Quand la jeune génération se met au vert
Au Vietnam, lorsque la pollution et la protection de l’environnement deviennent une préoccupation sociétale, les jeunes citadins trouvent des alternatives pour un mode de vie plus écolo.
La pollution au Vietnam est un problème majeur qui s’aggrave dans toutes les villes. Depuis quelques années, de nombreux jeunes participent à des conférences et tables rondes sur le sujet. Une génération qui souhaite s’engager pleinement pour l’environnement. Une façon de montrer son intérêt et son inquiétude grandissante, en adoptant de nouvelles habitudes de vie, à contre-courant de la société de consommation.
L’avenir dans nos mains
Il y a quelques années, de nouveaux cafés à Hanoï et Hô Chi Minh-Ville ont commencé à réduire voire éliminer les plastiques à usage unique. Certains, comme le café-concert Câm (« Musique ») à Hanoï, ne proposent pas de boissons à emporter, sauf si le client apporte son propre récipient, a expliqué son copropriétaire Nguyên Dang Duc Minh.
Vu Ngoc Long, propriétaire du Kê Hoach Nho (« Le petit plan ») dans la capitale, a précisé que son café comptait environ 70 tasses et verres ainsi que 20 pailles réutilisables. « Leur durée est souvent courte et les coûts sont importants, mais ils permettent à notre café d’avoir une âme. Je trouve que ces investissements en valent la peine ».
La prise de conscience par une partie de la population de l’urgence environnementale par la population permet le dévelop-pement de boutiques « vertes ». Fondé en 2017, A Litlle Leaf possède à l’heure actuelle deux grandes boutiques à Hanoï et Hô Chi Minh-Ville. Ses clients, principalement des particuliers, mais aussi des cafés et restaurants, y viennent acheter « des pailles réutilisables, des bouteilles et de la céramique », a informé Nguyên Ngoc Quynh, l’une des fondatrices.
De son côté, Sap Hàng Chàng Sen de Ân Dang développe des produits biodégradables. « On vend chaque semaine 4.000 à 6.000 pailles en +bàng+, une plante, uniquement aux restaurants et cafés de Hanoï, en plus des 5.000 à 8.000 pailles en papier et en acier. La vente hebdomadaire des boîtes en bagasse de canne à sucre s’élève à environ 10.000 unités ». En septembre 2019, Ân Dang a lancé un nouveau concept : les clients viennent avec une bouteille ou autre contenant vide, et on le remplit avec le produit désiré. On appelle cela « la recharge ».
À rappeler que la toute première « station de recharge » au Vietnam fut Lai Dây Reffill à Hô Chi Minh- Ville, inaugurée en octobre 2018 par Nguyên Da Quyên et Helly Tông. Près de 250 produits sont proposés afin de réduire les emballages. Une belle avancée qui a attisé la curiosité du consul général de France à Hô Chi Minh-Ville, Vincent Floreani, à la cérémonie d’inauguration de la 2e station, en juillet 2019.
« Nos fournisseurs sont sélec-tionnés scrupuleusement. Nous sommes fiers de pouvoir affirmer que 75% des produits à Lai Dây Refill sont verts et fabriqués au Vietnam », a confié sa co-fondatrice Nguyên Da Quyên.
À la recherche de l’originalité
Live & Learn, qui fait partie des activistes au Vietnam, organise régulièrement des conférences et ateliers de formation en faveur des enfants et parents, avec la participation de spécialistes environnementaux. Ces initiatives cherchent à créer des dialogues entre particuliers, entreprises et administrations du Vietnam et de l’étranger, afin d’éveiller les consciences et apporter une perspective pluridimensionnelle sur la protection de l’envi-ronnement.
Sur les réseaux sociaux, les jeunes sont également très motivés. La page « Nói Không Voi Tui Nylon » (« Dire non aux sacs plastiques ») par exemple compte près de 83.000 abonnés et partage régulièrement les bonnes pratiques à adopter.
Par ailleurs, l’association Keep Hanoi
Clean, fondée par James Joseph Kendall, connaît une popularité
grandissante. Depuis 2015, cet Américain fait appel à des bénévoles pour
nettoyer les coins pollués de la capitale – une activité d’utilité
publique pour laquelle le président du Comité populaire de Hanoï, Nguyên
Duc Chung, a remis une décoration en mai 2016.
En fait, recycler les ordures, éliminer les plastiques à usage unique,
ou créer des recharges ne sont que le début de l’histoire. Les jeunes
activistes voudraient aller bien au-delà, afin de trouver des solutions à
plus grande échelle, pour un avenir meilleur. « Le plastique est simplement une victime des médias, a souligné Nguyên Ngoc Quynh, co-fondatrice de la boutique A Little Leaf. En
fait, la cause de la pollution vient de l’utilisation et non des
matériaux. Un plastique réutilisable est plus écologique qu’un papier ou
un bois à usage unique ».
En accord avec cette remarque, Ân Dang de Sap Hàng Chàng Sen a ajouté
que l’industrialisation de l’agriculture était la cause principale de la
pollution – une réalité souvent oubliée. Par conséquent, sa boutique
oblige ses fournisseurs à assurer le renouvellement des matières
premières afin d’établir un circuit durable et respectueux de
l’environnement.
« À de rares exceptions, on limite le nombre d’articles commandés,
pour que les fournisseurs puissent produire des plantes, des herbes…
Toutes formes de production sont polluantes, et nous partageons cette
idée avec nos fournisseurs », a-t-il indiqué.
C’est ce qu’a conclu Nguyên Huu Xuân, fondateur du restaurant Mot à Hôi An (province de Quang Nam, Centre). « Protéger
l’environnement consiste fondamentalement en un geste à la fois simple
et compliqué : réduire sa consommation. Je conseille toujours à mes
clients d’acheter et d’utiliser les produits de manière raisonnée en
accord avec leurs besoins. Vivre plus simplement devrait être la
nouvelle norme de notre génération ».
Par Dang Duong – Le Courrier du Vietnam – 8 mars 2020
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