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Des transferts d’argents compliqués pour la diaspora birmane

Originaire du nord-ouest de la Birmanie, l’ethnie Chin, minorité chrétienne, est persécutée depuis des décennies, et sa région est désormais l’un des principaux terrains d’affrontement. Impuissants, les Chins de Malaisie tentent de soutenir financièrement leur peuple, mais c’est de plus en plus difficile depuis le coup d’État de la junte birmane.

Pendant six ans Charles n’a jamais manqué d’envoyer de l’argent à sa famille restée dans l’État Chin, le plus pauvre de la Birmanie. Avec son emploi dans le secteur tertiaire informel en Malaisie ce jeune homme a toujours fait le maximum pour aider ceux qu’il a laissés derrière lui quand il a fui les violences de la junte birmane. 

« J’envoyais une fois par mois de l’argent à ma sœur et à ma mère, avant le coup d’État, quand je recevais mon salaire. Ma sœur n’arrive pas à trouver un travail, et ma mère est en mauvaise santé », explique Charles.

Mais après le coup d’État du 1er février, Charles ne peut désormais envoyer que des petites sommes d’argent, sur lesquelles sont prélevées 10 %. « Pourquoi font-ils ça ? C’est pour ma mère cet argent, pas pour eux ! Cela nous rend tous très tristes », s’insurge-t-il. 

Des délais qui s’allongent

Autre tourment pour le jeune homme, le temps que prend désormais ces petits transferts d’argent. « Avant cela mettait un jour à arriver, maintenant cela prend trois ou quatre jours, donc on s’inquiète tous ici, on se demande où est passé notre argent », raconte-t-il.

Et dans l’État Chin, c’est avec toutes les précautions possibles qu’on va retirer l’argent envoyé par la diaspora. « Je ne dis rien à ma mère de ce que je fais ici, je ne lui dis pas “je te fais un virement demain”, je ne parle que de manière très discrète, implicite, et qu’à ma sœur », dit Charles, avant de poursuivre : « Ensuite, elle doit se cacher, elle appelle la boutique où elle peut retirer, elle demande à quelle heure elle peut passer, discrètement. Et on lui “passe ce soir, à telle heure », détaille-t-il.

Des risques d’arrestations

Cette peur est légitime, assure Charles, car lorsque, avec un groupe d’amis, il a souhaité envoyer une cagnotte d’argent à destination du mouvement de désobéissance civile, les choses ont mal tourné. « Quand l’argent est arrivé en Birmanie, la personne qui l’a récupéré a été identifiée, ils sont allés chez lui et l’ont arrêté », explique Charles.

James Bawi Thang Bik est à la tête de l’Alliance des réfugiés chins de Kuala Lumpur, il a lui tenté une parade pour envoyer de l’argent à ceux qui résistent à la junte birmane dans l’État Chin. « Je ne pouvais pas l’envoyer directement en Birmanie, alors je l’ai envoyé en Inde. Donc, quelqu’un a traversé la frontière, et l’a convertie en monnaie birmane. Mais cela a pris du temps et la valeur de la devise birmane a beaucoup chuté donc on a perdu pas mal d’argent en faisant ça », déplore James Bawi Thang Bik.

Ultime recours pour les Chins restés en Birmanie

Alors que l’aide financière devient presque impossible, la communauté exilée n’a désormais plus qu’un conseil à donner aux Chins restés en Birmanie. « On leur dit de se réfugier dans un endroit sûr, donc beaucoup de gens essayent de fuir en Inde, et ceux qui sont loin de la frontière indienne, eux, ils se cachent dans la jungle, dans les forêts », conseille James Bawi Thang Bik.

Un ultime recours qui inquiète tous les observateurs de la crise birmane, car les risques de famines et de maladies y sont grands. 

Par Gabrielle Maréchaux – Radio France Internationale – 2 juin 2021

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