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L’étude du Crédit Agricole qui loue le succès vietnamien

Le Crédit Agricole lorgne vers le Vietnam. La preuve ? La récente analyse publiée par ses services économiques.

Le Crédit Agricole lorgne vers le Vietnam. La preuve ? La récente analyse publiée par ses services économiques.

En 2022, la croissance vietnamienne a dépassé les 8%. Bien sûr, le pays a bénéficié d’un effet de rattrapage, après deux années marquées par les restrictions Covid. Paradoxalement, le Vietnam avait été plutôt épargné en 2020.

Salué pour sa gestion de la Covid efficace, le pays avait certes dû fermer ses frontières et recourir à des mesures sanitaires strictes, mais était toutefois parvenu à dégager une croissance de près de 3%. En 2021 en revanche, les retards pris dans les campagnes de vaccination et la poursuite d’une stratégie zéro-Covid avaient pénalisé de nombreux secteurs, à commencer par celui du tourisme.

Relancé, le Vietnam a pleinement profité du super-cycle exportateur, en particulier dans l’électronique et peut toujours compter sur des flux d’IDE relativement stables (autour de 4,5% du PIB chaque année). Les prévisions du FMI pour les cinq prochaines années font ainsi état d’une croissance solide, autour de 6% par an. Un rythme toutefois en adéquation avec les défis du pays, notamment en matière d’intégration sur le marché du travail et d’infrastructures. Reste également à savoir si le Vietnam pourra toujours bénéficier d’une forte demande extérieure adressée, alors que le cycle exportateur mondial semble moins porteur.

Une insertion réussie dans les chaînes de valeur mondiales

L’insertion du Vietnam dans le commerce international a été fulgurante. Les échanges (importations + exportations) ont atteint 190% du PIB en 2022, tandis que la part du Vietnam dans les exportations mondiales est passée de 0,6 à 1,9% entre 2012 et 2022. Le pays, peu doté en ressources naturelles, reproduit un modèle de croissance bien connu des pays asiatiques qui ont, pour la plupart, tous misé sur l’ouverture commerciale pour franchir les étapes du développement.

Dans cette course très concurrentielle, le Vietnam a su naviguer dans les eaux troubles de la géopolitique et des tensions commerciales. Au départ positionné sur un secteur très intensif en main-d’œuvre, mais plutôt faible en valeur ajoutée, le textile, le pays a profité des tensions sino-américaines pour prendre sa place sur un segment plus porteur, celui de l’électronique.

La progression du Vietnam dans ce secteur est fulgurante. Entre 2010 et 2022, la part de marché du pays dans les exportations de téléphones portables mondiales est passée de 0,6 à 12%. Le Vietnam est maintenant le deuxième pays exportateur de ce bien derrière la Chine. Fin 2022, Samsung produisait plus de la moitié de ses téléphones au Vietnam, et son stock d’IDE s’élevait à environ 20 Mds de dollars. Au-delà des simples chaînes d’assemblage, l’entreprise coréenne veut également faire du pays un centre de R&D.

Par l’intermédiaire de Foxconn, Apple souhaite également renforcer sa présence dans le pays, notamment pour la production de ses ordinateurs. Il faut dire que les États-Unis ont joué un rôle de premier ordre dans le développement du commerce extérieur vietnamien. Les importations américaines depuis le Vietnam ont presque triplé en cinq ans, passant de 50 Mds à 140 Mds de dollars, et sont largement portées par des biens jusqu’ici fournis par la Chine, comme les téléphones portables. La part de marché du Vietnam sur ce bien est ainsi passée de 5,6% à 19,4% entre 2018 et 2022.

En réalité, tout s’est accéléré depuis la guerre commerciale sino-américaine. Malgré l’accord signé en 2020 par Donald Trump et Xi Jinping, le Vietnam a continué de profiter de la stratégie de diversification américaine, et de la sécurisation des chaînes de valeur considérées comme les plus stratégiques.

Le Vietnam ne fait pourtant pas vraiment partie de la « mondialisation des amis » telle qu’elle a été théorisée par les Américains, le pays restant un régime autoritaire dirigé par le parti unique communiste, mais sa relative neutralité en a fait un partenaire de choix pour les États-Unis comme les pays avancés d’Asie, Corée du Sud et Japon en tête. Et bien que l’Inde soit régulièrement mise en avant et reçoive une forte attention médiatique, le pays a pris un sérieux train d’avance dans la course à la relocalisation.

Malgré ces atouts, les défis pour l’économie restent cependant immenses. Le PIB par habitant en parité de pouvoir d’achat a presque doublé en dix ans, mais le pays demeure classé parmi les économies à revenus intermédiaires bas par la Banque mondiale. Le Parti communiste s’est fixé pour objectif de devenir une économie à hauts revenus d’ici 2045. La route semble encore longue.

Notre opinion – Le Vietnam a tiré les leçons de l’histoire et reproduit un modèle de croissance qui avait déjà porté ses fruits, en Corée du Sud ou en Chine. En ouvrant son économie et en se positionnant comme une alternative à la Chine dans un contexte de tensions croissantes avec les États-Unis, le pari a plutôt été gagnant. Toutefois, le développement ne s’est pas fait sans contrepartie : positionné plutôt en aval des chaînes de valeur, le Vietnam a accru son déficit commercial face à la Chine (60 Mds de dollars en 2022), à mesure qu’il augmentait son excédent sur les États-Unis (95 Mds en 2022). Pris entre deux feux et toujours très dépendant des entreprises étrangères, qui assurent encore l’essentiel des exportations, le Vietnam doit donc manœuvrer afin de ne mécontenter ni son grand voisin fournisseur, ni son premier client.

Le Vietnam prend ainsi grand soin à garder une position neutre, même si les revendications de la Chine en mer de Chine l’inquiète. En multipliant les accords commerciaux, en Asie et ailleurs, le pays incarne là encore les valeurs toutes asiatiques de pragmatisme commercial, et croit encore que la mondialisation heureuse peut être la clé du développement.

Gavroche-thailande.com – 11 juillet 2023

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