Phnom Penh appelle la communauté internationale à garantir le cessez-le-feu
Le Cambodge dénonce de nouveaux heurts frontaliers et appelle les grandes puissances dont la France, l’ONU et l’ASEAN à agir pour garantir un cessez-le-feu fragile face à la Thaïlande.
Le 17 septembre, de violents affrontements ont éclaté dans la province cambodgienne de Banteay Meanchey entre villageois et forces thaïlandaises. Les autorités locales rapportent 28 blessés, dont des civils, des moines et un soldat, touchés par des tirs de balles en caoutchouc et de grenades lacrymogènes.
Le différend porte sur une zone disputée : le Cambodge la désigne comme Prey Chan, tandis que la Thaïlande la considère comme Ban Nong Ya Kaew, dans la province de Sa Kaeo. Depuis plusieurs semaines, des barbelés ont été installés par les autorités thaïlandaises, empêchant des familles cambodgiennes d’accéder à leurs maisons et à leurs terres agricoles. Vingt-cinq familles ont déjà dû quitter leurs foyers.
Phnom Penh accuse l’armée thaïlandaise
Le Premier ministre Hun Manet a dénoncé une « expansion des zones contestées » et l’expulsion forcée de villageois. Il a affirmé disposer de « sources crédibles » selon lesquelles l’armée thaïlandaise prévoirait de s’emparer de 17 autres sites frontaliers dans les provinces de Pursat et Koh Kong.
Dans un message publié sur Facebook, il a indiqué avoir écrit aux dirigeants étrangers afin d’obtenir leur appui pour « assurer la pleine et effective mise en œuvre des accords de cessez-le-feu ».
La médiation internationale sollicitée
Ces accords avaient été négociés en juillet dernier grâce à une médiation conjointe de la Chine, des États-Unis et de la Malaisie, après cinq jours de combats ayant fait au moins 48 morts. Un dispositif provisoire d’observateurs, dirigé par la Malaisie, a été mis en place pour surveiller leur respect. Ce groupe, baptisé Interim Observer Team (IOT), s’est rendu sur les lieux du dernier affrontement, mais n’a pas encore communiqué ses conclusions.
Le ministère thaïlandais des Affaires étrangères a défendu son action, affirmant que ses troupes avaient agi « avec retenue sur leur propre territoire » et que des villageois cambodgiens s’étaient livrés à des « incursions illégales » en violation du cessez-le-feu.
Le rôle particulier de la France
Au-delà des grandes puissances régionales, Phnom Penh attend aussi un engagement accru de la France. Hun Sen, chef de l’État par intérim, a appelé Paris à « encourager les deux parties à la patience et au respect du cessez-le-feu », selon le porte-parole du Sénat.
Hun Sen a ajouté à Olivier Richard, nouvel ambassadeur de France qu’il a reçu, que le Cambodge « ne demande pas à la France de condamner, mais de contribuer à préserver la stabilité ».
L’entretien a également porté sur la préparation de la visite attendue d’Emmanuel Macron au Cambodge en 2026, perçue comme une étape importante pour approfondir la coopération bilatérale.
L’Assemblée nationale plaide pour une mission d’enquête
À Kuala Lumpur, la présidente de l’Assemblée nationale, Khuon Sudary, a demandé l’envoi rapide d’une mission internationale d’établissement des faits. « Une mission internationale de vérification est donc urgemment nécessaire », a-t-elle déclaré devant l’Assemblée interparlementaire de l’ASEAN.
Elle a dénoncé la détention de 18 soldats cambodgiens capturés après le cessez-le-feu de juillet, ainsi que l’usage de la force contre des civils. « Nous ne devons pas appliquer la loi de la jungle et l’imposition extraterritoriale de la loi martiale qui porte atteinte à la souveraineté d’autres pays », a-t-elle averti.
La présidente a également rappelé l’importance de la Cour internationale de Justice (CIJ) : « Si nous croyons au droit international, nous devons respecter les décisions de la CIJ », citant les jugements sur le temple de Preah Vihear en 1962 et 2013.
Une frontière historiquement sensible
La frontière terrestre de 800 kilomètres entre le Cambodge et la Thaïlande a souvent été une source de tensions. Le différend autour du temple de Preah Vihear, attribué au Cambodge par la CIJ en 1962, a régulièrement suscité des crises bilatérales, dont des affrontements meurtriers en 2008 et 2011.
Les tensions se déplacent plus au sud, vers Banteay Meanchey, Pursat et Koh Kong, menaçant les mécanismes de règlement. Phnom Penh reproche à Bangkok d’utiliser la force militaire pour imposer unilatéralement ses positions.
Lepetitjournal.com – 19 septembre 2025
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