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«Pandora Papers» : le musée d’art de Denver rend au Cambodge plusieurs vestiges pillés

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Quatre objets provenant de la collection du marchand d’art Douglas Latchford vont être restitués, après de nouvelles révélations concernant sa sulfureuse collection khmère.

La boîte de Pandore renfermait aussi quelques vestiges archéologiques. Dans la foulée de l’enquête des «Pandora Papers» qui a révélé, début octobre, un vaste réseau international d’évasion fiscale, le Denver Art Museum (Colorado) a annoncé à la presse américaine être sur le point de rendre au Cambodge quatre vestiges khmers acquis par l’intermédiaire du marchand et trafiquant d’art britannique Douglas Latchford.

Les quatre objets en question ont été retirés dès l’an passé des collections du musée d’art, au cours de l’enquête menée par le Consortium international des journalistes d’investigation à l’origine des «Pandora Papers». Déjà inculpé par la justice américaine en 2019, un an avant sa mort, pour le pillage du patrimoine cambodgien, le collectionneur Douglas Latchford a également ouvert plusieurs fonds opaques afin de dissimuler une partie de ses biens, ont révélé les documents rendus publics en octobre. «Le musée travaille désormais avec le gouvernement pour rendre les vestiges au Cambodge», a assuré la semaine dernière au Washington Post une porte-parole du Denver Art Museum.

D’après le blog spécialisé Chasing Aphrodite, cité par le Washington Post, le Denver Art Museum conservait en 2012 six objets provenant de la collection de Douglas Latchford, dont quatre dons. Parmi les pièces les plus importantes se trouve une statue de Prajnaparamita, la personnification féminine de la Sagesse transcendante dans le bouddhisme mahayana, qui fait partie des objets en cours de restitution. En grès, elle aurait été sculptée vers la fin du XIIe siècle et pourrait avoir orné, autrefois, le temple de Bayon, à Angkor Thom. En dehors des quatre objets cambodgiens, l’origine des deux autres vestiges douteux conservés au Denver Art Museum, un meuble thaïlandais du XVIIIe-XIXe siècle ainsi qu’une poterie du Néolithique, est en cours de vérification.

Un pillage au long cours du Cambodge

Décédé en août 2020, Douglas Latchford avait été inculpé aux États-Unis en novembre 2019 pour fraude et contrebande. La justice américaine lui reprochait d’avoir bâti sa carrière sur le pillage et la mise en circulation sur le marché de l’art international d’inestimables vestiges historiques du patrimoine cambodgien. D’une valeur totale estimée à 50 millions de dollars, une centaine d’objets de sa collection privée, l’une des plus importantes au monde consacrée à l’art khmer, avait été restituée en février 2021 au Cambodge, à l’initiative de la fille du trafiquant. Elles ne constitueraient pourtant qu’une partie du patrimoine cambodgien passé entre les mains de Latchford et toujours en circulation aujourd’hui.

Contacté par les autorités cambodgiennes dès l’inculpation de Douglas Latchford en 2019, le musée de Denver avait à l’époque refusé de procéder à la restitution des objets acquis avant la conclusion du procès, finalement interrompu par la mort du collectionneur britannique. D’après les «Pandora Papers», 43 antiquités liées à ce marchand se trouveraient aujourd’hui dans les collections de dix différents musées, dont le Met et le British Museum. Un nombre indéterminé d’objets se trouverait par ailleurs au sein de collections privées.

Les documents confidentiels dévoilés le 3 octobre par les «Pandora Papers» ont mis au jour l’existence d’une structure opaque, Skanda Trust, enregistrée sur l’île de Jersey et détenue par la famille Latchford. Le Consortium international des journalistes à l’origine de l’enquête a révélé qu’au moins 80 objets historiques datés de l’Empire khmer, dont un Bouddha en bronze d’une valeur estimée à 1,2 million d’euros recherché par la justice américaine, étaient liés à ce trust. Des sommes de provenance obscure également associées à Skanda Trust, peut-être associées à des ventes d’art, ont aussi été pointées du doigt par le Consortium. Le trafic illicite des biens culturels serait aujourd’hui la troisième activité criminelle internationale après le secteur de la drogue et celui de l’armement, estime l’Unesco.

Par Simon Cherner – Le Figaro – 20 octobre 2021

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