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La Thaïlande et l’Asean de plus en plus mal à l’aise face au conflit birman

Depuis plus d’un un an que les généraux ont pris le pouvoir en Birmanie, près de 2 000 personnes ont été tuées, plus de 11 000 arrêtées. Certaines zones du pays, notamment aux frontières, ont sombré dans le conflit armé, provoquant la fuite de centaines de milliers de personnes.

Alors que les voisins directs de la Birmanie, comme la Thaïlande, craignent une crise des réfugiés, l’Asean semble plus démunie que jamais pour résoudre le problème birman.

Au bord de la rivière qui marque la frontière entre la Thaïlande et la Birmanie, une modeste cahute où se tiennent deux soldats thaïlandais. En face, sur la rive birmane, des abris en plastique et en bambou, où sont installés quelques dizaines de réfugiés birmans.

Les soldats surveillent le passage. Depuis quelques mois, l’armée thaïlandaise a envoyé des renforts pour éviter un afflux massif de réfugiés. Une jeune femme birmane, installée côté thaïlandais, vient souvent leur apporter de la nourriture ou des produits de première nécessité.

« Quand il y a des donations, on les laissent là, au bord de l’eau, et ils viennent les chercher, sur des petits bateaux, explique-t-elle. Enfin, ils n’ont pas de bateaux, plutôt des bouées en plastique. Ce n’est pas très profond. » Puis elle ajoute : « Ils ne veulent pas débarquer sur la rive thaïlandaise parce que s’ils le font, les soldats que vous voyez là-bas, vont les arrêter et les amener sur un terrain vague qui servait pour le bétail jusqu’ici. C’est là où ils parquent les réfugiés. C’est un endroit horrible, ils ne veulent pas y vivre. Au moins ici, ils sont libres… »

« L’Asean n’est pas un groupe uni, il lui est très difficile de prendre des décisions »

Dans ces camps de fortune se cachent ensemble villageois et combattants en fuite. Leur accès est donc strictement restreint. En fait, les soldats birmans effectuent régulièrement des patrouilles de reconnaissance depuis l’autre rive, et savent très bien que des combattants pro-démocratie se cachent sur le sol thaïlandais. Mais rendre la chose publique mettrait la Thaïlande dans une situation diplomatique délicate. Elle-même dirigée par d’anciens militaires putschistes, elle n’a jamais officiellement pris position contre la junte birmane.

Pour Saw Taw Nee de l’Union nationale Karen, les voisins de la Birmanie n’ont pas adopté la bonne approche pour résoudre le conflit birman.

Nous avons remarqué que la Chine et les pays occidentaux délèguent à l’Asean le soin de résoudre le problème de la crise birmane. Mais l’Asean n’est pas un groupe uni, il lui est très difficile de prendre des décisions. De toute façon, son approche n’est pas la bonne, elle demande le retour à la situation de 2020 d’avant le coup d’État. Si on fait ça, ce n’est qu’un changement de régime, c’est-à-dire la Ligue pour la démocratie reviendra au pouvoir, l’armée aussi, on devra négocier à nouveau avec les militaires… On va tourner en rond.

Les leaders ethniques exigent à présent un changement radical de Constitution, qui maintienne les militaires définitivement en dehors de la politique. Au sein de l’Asean, pays démocratiques et autoritaires ont du mal à s’entendre sur la question.

Par Carol Isoux – Radio France Internationale – 18 février 2022

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