Viet Vibes : la nouvelle vague musicale vietnamienne

Longtemps restée dans l’ombre de la K-pop ou du Mandopop, la musique vietnamienne connaît aujourd’hui un véritable tournant. Entre héritage traditionnel et audace contemporaine, une nouvelle génération d’artistes réinvente la scène musicale du pays. Les sons du Vietnam d’aujourd’hui ne se contentent plus de séduire le public local : ils s’exportent, se partagent, et résonnent dans toute l’Asie.

La « V-pop », la pop vietnamienne, s’impose désormais comme un genre à part entière. Si elle puise ses racines dans les influences françaises et américaines de l’après-guerre, elle s’est aujourd’hui libérée de ces cadres pour affirmer une identité singulière : colorée, poétique et souvent profondément ancrée dans la culture vietnamienne. Les artistes jonglent entre langue, modernité et mémoire, et le résultat est une fusion musicale étonnante.

Les nouveaux visages de la scène vietnamienne

Parmi les figures les plus marquantes de cette nouvelle scène, Pháo s’impose avec son titre Sự Nghiệp Chướng, un morceau hybride mêlant rap, funk et jazz. Derrière ses rythmes percutants se cachent des paroles pleines d’ironie et de désillusion, une signature que la rappeuse revendique fièrement. 

Autre phénomène viral : Bắc Bling de Hòa Minzy, qui fusionne hip-hop et musique traditionnelle du Bắc Ninh, la région du nord connue pour ses chants folkloriques. Avec ses instruments anciens mêlés à un tempo moderne, la chanson rend hommage au patrimoine tout en le modernisant. Son clip, dépassant les 200 millions de vues en moins de trois mois, est devenu un symbole de cette génération qui réinvente la tradition à coups de beats électro.

Dans un registre plus introspectif, le rappeur Đen Vâu continue d’émouvoir avec, littéralement « Le goût de la maison ». Hymne au retour aux origines et à la nostalgie du foyer, le morceau met en lumière des héros ordinaires,  pompiers, travailleurs, étudiants et célèbre la chaleur du lien familial. Avec son style rap-poétique, Đen Vâu s’impose comme l’une des voix les plus sincères et aimées du pays.

Les ballades n’ont pas dit leur dernier mot : Khắc Hưng et Jimmii Nguyễn signent avec Cay une chanson d’amour simple et poignante, entre pop et mélancolie. La douleur, les regrets, la pluie, tout y est : un condensé d’émotions à la vietnamienne, pudique et sincère. 

À l’inverse, HIEUTHUHAI choisit la tension et l’énergie brute avec Nước Mắt Cá Sấu, un morceau plus sombre et urbain qui explore la douleur sous un angle plus moderne et électronique.

Une culture musicale en pleine effervescence

Au-delà de ces noms, la scène vietnamienne est d’une diversité étonnante. Le pays compte aujourd’hui des centaines d’artistes émergents qui mélangent hip-hop, R’n’B, indie ou rock alternatif. Des festivals comme Monsoon Music Festival à Hanoï ou HOZO à Hô Chi Minh-Ville attirent un public jeune, connecté et exigeant.

Cette effervescence musicale reflète une évolution culturelle plus large. Le Vietnam s’ouvre, se modernise, et les jeunes artistes s’emparent de thèmes universels : l’amour, la nostalgie, la réussite, mais aussi l’identité et les racines. Les chansons mêlent souvent le vietnamien et l’anglais, signe d’un pays tourné vers l’avenir sans renier son passé.

Et, comme souvent au Vietnam, la diaspora joue un rôle clé. Des artistes d’origine vietnamienne installés en France, aux États-Unis ou en Australie participent à ce renouveau, en exportant la V-pop vers de nouveaux publics. À l’image du nom « Nguyen » , symbole d’unité culturelle et de continuité historique, la musique vietnamienne tisse elle aussi un lien invisible entre tradition et modernité, passé et futur, pays et diaspora.

Aujourd’hui, écouter la V-pop, c’est découvrir un Vietnam multiple : enraciné dans ses coutumes, mais bouillonnant d’énergie créative. Derrière les rythmes accrocheurs, il y a des voix, des histoires et une identité qui se réinvente. Le Vietnam n’imite plus : il crée sa propre bande-son.

Lepetitjournal.com – 26 octobre 2025