Thaïlande : perpétuité pour le meurtrier de Lim Kimya, ex-député franco-cambodgien tué à Bangkok
Le mobile du crime reste encore inconnu. Cet ancien député était l’une des dernières voix s’opposant au pouvoir du dirigeant du Cambodge Hun Sen.
Un Thaïlandais a été condamné vendredi à la réclusion à perpétuité pour le meurtre du Franco-Cambodgien Lim Kimya, ex-député de l’opposition cambodgienne tué par balles à Bangkok en janvier.
Ekkalak Paenoi encourait la peine de mort mais ayant avoué son crime, « le tribunal a réduit la peine à la réclusion à perpétuité », a déclaré le juge qui a lu son verdict à l’issue du procès dans la capitale thaïlandaise.
Le Franco-Cambodgien de 73 ans a été abattu le 7 janvier à Bangkok, la capitale thaïlandaise, où il arrivait en bus avec son épouse en provenance du Cambodge. Le tireur était à scooter.
Ancien député du Parti du sauvetage national du Cambodge (CNRP), formation dissoute en 2017, Lim Kimya était l’une des dernières voix s’opposant au pouvoir de Hun Sen et sa famille, qui contrôlent le Cambodge d’une main de fer depuis près de quarante ans.
« Les suspects se trouvent au Cambodge »
Après la dissolution de son parti par la Cour suprême cambodgienne, il s’était retiré de la vie politique et revenu en France, selon un communiqué des avocats de son épouse. Sa veuve française, Anne-Marie Lim, a témoigné au procès, ouvert mardi, rappelant qu’elle restait déterminée à « connaître la raison » du crime.
« Anne-Marie est probablement satisfaite du verdict rendu aujourd’hui, mais elle continue de demander qui a commandité le crime » et « souhaite que les autorités fassent toute la lumière sur cette affaire », a commenté vendredi auprès de la presse son avocate, Nadthasiri Bergman.
« Nous savons que les suspects se trouvent au Cambodge, et (le gouvernement thaïlandais) pourrait aider à faire avancer le processus d’extradition afin de les traduire en justice », a-t-elle ajouté.
Ekkalak Paenoi avait été arrêté au Cambodge au lendemain du meurtre. Extradé vers son pays d’origine, il avait avoué son crime dans une vidéo diffusée par la police, après son inculpation pour meurtre avec préméditation et possession illégale d’arme à feu. Le juge n’a pas éclairci le mobile du crime ni évoqué d’éventuels commanditaires.
Des figures de l’opposition cambodgienne accusent l’ancien puissant dirigeant du pays, Hun Sen. Son fils et actuel Premier ministre cambodgien, Hun Manet, a nié en janvier toute implication de son gouvernement ou de son père. Les pays occidentaux et les organisations de défense des droits humains l’ont de longue date accusé d’utiliser le système judiciaire pour écraser l’opposition.
« Enquêtes supplémentaires »
La police thaïlandaise a identifié en janvier deux suspects cambodgiens : Ly Ratanakrasksmey, accusé d’avoir recruté Ekkalak Paenoi ainsi que Pich Kimsrin, qui aurait fait le guet et se trouvait dans le même bus que la victime et sa femme.
Selon des médias locaux, Ly Ratanakrasksmey est un ancien conseiller de Hun Sen, mais le parti au pouvoir au Cambodge a réfuté l’accusation dans une déclaration indiquant qu’il avait été démis de ses fonctions en mars 2024. Pour Am Sam Ath, directeur des opérations de Licadho, organisation cambodgienne des droits, la condamnation à perpétuité du tireur thaïlandais n’offre qu’une justice partielle au politicien assassiné et sa famille.
« Puisque Lim Kimya est également Cambodgien, nous voulons voir les autorités et le tribunal thaïlandais mener des enquêtes supplémentaires afin de lui rendre pleinement justice », a-t-il déclaré à l’AFP.
Vendredi, le tribunal a blanché le Thaïlandais Chakrit Buakhil, accusé d’avoir conduit Ekkalak Paenoi à la frontière cambodgienne après le meurtre. « Il n’était que le chauffeur et ignorait ce qui se passait », a dit à l’AFP l’avocat de Chakrit Buakhil, Natchapong Moosakopas.
Des médias thaïlandais indiquaient en janvier que le meurtrier présumé avait touché 60 000 bahts (1 500 euros) pour tuer l’ancien député. Selon la police, il a réfuté avoir touché de l’argent et aurait accepté cette mission pour « s’acquitter d’une dette de reconnaissance ».
Le Parisien avec Agence France Presse – 3 octobre 2025
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