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Trân Thê Phong, une vie en images

Depuis vingt-cinq ans, le photographe Trân Thê Phong capture l’humanité à travers son objectif, traquant la lumière et le sourire dans l’ombre du quotidien. Une passion célébrée lors de son exposition “25 ans – Un parcours” à Hô Chi Minh-Ville.

Né en 1969 à Hô Chi Minh-Ville, Trân Thê Phong est l’un de ceux qui transforment la réalité en émotions. Depuis ses débuts dans les années 1990, armé d’un vieil appareil argentique, il a compris qu’une photographie ne se limite pas à capturer une image : elle raconte une histoire. Une histoire faite de rires, de larmes, de labeur et de dignité.

L’exposition “25 ans -Un parcours”, présentée en octobre dernier à l’Association des beaux-arts de Hô Chi Minh-Ville, réunit plus de cent clichés soigneusement choisis, issus du patrimoine visuel accumulé par l’artiste au fil d’un quart de siècle.

Pour Trân Thê Phong, cette rétrospective est “un regard sur soi”, une manière de revisiter les innombrables visages et sourires qu’il a croisés.

Avec plus de deux cents distinctions nationales et internationales, vingt-deux expositions et plusieurs livres publiés, Trân Thê Phong s’est imposé comme une figure singulière de la photographie vietnamienne. Mais pour lui, l’appareil photo n’est pas un instrument de pouvoir ni de gloire : c’est un prolongement du cœur.

“Je veux capturer et partager l’optimisme, la tendresse et la pureté du sourire vietnamien. Même ceux qui vivent dans le noir, comme les enfants aveugles, portent en eux une lumière”, confie-t-il.

Cette lumière intérieure, il l’a mise en valeur dans son ouvrage Vuot qua bong tôi (Au-delà de l’ombre), récompensé le 19 octobre dernier parmi les 50 œuvres littéraires et artistiques majeures de Hô Chi Minh-Ville (1975-2025). Les photographies de ce livre, également présentées lors de l’’exposition “25 ans – Un parcours”, révèlent un monde de silence et de force : celui des enfants malvoyants, leurs gestes délicats, leurs sourires lumineux.

Une enfance dans la rue

Peut-être que sa sensibilité artistique vient de là : d’une enfance marquée par la difficulté. “Dès l’âge de trois ans, j’ai vécu seul, sans mes parents, dans la rue. Cette expérience m’a appris à observer et à compatir”, raconte-t-il avec pudeur.

Dans la série Tình cha (Amour paternel), il suit pendant plus d’un an un père et son fils pauvres du quartier 7, sous le soleil et la pluie, partageant leurs gestes, leurs silences. Après la publication du reportage, la solidarité s’est mise en marche :

la communauté a aidé la petite famille. “C’est là que j’ai compris la vraie puissance d’une photo”, murmure-t-il.

Pendant la pandémie de COVID-19, il a bravé les barrages et les formulaires d’autorisation pour documenter un pays à l’arrêt. “Chaque sortie était une épreuve, mais je savais que je devais y aller. Ces images resteront comme des traces de notre humanité dans l’adversité”.

Sa voix se fait douce, presque nostalgique : la photographie, pour lui, n’est pas un acte de capture, mais de reconnaissance.

Lorsqu’on lui demande, après tant d’années, s’il reste encore des sujets à photographier, il sourit : “La vie change chaque jour. Ce qui compte, c’est de sentir encore. Tant que l’émotion est là, je reprends l’appareil”.

Ses clichés, souvent en noir et blanc, respirent la compassion et la sérénité. Dans chaque regard capté, il cherche un éclat de vérité, un simple fragment de lumière.

Après vingt-cinq ans de métier, Trân Thê Phong ne retient ni chiffres ni trophées, mais une conviction simple et belle, qui est le cœur de son œuvre : “Tant qu’on aime les gens, la photographie nous conduit toujours vers la beauté”.

Quand on lui demande, après vingt-cinq ans derrière l’objectif, s’il reste encore quelque chose à photographier, il esquisse un sourire. “La vie change à chaque instant. Elle ne cesse d’offrir de nouvelles histoires. L’essentiel, c’est de savoir si l’on ressent encore. Tant que l’émotion me touche, je reprends mon appareil et je pars. Rester fidèle à soi-même, aimer les gens… alors la photographie vous conduira d’elle-même vers la beauté”.

By Thao Nguyên – Le courrier du Vietnam – 23 novembre 2025

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