La ruée russe vers le Vietnam
Après la pandémie de COVID-19, le Vietnam connaît un retour spectaculaire des touristes russes. De Ho Chi Minh-Ville à Nha Trang, de Da Nang à Phu Quoc, leur présence est désormais visible et structurante. Entre diplomatie, stratégie économique et quête d’exotisme, le Vietnam devient pour des centaines de milliers de Russes une destination incontournable, au point d’influencer les pratiques et les paysages touristiques de tout le pays.
L’attractivité du Vietnam auprès des voyageurs russes n’est pas le fruit du hasard : elle repose sur une politique clairement pensée. L’exemption de visa de 45 jours accordée depuis mars 2025 aux citoyens russes simplifie l’accès au territoire et encourage des séjours plus longs et plus spontanés. Le gouvernement multiplie également les actions de promotion ciblées en Russie, tandis que les tour-opérateurs vietnamiens développent des offres dédiées à cette clientèle perçue comme stable et à fort potentiel de croissance.
Des liaisons aériennes qui relancent la dynamique
L’essor du tourisme russe s’explique aussi par la réouverture des liaisons aériennes directes. Des vols charters reliant onze villes de Russie à Cam Ranh, via Anex Vietnam, ont repris en mars 2025 et montent rapidement en fréquence, jusqu’à une centaine de vols mensuels selon la saison. Ces vols sont organisés en partenariat avec des compagnies russes comme Azur Air ou Red Wings et sont des liaisons affrétées spécialement pour transporter des groupes de touristes russes directement vers des destinations vietnamiennes comme Cam Ranh ou Phu Quoc.
Situé dans la province de Khanh Hoa, Cam Ranh devient ainsi l’une des principales portes d’entrée du tourisme russe au Vietnam, renforçant l’accessibilité à d’autres stations balnéaires comme Da Nang ou Phu Quoc.
Des voyageurs en quête de chaleur et stabilité
Les touristes russes recherchent un ensemble d’atouts que le Vietnam offre avec constance : climat tropical, plages, variété de paysages, coût de la vie abordable et un sentiment de sécurité et de neutralité politique dans un contexte international tendu.
Ainsi, ils séjournent souvent plus d’une dizaine de jours, dépensent largement dans l’hôtellerie, les activités nautiques, la gastronomie ou l’artisanat local, et élargissent progressivement leur périmètre de découverte : Hanoï, Ho Chi Minh-Ville, Da Nang, Nha Trang, Mui Ne, Phu Quoc ou encore Da Lat.
Phu Quoc illustre de façon frappante cette montée en puissance du tourisme russe. Les panneaux en langue russe, les menus en cyrillique et l’adaptation linguistique spontanée des commerçants témoignent d’un phénomène visible dans d’autres stations balnéaires du pays.
Ce que l’on observe à Phu Quoc : marketing en langue russe, évolution des quartiers balnéaires, multiplication des services adaptés, est en réalité une vitrine du mouvement national. La station devient un laboratoire à ciel ouvert d’un tourisme vietnamien qui se reconfigure pour répondre à ce marché en expansion.
Khanh Hoa, capitale du tourisme russe
En 2025, Khanh Hoa enregistre près de 279 000 touristes russes sur les huit premiers mois de l’année, un bond spectaculaire. Les visiteurs apprécient autant les resorts de luxe que les hôtels plus modestes, ainsi que les activités balnéaires : plongée corallienne, excursions maritimes, parapente, gastronomie, cafés et produits locaux. Les autorités locales renforcent les services d’accueil à Cam Ranh et déploient davantage de personnel russophone, preuve de la structuration rapide du secteur.
Si ce boom représente une manne économique importante, il suscite aussi des interrogations. L’adaptation linguistique et commerciale de certaines zones, parfois très marquée, peut modifier leur identité et créer une forme de spécialisation qui ne correspond pas aux attentes d’autres visiteurs.
Le défi pour le Vietnam sera donc de transformer cette dynamique porteuse en développement touristique équilibré, sans diluer la diversité culturelle qui fait sa force.
Lepetitjournal.com – 24 novembre 2025