Birmanie : Crédit agricole et Axa proposent des placements dans des entreprises qui vendent des armes à la junte
Plusieurs fonds d’investissement français permettent de placer son argent dans des sociétés chinoises ou indiennes fournissant camions, avions de combat ou postes de tir télécommandés à la dictature, en théorie soumise à embargo européen sur l’armement.
Le gestionnaire d’actifs Amundi, filiale de la banque Crédit agricole, et la compagnie d’assurances Axa sont accusés de financer indirectement la répression militaire en Birmanie, qui a tué 3 500 civils et en a déplacé 1,5 million depuis le coup d’Etat du 1er février 2021.
D’après une enquête menée par les ONG Justice for Myanmar et Info Birmanie d’une part, et d’autre part des informations obtenues par Le Monde à partir des données du groupe de recherches néerlandais Profundo, ces institutions financières offrent à leurs clients des investissements dans des entreprises indiennes et chinoises qui ont vendu au cours des derniers mois des armes et des équipements militaires à la junte birmane.
Amundi est, de loin, le gestionnaire d’actifs le plus exposé. Selon les dernières données disponibles, datant d’avril et de mai, il proposait à ses clients des titres de l’entreprise chinoise AviChina, qui a vendu des avions de combat légers à la junte, et de l’indien Bharat Electronics Limited, qui a fourni à l’armée birmane des postes de tir télécommandés. Il offrait aussi, comme Axa, des placements dans le capital de Sinotruk, un constructeur de poids lourds installé à Hongkong qui a vendu au Myanmar (nom donné à la Birmanie par le pouvoir militaire en 1989) des camions servant à transporter les soldats pour réprimer des manifestations.
« Ces institutions financières doivent agir maintenant pour s’assurer qu’elles ne soutiennent en aucune façon la junte, affirme Yadanar Maung, la porte-parole de l’ONG Justice for Myanmar. Nous demandons à la France d’adopter une position ferme contre le flux d’armes à destination de la junte, y compris en provenance de l’Inde. »
En juillet 2021, Crédit agricole avait déjà été alerté sur ses investissements dans des entreprises liées à la junte birmane. BankTrack, une ONG internationale qui suit de près les activités des banques, avait calculé que dix-neuf d’entre elles détenaient 65 milliards de dollars (60 milliards d’euros) de participations dans des entreprises liées à la junte militaire.
Par Julien Bouissou – Le Monde – 7 juillet 2023
Articles similaires / Related posts:
- Amundi et Axa accusés de financer indirectement la junte birmane Le gestionnaire d’actifs Amundi et l’assureur Axa sont accusés de proposer des placements dans des sociétés indiennes et chinoises qui ont vendu au cours des derniers mois des «camions, avions de combat ou postes de tir télécommandés» à la junte birmane, selon une enquête du journal Le Monde....
- VOLTALIA doit mettre un terme à ses relations commerciales avec une société liée à l’armée birmane Alors que l’ONU accuse l’armée du Myanmar de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité, que la mission des Nations unies sur le Myanmar a alerté dès septembre 2018 sur le fait que toute opération commerciale avec les forces de sécurité birmanes était indéfendable eu égard aux risques élevés de violations des droits humains, VOLTALIA continue de fournir de l’électricité à l’opérateur télécom MyTel lié à l’armée birmane....
- Les banques privées mises au pas par les militaires Le gouvernement militaire birman accroît la pression sur les banques privées pour qu’elles rouvrent leurs portes en menaçant de transférer de force les comptes de dépôt privés vers des banques contrôlées par l’armée, une mesure qui accélérerait le retour en arrière de la libéralisation entamée sous l’ancien président Thein Sein il y a dix ans....
- Myanmar : Une entreprise publique thaïlandaise soutient financièrement la junte La société pétrolière et gazière thaïlandaise PTT devrait rompre ses liens avec les entreprises militaires birmanes responsables d’abus...
- La banque KBZ accusée de collaborer avec l’armée birmane C’est une histoire où se mêle sans doute vérité, propagande et exagération mais qui décrit bien l’état de paranoïa, de fracturation et de défiance généralisées dans lesquelles la population de Birmanie évolue depuis le 1er février et la prise du pouvoir par l’armée....