Une championne de badminton Birmane dans la tourmente
Depuis quelques jours la championne de badminton Birmane, Thet Htar Thuzar, subi des nombreux commentaires haineux sur les réseaux sociaux. Une situation qui découle d’un message écrit sur Facebook, où elle décrit sa joie de pouvoir représenter le peuple Birman aux Jeux Olympiques.
C’est une de ces tristes histoires emblématiques de ce qu’est devenue la Birmanie depuis le coup de force du 1er février dernier : chacun s’arroge le droit de parler au nom « du peuple birman », de juger, condamner et exécuter les autres au nom de « valeurs supérieures » ou afin de défendre les « droits Humains ». Que leur attitude viole ces mêmes droits Humains constitue une incohérence profonde qui n’a pas l’air de les gêner… C’est le média en ligne Coconuts Yangon qui raconte l’histoire : la championne birmane de badminton Thet Htar Thuzar figure sur la liste des 42 participants qui se disputeront le titre olympique en simple dans ce sport aux Jeux de Tokyo 2020 qui se tiendront… du 23 juillet au 8 août 2021. La jeune femme, qui évolue dans le monde du badminton depuis sa naissance – ses parents sont d’anciens joueurs de haut niveau, son père est entraîneur – a d’ailleurs écrit sur son compte Facebook : « Après de nombreuses années, mon rêve était vraiment devenu réalité. Je vais participer aux Jeux olympiques de Tokyo 2020. Nous pouvons sourire un instant au milieu d’une période difficile comme celle-ci. Mon succès est le succès de tout le peuple de Birmanie».
Les réseaux sociaux : un défouloir de haine
Malheureusement, comme vient de la rappeler l’affaire Mila en France, les médias sociaux permettent désormais à ceux qui aboient d’aboyer toujours plus fort et de juger toujours plus dur. Sans aucune considération pour le droit au libre-arbitre et à la vie privée, un droit pourtant inscrit comme droit Humain par les conventions et chartes des Nations unies… Ainsi, Thet Htar Thuzar se retrouve à subir des commentaires agressifs et peu amènes sur les réseaux. Des propos que Coconuts citent : «Si vous voulez y aller, faites-le. Mais ne parlez pas au nom des gens et ne dites pas que vous voulez les faire sourire. Vous le faite pour vous et par pour le bien public», a écrit une utilisatrice de Facebook nommée Grace, un pseudonyme très probablement. « Personnellement, je n’encourage plus les égoïstes qui ne participent pas au mouvement de désobéissance civile », envoie Htet Wai Phyo. «Vous y allez pour votre propre intérêt. Cela n’a rien à voir avec le peuple de Birmanie et vous ne nous représentez même pas. Ne vous servez donc jamais de nous comme d’un tremplin vers votre sortie si vous avez encore un peu de respect pour nos héros tombés au combat», affirme Hninn Ei Kyaw.
Et toute une série de commentaires équivalents alors que la jeune femme a participé ouvertement à des manifestations, prenant plus de risques que les anonymes au vu de sa notoriété, et que la masse de ceux qui donnent des conseils en ligne derrière des pseudonymes au nom de ce même peuple birman ne reçoivent pas de message comminatoire sur leur droit à parler pour les autres. En 2013, lors des Jeux d’Asie du Sud-Est qui se sont tenus en Birmanie, Thet Htar Thuzar avait été applaudie massivement lorsqu’elle défendait les couleurs de son pays, alors sous gouvernement militaire de transition. Elle avait 14 ans…
Ce dont malgré tout certains internautes se souviennent : «Nous souffrons peut-être des moments difficiles dans notre pays mais vous nous rendez fiers ! Faites savoir au monde entier que même en période sombre, la Birmanie a toujours des athlètes et des citoyens étonnants», commente Phone Kyaw Moe Myint. «Je vous soutiens. Allez à la poursuite de votre rêve. Montrez-leur ce que vous êtes, ma fille», peut-on lire dans un autre commentaire publié par Coconuts Yangon.
Lepetitjournal.com – 8 juillet 2021
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