Birmanie. Un journaliste américain poursuivi pour terrorisme risque la prison à vie
Un journaliste américain détenu depuis plusieurs mois par la junte en Birmanie a été inculpé de terrorisme et de sédition, a indiqué mercredi son avocat à l’AFP, et risque la prison à vie s’il est condamné.
Danny Fenster, qui a été arrêté alors qu’il tentait de quitter le pays en mai, est visé par «deux chefs d’accusation en vertu de l’article 50(a) de la loi antiterroriste et de l’article 124(a) du Code pénal», a déclaré à l’AFP son avocat Than Zaw Aung. Une condamnation au titre de la loi antiterroriste est passible d’une peine allant jusqu’à la prison à vie.
Âgé de 37 ans, Danny Fenster était déjà poursuivi pour incitation à la dissidence, association illégale et pour avoir enfreint la loi sur l’immigration. Il est détenu à la prison d’Insein à côté de Rangoun. «Il est devenu très maigre», a déclaré Than Zaw Aung. Il a ajouté que Danny Fenster était «déçu» d’être visé par ces nouvelles accusations, qui ont été déposées mardi. Elles interviennent quelques jours après que l’ancien diplomate américain et négociateur d’otages Bill Richardson a rencontré le chef de la junte Min Aung Hlaing dans la capitale Naypyidaw.
Toujours de nombreux prisonniers politiques
Les deux hommes ont discuté de la livraison de vaccins contre le Covid-19 et de matériel médical, d’après l’armée. Elle n’a pas précisé si le cas de Danny Fenster a été évoqué par Bill Richardson, qui a participé par le passé à des négociations pour la libération d’otages américains dans le monde. Bill Richardson a déjà négocié la libération de prisonniers et de militaires américains en Corée du Nord, à Cuba, en Irak et au Soudan et a récemment cherché à faire libérer des détenus affiliés aux États-Unis au Venezuela.
L’ancien ambassadeur aux Nations Unies avait déclaré qu’il avait bon espoir d’avoir négocié un accord pour la reprise des visites du Comité international de la Croix-Rouge dans les prisons, où se trouvent de nombreux prisonniers politiques. Selon Bill Richardson, qui n’a pas voulu donner plus de détails, le département d’État lui avait demandé de ne pas évoquer le cas de Danny Fenster lors de sa visite.
Une presse étranglée
«Le cas de Danny est devenu emblématique du mépris total que les militaires birmans ont pour les médias indépendants», a déclaré Emerlynne Gil, directrice régionale adjointe chargée de la recherche à Amnesty International, dans un communiqué. «Ces nouvelles accusations sévères ne font que souligner davantage la tentative maladroite de poursuivre un journaliste indépendant qui devrait être libéré immédiatement et sans condition afin qu’il puisse retrouver sa famille et ses amis.»
Le journaliste aurait contracté le Covid-19 pendant sa détention, ont déclaré des membres de sa famille lors d’une conférence téléphonique avec des journalistes américains en août. La Birmanie a sombré dans le chaos depuis le putsch militaire du 1er février qui a mis fin à une brève parenthèse démocratique de 10 ans.
Le régime poursuit une répression sanglante contre ses opposants avec plus de 1200 civils tués et plus de 7000 en détention, selon l’Association d’assistance aux prisonniers politiques (AAPP). Cette ONG locale rapporte des cas de tortures, de viols et d’exécutions extrajudiciaires. La presse est étranglée par la junte qui tente de renforcer son contrôle de l’information, limitant l’accès à l’internet et annulant les licences des médias.
Plusieurs journalistes critiques à l’égard du gouvernement militaire figuraient parmi les personnes libérées le mois dernier lors d’une amnistie accordée par la junte à l’occasion d’un festival bouddhiste. Plus de 100 journalistes ont été arrêtés depuis le putsch, selon Reporting ASEAN, une association de défense des droits, qui indique que 31 d’entre eux sont toujours en détention.
Agence France Presse – 10 novembre 2021
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