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Birmanie. La junte saborde l’aide humanitaire, l’ONU redoute des « morts en masse »

Des stocks de riz et de médicaments ont été détruits par l’armée. La pénurie pourrait bien relever de la stratégie afin d’asphyxier définitivement le soutien des civils au soulèvement contre le coup d’État du 1er février. 

Avec des conséquences dramatiques, alerte le rapporteur spécial des Nations unies sur la situation des droits de l’homme en Birmanie.

Au cœur de la forêt birmane, les tentes de fortune ont désormais bien du mal à résister à la mousson d’été. Les bâches tendues à la va-vite plient sous le poids des pluies intenses. Et, face aux avancées de la junte militaire, les réfugiés birmans de l’intérieur ne restent pas plus de quelques jours dans le même abri.

Sans couvertures, dans l’impossibilité de laver les quelques vêtements qu’ils ont emportés avec eux, et sur fond d’épidémie de Covid-19, les enfants, les malades et les personnes âgées ne voient aucune aide parvenir jusqu’à eux. « Notre camp actuel près de la frontière (avec l’Inde – NDLR) n’est pas reconnu comme un abri pour les déplacés de l’intérieur. Lorsque nous avons demandé de la nourriture, (les autorités) nous ont dit qu’ils étaient à cours », témoigne une déplacée de Mindat (nord) atteinte d’un cancer, à l’édition birmane de la BBC.

L’artillerie fond sur les civils sans distinction

La pénurie pourrait bien relever de la stratégie afin d’asphyxier définitivement le soutien des civils au soulèvement contre le coup d’État du 1er février. Dans le sud du pays, des troupes de l’armée régulière ont ainsi détruit, le 8 juin, des stocks de riz et de médicaments destinés à 3000 réfugiés près de Moe Bye (État Shan).

L’aide, déjà en quantité insuffisante pour le nombre de déplacés, s’amenuise. Aucun lieu, y compris les monastères ornés de drapeaux blancs, ne garantit désormais la sécurité. L’artillerie fond sur les civils sans distinction. Depuis plusieurs semaines, les jeunes délaissent la résistance pacifique pour rejoindre les armées ethniques afin de recevoir une formation et gagner le front avec des fusils artisanaux.

Corridor humanitaire

La semaine dernière, le rapporteur spécial des Nations unies sur la situation des droits de l’homme en Birmanie, Tom Andrews, alertait quant au risque de famine et de maladies qui pourraient provoquer des « morts en masse », en particulier dans l’État de Kayah (est), où l’on estime à 100 000 le nombre de déplacés. ​​​​​​​ « Les attaques brutales et indiscriminées de la junte menacent la vie de plusieurs milliers d’hommes, de femmes et d’enfants », a-t-il expliqué avant d’exhorter à l’action.

Le corridor humanitaire, inscrit dans les conventions de Genève, pourrait rencontrer l’opposition de la junte au nom de la souveraineté. La Chine soutient un « consensus en cinq points » pour « relancer le processus de transformation démocratique », mais les luttes intestines au sein de l’Association des nations d’Asie du Sud-Est (Asean), dont les statuts reposent sur la non-ingérence, compliquent le dialogue avec l’armée birmane.

Par Lina Sankari – L’Humanité – 15 juin 2021

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