.
« Ce n’est pas une coïncidence, c’est une stratégie. »
Alors que le Cambodge se présente comme une victime, la Thaïlande a largement adopté une posture défensive.
Les responsables thaïlandais ont consacré des ressources considérables à publier des clarifications, à organiser des réunions d’information avec des diplomates étrangers et à faire appel à des organismes internationaux tels que le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) pour vérifier le respect du droit humanitaire par le pays.
En outre, il a également informé les diplomates de 75 ambassades et organisations internationales basés à Bangkok en leur fournissant des faits clairs et vérifiables.
Il a donné pour instruction aux ambassades thaïlandaises dans le monde entier de contrer le discours cambodgien avec des informations précises par tous les moyens disponibles.
Selon les analystes, l’offensive médiatique du Cambodge reflète l’asymétrie des systèmes politiques nationaux.
Grâce à un commandement centralisé et à une indépendance minimale de la presse, le Cambodge peut rapidement coordonner et diffuser des messages sur toutes les plateformes.
La Thaïlande, en revanche, doit composer avec des débats internes, des procédures bureaucratiques et un environnement médiatique plus pluraliste, ce qui ralentit sa réaction.
« C’est une dynamique de communication classique entre David et Goliath », a déclaré un responsable thaïlandais sous couvert d’anonymat.
« Le plus petit acteur peut agir rapidement et de manière émotionnelle, tandis que le plus grand est censé agir de manière responsable, ce qui signifie souvent réagir trop tard. »
La situation est encore compliquée par le fait que le gouvernement cambodgien mélange délibérément les faits et les opinions dans ses messages médiatiques.
L’affirmation selon laquelle les forces thaïlandaises auraient tenté d’assassiner Hun Sen, par exemple, provient d’une source anonyme dans un média pro-gouvernemental et a ensuite été reprise par de hauts responsables cambodgiens sans aucune preuve.
Il y a par contre des preuves qui accusent Hun Sen d’avoir commandité l’assassinat d’opposants politiques en Thaïlande.
Maris a déclaré que le gouvernement thaïlandais avait immédiatement rejeté cette accusation et informé les Nations unies et les États membres de l’ASEAN de son caractère mensonger.
Il a réaffirmé que de telles allégations violaient à la fois les normes diplomatiques et l’esprit d’unité de l’ASEAN.
« Nous exhortons le Cambodge à réduire son recours à la guerre de l’information », a-t-il déclaré.
« Nous appelons à un retour à des négociations sérieuses et de bonne foi dans le cadre du GBC. »
Les négociations se poursuivent
Mardi, le deuxième cycle de pourparlers du GBC se poursuivait, les responsables thaïlandais faisant pression pour la mise en place d’un mécanisme transparent de surveillance du cessez-le-feu et de protocoles officiels de rapatriement des soldats tombés au combat.
M. Maris a également révélé que deux prisonniers de guerre cambodgiens avaient été rapatriés pour raisons de santé, sous la supervision et la vérification du CICR.
Il a confirmé que la Thaïlande avait demandé à plusieurs reprises au Cambodge de récupérer les dépouilles de ses soldats le long de la frontière, un geste que M. Maris a qualifié de « question de dignité humaine fondamentale ».
Malgré l’escalade rhétorique, les responsables thaïlandais restent optimistes quant à l’issue diplomatique.
Mais Maris a averti que la désinformation continue pourrait mettre en péril non seulement les relations bilatérales, mais aussi la stabilité régionale.
« Il s’agit d’un test non seulement pour les relations entre la Thaïlande et le Cambodge, mais aussi pour la capacité de l’ASEAN à défendre la vérité, la paix et le respect mutuel », a-t-il déclaré.
La Thaïlande envisage un procès pénal et civil contre le Cambodge
La Thaïlande envisage d’engager des poursuites pénales et civiles contre le Cambodge pour avoir prétendument déclenché le conflit armé fin juillet, qui a entraîné des pertes en vies humaines et des dégâts matériels en Thaïlande.
Le porte-parole du gouvernement, Jirayu Huangsap, a déclaré le mardi 5 août :
« Le Premier ministre par intérim, Phumtham Wechayachai, a demandé au Cabinet de consulter les agences compétentes, concernant la possibilité d’intenter des poursuites contre le Cambodge devant des tribunaux thaïlandais ou internationaux. »
Ceci afin de demander des comptes pour avoir prétendument déclenché le conflit armé avec la Thaïlande qui a duré du 24 au 28 juillet.
Quatorze civils thaïlandais et 15 soldats ont été tués et plus de 200 ont été blessés.
Plusieurs hôpitaux, écoles, magasins et maisons ont également été endommagés par des obus d’artillerie et des roquettes tirés par les forces cambodgiennes.
Le Cambodge condamne les menaces juridiques de la Thaïlande
Le gouvernement cambodgien a dénoncé l’annonce par la Thaïlande de son intention d’engager des poursuites judiciaires contre le Cambodge.
Il a qualifié cette décision de tentative infondée et motivée par des considérations politiques visant à détourner l’attention de la communauté internationale des critiques croissantes à l’égard des violations présumées du droit international humanitaire par l’armée thaïlandaise.
Le gouvernement thaïlandais affirme que les actions militaires cambodgiennes ont porté atteinte à sa souveraineté, causant des pertes civiles et militaires ainsi que des destructions matérielles.
Cependant, lors d’une conférence de presse tenue ce matin à Phnom Penh, le porte-parole du ministère des Affaires étrangères, Chum Sunthoray, a rejeté ces allégations comme étant « juridiquement infondées et moralement indéfendables ».
M. Sunthoray a déclaré :
« La Thaïlande utilise des mesures juridiques sans fondement comme un moyen de détourner l’attention de la pression croissante exercée sur elle en raison des dommages causés aux civils cambodgiens, de ses violations répétées du droit international humanitaire et de son mépris flagrant de l’accord de cessez-le-feu ».
Il a souligné que le Cambodge avait respecté les termes du cessez-le-feu et agi strictement en légitime défense après les incursions répétées de la Thaïlande sur le territoire cambodgien, en particulier autour de la zone contestée de Choam Te, dans la province d’Oddar Meanchey.
Toutelathailande.fr avec Thai PBS & Khmer times – 6 août 2025
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