Infos Birmanie

Une mer de meth, saisie record de drogues par l’armée birmane

Des centaines de sacs d’héroïne et méthamphétamine disposés en rangées interminables à la zone frontalière birmane, c’est la saisie record, d’une valeur de 100 millions de dollars, annoncée par l’armée birmane dans le célèbre « Triangle d’Or » au coeur de l’Asie du Sud-Est.

« C’est la plus grosse saisie de l’année », a déclaré vendredi le général Tun Tun Nyi, porte-parole du bureau du commandant en chef,lors d’une visite ouverte à la presse de cette zone en proie à des conflits ethniques et intercommunautaires alimentés par l’argent de la drogue.

Ce coup de filet, dans l’une des plus importantes régions productrices de stupéfiants, a mis fin à l’activité illicite de trois grands laboratoires cette semaine et permis de confisquer 43 millions de comprimés de méthamphétamine.

« Nos soldats sont dans les zones de la forêt que la police ne peut pas atteindre », a ajouté le général.

Des quantités record de drogue continuent d’être produites dans ces zones forestières où groupes rebelles et réseaux criminels font la loi. Ils en tirent des milliards de dollars chaque année.

L’Etat de Shan, au coeur du Triangle d’Or, zone terrestre escarpée qui sépare la Birmanie, le Laos, la Chine et la Thaïlande, est une plaque tournante du trafic de méthamphétamines, expédiées de là vers le reste de l’Asie du Sud-Est via la Thaïlande, au nord vers la Chine et à l’ouest par le Bangladesh.

Les opérations militaires autour de la zone de Kutkai, dans l’Etat de Shan, ont permis de retrouver des laboratoires d’où sortent des millions de pilules « yaba » (comprimé de méthamphétamine à teneur réduite en caféine), de l’héroïne ainsi que des cristaux de meth, drogue plus connue sous le nom de « Ice » (glace en anglais).

Le prix du « yaba » –la drogue de prédilection en Asie du sud– triple lors de son exportation en Thaïlande et Malaisie. La « glace » (Ice) made-in-Birmanie peut monter jusqu’à 150 dollars le kilo au moment de sa revente dans les rue en Australie.

Artillerie lourde

« Cette zone est très dangereuse », a expliqué à l’AFP un haut responsable de la lutte antidrogue sous couvert d’anonymat. Il ajoute que « la population locale est innocente, mais certains hommes d’affaires et groupes armés ethniques profitent de cette région pour produire des drogues ».

L’argent de la drogue alimente les conflits que se livrent depuis des décennies d’une part l’armée et les guérillas et d’autre part les groupes rebelles entre eux, chacun essayant de s’approprier un maximum de terres et de ressources naturelles, nombreuses dans cette région.

En juillet 2019, dans la même zone, les forces de sécurité qui menaient un raid contre les laboratoires de drogues tenus par des rebelles ont été repoussées par des tirs d' »artillerie lourde ».

L’endiguement de ce déluge de production de drogues dans ces zones hors de contrôle met sous pression la Birmanie. Ce trafic de produits stupéfiants a submergé les efforts de contrôle de la police régionale, tout en causant corruption et blanchiment d’argent. Cette cascade de drogue entraîne également des crises d’addiction.

L’Office des Nations unies contre la drogue et le crime (ONUDC) affirme que sans action efficace contre l’argent sale, associée à de meilleurs programmes de réhabilitation des toxicomanes, le pouvoir du crime organisé risque de devenir ingérable pour certains Etats d’Asie du Sud-Est.

Agence France Presse – 8 mars 2020

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