Le journalisme en Birmanie est en danger de mort
Triste record journalistique 2021 pour la Birmanie. Le bilan annuel des exactions commises contre les journalistes dans le monde établi par Reporters sans frontières (RSF) a été rendu public le 16 décembre.
Il est encore plus sombre que les années passées. RSF a en effet répertorié un nombre record de journalistes en détention, 488 soit une croissance de 20 % en une seule année. Du jamais vu depuis le milieu des années 80 ! Une hausse à laquelle le régime des généraux birmans est loin d’avoir été étranger. Les chiffres sont là pour en témoigner. Ils sont glaçants.
Dorénavant, la République de l’Union du Myanmar est sur le podium des systèmes politiques les plus répressifs contre leur presse nationale.
Après avoir entraîné la fermeture des médias indépendants, bannis des écrans les chaînes étrangères d’informations continues voilà les journalistes birmans embastillés voire torturés jusqu’à mort s’en suive. La répression s’est abattue sans ménagement sur le monde de la presse nationale, tout autant que sur les correspondants étrangers.
En mars, un photojournaliste polonais travaillant pour une agence de presse allemande, Robert Bociaga, a été écroué deux semaines avant d’être expulsé. A la mi-mai, ce fut au tour d’un reporter japonais, Yuki Kitazumi, d’être renvoyé dans son pays mais après avoir été déjà retenu par les forces de l’ordre en février. A la mi-novembre, le rédacteur-en-chef américain de Frontier Myanmar, Danny Fenster, mis sous les verrous depuis mai, fut, lui, condamné à une peine de 11 an. Sus donc aux observateurs étrangers ! La junte les exècre et ne s’en cache pas. Le 24 novembre devant le Conseil de la presse birman, le général Min Aung Hlaing a proclamé sa vision de la liberté de la presse. Pour l’illustrer, il a déclaré haut et fort que les personnels des médias sont « les épaules et les yeux » de l’État et « au service de ses intérêts ».
Vue de Nay Pyi Taw, la mission des médias est on ne plus claire. Ils ont pour « rôle essentiel de
former une génération instruite, avec des attitudes et idéologies correctes, pour pouvoir diriger l’avenir de l’État ». Avec un tel état d’esprit, on ne s’étonnera pas qu’en moins d’un an, la Birmanie soit devenue le deuxième pays au monde par le nombre de ses journalistes en détention. Un triste record au côté de la Chine qui demeure le pire en la matière. Dans le cas birman, on peut parler d’une annus horribilis 2021 puisque ce sont dorénavant 11 % des journalistes incarcérés de par le monde qui sont dans les geôles du Conseil pour l’administration de l’État (SAC). Pour les femmes reporters, le bilan est pire encore. A l’échelle de toute notre planète, 15 % des femmes journalistes incarcérées sont des ressortissantes birmanes. Des proportions qui donnent le vertige et soulignent l’ampleur de la répression qui s’est abattue sur le pays et sa population.
Un chiffre encore ! De 2020 à décembre 2021, le nombre de journalistes birmans en prison est passé de 2 à 57, soit une augmentation de 2 750 %. Excusez du peu ! Et, le bilan ne cesse de s’alourdir un peu plus chaque semaine. C’est ainsi que depuis le 5 décembre 2021, 6 nouveaux journalistes ont été arrêtés. Pire, le 14 décembre, le photoreporter Soe Naing a été déclaré mort à la suite d’un interrogatoire de police violent. Une victime de plus. Au 16 décembre, selon l’Association d’assistance aux prisonniers politiques (AAPP), repliée en Thaïlande, au moins 1345 personnes ont été tuées en Birmanie depuis le 1 er février 2021 et 11009 mises à l’ombre.
Par François Guilbert – Gavroche-thailande.com – 18 décembre 2021
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