L’ONU se dit « profondément inquiète » de la montée de violences de ces derniers jours en Birmanie.
Depuis la fin de la mousson et l’arrivée de la saison sèche, les combats ont repris en Birmanie. Les affrontements entre la junte et les milices se concentrent actuellement à l’est du pays. Des groupes rebelles, souvent formés de citoyens, refusent de se soumettre à l’armée, qui a pris le pouvoir par la force le 1er février dernier.
Ces affrontements ont provoqué la fuite de milliers de personnes qui tentent de rejoindre la Thaïlande voisine. La semaine dernière, selon les rebelles et une ONG sur place, plusieurs dizaines de civils ont été retrouvés dans des voitures calcinés. L’ONU, qui juge ces informations « crédibles », s’est dite horrifiée et demande une enquête « approfondie et transparente ».
Depuis le coup d’État, la communauté internationale n’a pas beaucoup de marge de manœuvre pour tenter de résoudre la crise. La junte fait la sourde oreille aux appels de l’ONU et de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est. Alors que la situation sanitaire et humanitaire est critique, les militaires bloquent l’acheminement de l’aide et des fournitures médicales dans les régions où la résistance est forte, selon l’ONG Human rights watch.
Les discussions entre l’ONU et la junte sont difficiles. La principale interlocutrice, l’envoyée spéciale des Nations unies pour la Birmanie, ne peut pas faire son travail. Christine Schraner Burgener réclamait depuis plusieurs mois des « mesures très fermes » contre les militaires. Mais rien. La junte ne l’a même pas laissée entrer sur le territoire. Pour relancer le dialogue, l’ONU a nommé une nouvelle envoyée spéciale en octobre, Noeleen Heyzer. Pour la première fois lundi, elle a pris la parole pour demander un cessez-le-feu à l’occasion de la nouvelle année. Réponse indirecte de la junte : les militaires ont fermé le bureau de l’ONU en Birmanie, et n’ont pas précisé si la nouvelle représentante pourrait venir dans le pays ou non. 1 300 personnes sont mortes depuis février et 11 000 ont été arrêtées.
Aung San Suu Kyi toujours enfermée
L’ex-dirigeante Aung San Suu Kyi est assignée à résidence depuis le 1er février. La prix Nobel de la Paix est la cible de nombreuses accusations de la part du pouvoir qui trouve le moindre prétexte pour multiplier les procédures judiciaires et la réduire au silence. La junte lui reproche par exemple d’avoir importé et gardé illégalement des talkies-walkies. Le but : éloigner la figure de la démocratie birmane de l’arène politique. Elle risque des dizaines d’années de prison. Le verdict de son procès devait tomber lundi 27 décembre mais il a été une nouvelle fois repoussé. Le procès se tient à huis clos. La junte a interdit à ses avocats de parler à la presse et aux organisations internationales.
Au début du mois, Aung San Suu Kyi a déjà été condamné pour troubles publics et violation des règles sanitaires liées au Covid. Quatre ans de prison. Un verdict vivement critiqué à travers le monde. Sous la pression, la junte a fini par réduire cette peine à deux ans. L’ex-cheffe du gouvernement civil pourra la purger en résidence surveillée. Pour les spécialistes, ce geste calculé de la junte ne change pas le fond. Aung San Suu Kyi ne pourra pas faire campagne pour les prochaines élections de 2023.
Par Elise Delève – Radio Franceinfo – 28 décembre 2021
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