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Naufrage du Phénix au Vietnam : 84 ans après, des plongeurs brestois veulent lever le mystère

Il y a 84 ans, le sous-marin français Le Phénix sombrait à proximité des côtes du sud-Vietnam, faisant 70 victimes. Depuis cette date, le bâtiment repose par 100 mètres de fond. En janvier prochain, des Brestois plongeront pour filmer l’épave et rendre hommage aux victimes.

Vers 9 h du matin, le 15 juin 1939, Le Phénix dont le port d’attache était Brest, quitte la passe de Cam Ranh, en Cochinchine, le sud de l’actuel Vietnam. À son bord, 70 sous-mariniers dont une majorité de Bretons. À ses côtés évoluent un autre sous-marin, L’Espoir mais aussi le croiseur Lamotte-Picquet que les deux sous-marins sont censés faire semblant d’attaquer. À 10 h 07, un hydravion survole Le Phénix. Et, à 10 h 26, le sous-marin entame sa plongée. Vers 11 h 30, L’Espoir refait surface après avoir tiré ses torpilles. Mais toujours pas la masse imposante du kiosque du Phénix. L’inquiétude monte. L’Espoir entame des recherches et lance, vers midi, une alerte. Un peu après 17 h, une nappe de gazole sera repérée en surface. Signe qu’un drame vient de se nouer. La nuit tombe et il faut se résoudre au pire, les réserves d’oxygène du Phénix étant épuisées.

Dans les heures qui suivent, l’épave est localisée, fortement inclinée, à 12 milles nautiques de la côte : son étrave pointe à 40 m de profondeur, l’arrière reposant par 105 m de fond. À la fin juin, plusieurs tentatives de renflouement, à l’aide de chaînes seront tentées par le USS Pigeon de l’US Navy. En vain. Le 5 juillet, une cérémonie d’adieu est organisée en hommage aux victimes restées prisonnières de la lourde coque de 1 570 tonnes. Depuis ce jour, les causes exactes de ce naufrage n’ont jamais été établies.

Par 100 m de fond

Les années passent. En 2014, un ami d’Alain Gastrin, ancien plongeur démineur, qui réside au Vietnam, lui confie une carte détaillée des épaves de bateaux français, américains et japonais qui ont sombré au large du Vietnam. « L’histoire du Phénix m’a bouleversé, confie l’ancien militaire. Et l’envie de rendre hommage aux victimes m’a guidé ». Alain en parle à des amis plongeurs chevronnés qui, comme lui, ont participé à des opérations sur des épaves du XVIIe, dans les eaux suédoises. Tous sont emballés à l’idée de retrouver Le Phénix. En 2016, le porte-hélicoptères Tonnerre définira, plus précisément, la zone du naufrage. « Depuis, le projet s’est affiné », précise Erwan L’Her, qui fera partie de l’expédition à laquelle participeront une dizaine de personnes, dont des vidéastes et un photographe. Tous utiliseront des appareils de plongée autonome, de type recycleur.

La pose d’une stèle envisagée

« Nous espérons être au Vietnam, en janvier 2024, pour des opérations de reconnaissance avec un drone. D’après ce que nous savons, l’épave repose à 100 m de profondeur, couchée sur le flanc ». Dès que Le Phénix sera retrouvé, le matériel, une centaine de kilos par plongeur, suivra.

Le financement de cette opération (au bas mot 100 000 euros) est quasiment bouclé. « Un fabricant de montres de plongée va nous soutenir en créant une série Phénix », ajoute Alain Gastrin. Reste à convaincre les autorités vietnamiennes de donner leur feu vert. « La zone est située à proximité d’une base de la marine nationale. Nous allons prendre des contacts pour un maximum de transparence. Les Vietnamiens sont très sensibles aux hommages que l’on rend aux défunts. On envisage aussi la pose d’une stèle, près de la coque. Nous aimerions que les familles de l’équipage se manifestent (*) ».

Ces plongées vont peut-être permettre d’en savoir davantage sur les circonstances de ce drame. Certains évoquent une erreur de l’équipage qui aurait ouvert un panneau arrière pour aérer l’habitable en surface. L’eau s’y serait engouffrée. En 1939, une commission d’enquête avait conclu à une explosion de batteries. Le jour du drame, le chien du bord avait refusé obstinément de monter à bord du Phénix, lui préférant L’Espoir.

(*) Contact : erwan.lher@orange.fr

Par Didier Deniel – Le Télégramme – 7 mai 2023

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