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La Birmanie commence à voter lors des premières élections législatives depuis le coup d’État de 2021

En Birmanie, la junte birmane organise à partir de dimanche 28 décembre des élections législatives qu’elle présente comme une étape vers la réconciliation, la première des trois phases d’un scrutin critiqué de toute part. Mais une partie des électeurs ont pu voter de manière anticipée, vendredi 26 décembre. Une large partie du territoire n’est pas sous le contrôle de l’armée, la plupart des formations d’opposition sont interdites d’y participer et l’ONU dénonce des intimidations. Des électeurs accusent le pouvoir de les avoir contraint  de voter par anticipation et en faveur de la junte.

L’ancienne cheffe du gouvernement civil Aung San Suu Kyi est en prison depuis le coup d’État militaire de février 2021 qui a mis fin à l’expérience démocratique d’une décennie dans le pays. De nombreux pays, ainsi que l’ONU, ont critiqué le processus électoral, vu comme une tentative de la junte de redorer son blason. L’élection, sur trois tours, doit s’étaler pendant un mois, et a été précédée par une vague de répression de tout semblant d’opposition.

La Birmanie, qui compte quelque 50 millions d’habitants, est aux prises avec une guerre civile meurtrière et le scrutin ne se tiendra pas dans les zones contrôlées par les rebelles. Dans les médias d’État, le chef de la junte Min Aung Hlaing avait présenté le scrutin comme une chance de réconciliation, tout en admettant que l’armée « continuera à jouer un rôle dans la conduite politique du pays ».

L’armée a dirigé la Birmanie depuis son indépendance, à part pendant un interlude démocratique entre 2011 et 2021, suscitant une vague de réformes et d’optimisme pour l’avenir du pays. Mais quand la Ligue nationale pour la démocratie (LND) d’Aung San Suu Kyi a largement devancé les candidats proches des militaires aux élections de 2020, le général Min Aung Hlaing s’est emparé du pouvoir, invoquant une fraude électorale généralisée.

Aung San Suu Kyi purge une peine de 27 ans de prison pour plusieurs condamnations, allant de la corruption à la violation de règles anti-Covid. Le parti de la lauréate du prix Nobel de la paix a été dissous, comme la plupart de ceux qui avaient participé au scrutin de 2020. Le Parti de l’union, de la solidarité et du développement (USDP), favorable aux militaires, représente plus d’un cinquième des candidats, selon le réseau Asian Network for Free Elections. La junte mène depuis plusieurs mois une offensive militaire pour conquérir davantage de terrain avant les élections, mais reconnaît que le vote ne sera pas possible dans une circonscription sur sept.

Un vote sous contrainte

Cette élection, qui vise à légitimer le pouvoir sans partage de l’armée, a en réalité déjà débuté depuis plusieurs semaines avec le vote anticipé. Dans cette école transformée en bureau de vote, le décompte des voix se fait parti par parti. Honneur tout d’abord à celles pour l’USDP, le proxy de l’armée, puis viennent les formations se présentant officiellement comme l’opposition. Htet htet Soe Oo, est candidate pour l’une d’elles, le Parti des pionniers du peuple. « Le vote anticipé c’est pour les fonctionnaires, tous ceux qui ne peuvent pas venir, les prisonniers, les soldats sur le front, les policiers mais aussi les étudiants à l’université », explique-t-elle au micro de notre envoyé spécial à Rangoun, Nicolas Rocca. 

Ce vote est aussi réalisé sous contrainte, en particulier chez les étudiants, qui ont dû faire un choix : voter pour suivre leurs études, ou bien s’arrêter et s’abstenir. « Sous pression de l’armée, l’administration de l’université a directement contacté les étudiants chez eux pour leur dire qu’il fallait qu’ils prennent part au vote anticipé. Si tu n’as pas participé au vote anticipé, ton droit à la scolarité est suspendu, ou alors on était menacé d’un an de suspension. J’ai réalisé que c’était inévitable et donc j’ai participé à l’élection », déplore une étudiante. Elle glisse que certains de ses amis ont tenu bon, même si cela signifiait perdre leur diplôme.

Selon le groupe de surveillance Armed Conflict Location & Data (ACLED), qui recense les faits de violence rapportés par les médias, 90 000 personnes ont été tuées en Birmanie, tous camps confondus. La guerre civile a aussi fait 3,6 millions de déplacés, tandis que la moitié de la population vit sous le seuil de pauvreté, selon l’ONU. « Je ne pense pas que quiconque croie que ces élections contribueront à résoudre les problèmes de la Birmanie », a déclaré le secrétaire général de l’ONU Antonio Guterres. Le rapporteur des Nations Unies Tom Andrews les a notamment qualifiées de « mascarade ».

Radio France Internationale – 27 décembre 2025

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