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Emprisonné au Laos et molesté ? Le témoignage d’un jeune français mis à mal par les faits

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Gavroche scanne régulièrement pour ses lecteurs la presse française, et publie des extraits d’articles ou témoignages concernant la Thaïlande ou les autres « pays du sourire », dont le Laos. Nous partons du principe que ces articles, déjà publiés, méritent d’être portés à la connaissance de notre public régional.

C’est ce que nous avons fait, ces derniers jours, en publiant des extraits du témoignage d’un jeune français affirmant avoir été arrêté, emprisonné, molesté puis délesté de 600 dollars par des policiers en civil au Laos. Son texte a d’abord été publié sur le site d’informations locales actu.fr, repris d’un journal du Jura.

La force de Gavroche est heureusement d’avoir un solide lectorat local ! Or dès publication de cet article, les remarques de lecteurs ont afflué, questionnant la crédibilité de ce témoignage, et sa véracité. Par chance, l’une de nos amies, résidente à Vientiane et partenaire de Gavroche, s’est emparée du sujet. Voici sa contre-enquête. Dans l’attente de plus amples informations du jeune français présumé arrêté et enlevé, que nous ne sommes pas parvenus à joindre malgré plusieurs tentatives.

Arrêté, emprisonné, molesté au Laos : le « témoignage » pour le moins étrange d’un jeune jurassien

A Vientiane, les conversations vont bon train, concernant la détention d’un français au Laos, dans des circonstances rocambolesques. Les faits ne seraient pas récents : mars 2023, d’après la présumée victime interrogée par l’Actu.fr. Relayé par le très populaire Gavroche, journal francophone incontournable en Asie du Sud-Est, l’information surprend à Vientiane, les expatriés comme les résidents nationaux.

Arrêté par des policiers en civil

Tanguy Jacob, 22 ans, déclare avoir été arrêté par des civils (sans doute policiers) dans la rue, sans raisons apparentes, alors qu’il était avec ses amis. Poussé dans une voiture, il aurait été emmené en prison sans autre forme de procès, la cheville attachée à un pilori.

Durant ses 24 heures de détention, il décrit une cellule plongée dans le silence et l’obscurité, l’alternance toutes les six heures de l’entrave à la cheville, les coups de crosse dans le ventre, les menaces à l’AKA47, et les travaux forcés l’après midi. Aux camarades du détenu, les gardiens de prisons auraient réclamé 600 dollars américains pour sa libération, et mis en garde contre une intervention de l’ambassade de France, faute de quoi leur ami « disparaîtrait ». Après un jour et une nuit en captivité, le jeune jurassien affirme avoir été libéré suite au paiement de la somme exigée par ses gardiens.

Des incohérences flagrantes.

Contactée par téléphone, l’ambassade de France au Laos affirme n’avoir jamais entendu parler de cette histoire. « Qu’un français soit en garde à vue pendant 24h, on pourrait ne pas nous en informer, nous répond le service consulaire, mais en prison, les autorités laotiennes sont tenues par la Convention de Genève de nous prévenir, et l’ont toujours fait ».

Plusieurs visiteurs de prisons  étrangers interrogés au Laos affirment pour leur part n’avoir jamais vu de pilori ou de cellules plongées dans l’obscurité. Inédite encore, l’arrestation d’un étranger par des civils, conduit directement en prison. Delphine, expatriée française, assiste régulièrement les prévenus étrangers en sa qualité d’interprète. « la première étape c’est la garde à vue, décrit elle, puis, pour les étrangers, la détention au centre d’immigration, dans un premier temps plus ou moins long, avant éventuellement de rejoindre la prison pour étrangers. L’ambassade du prévenu est informée dès la fin de la garde à vue si celle ci est suivie d’une détention ». des propos confirmés par les autorités consulaires françaises.

Une Kalachnikov, vraiment ?

Les familiers des procédures judiciaires au Laos tout comme les résidents, nationaux ou étrangers, ne manquent pas de relever un certain nombre d’interrogations : Comment ce jeune français de 22 ans a t il identifié de manière certaine un AKA47 ? Et pourquoi pas un fusil M16 par exemple ? Des gardiens de prison qui déclarent « s’en ficher de l’Ambassade de France, dans un pays communiste », un qualificatif rarement employé en lao comme en langue étrangère : ici on parle plutôt du Parti. Mieux : on n’en parle pas du tout.

Tout comme cette détention assez courte somme toute, mais durant laquelle le jeune français dit avoir subi les brimades des matons, et le changement de pied au pilori toute les six heures. Autant de détails relatés, mais aucun sur le moment et les circonstances de son arrestation. Lui a t-on confisqué ses papiers d’identité ? Son portefeuille ? Son téléphone ? Autre incohérence : si l’interpellation a lieu comme il le raconte en présence de ses camarades, pourquoi doute t-il du fait que ceux-ci tentent de le retrouver ?

Sur les réseaux sociaux, un autre voyage….

Sur les réseaux sociaux du jeune homme et de ses amis, on le voit effectivement en voyage au Laos au printemps 2023, mais aucune allusion n’est faite concernant ses mésaventures. Pas même un commentaire de follower, comme si l’évènement n’avait jamais eu lieu. En revanche, sont publiés beaucoup de photos de jeunes faisant la fête,
alcool, cigarettes, rien de répréhensible certes, mais pas l’ombre d’un traumatisme.

À la lecture de l’article de l’actu.fr, on s’étonne alors du seul témoignage du jeune homme, non étayé par ceux des compagnons de voyage et de la famille.

Joint par téléphone, l’auteur de l’article n’a pas souhaité répondre à nos questions, tout comme Tanguy Jacob, qui ne donnera pas suite à notre demande d’interview.

À Vientiane, cette histoire surprend, agace parfois, mais pour la majorité des personnes interrogées, ça sent le canular. Nicolas, français d’origine laotienne, travaille dans l’hôtellerie. Il fait du bénévolat pour une association d’entraide afin d’assister les français en détresse, et est visiteur de prison. Ce récit ubuesque ne le convainc pas. « Personne ne se fait arrêter pour rien au Laos, surtout pas un étranger » rappelle t-il. « a t-il provoqué une bagarre dans un bar sous l’effet de l’alcool, pas payé ses consommations ou pris des substances illicites ? À mon avis il s’est fait arrêté par le chef du village qui lui aura remonté les bretelles, peut être délesté d’une amende surtout si il y a eu des dégâts à payer, mais en aucun cas ce jeune n’a été en prison au Laos. Et vexé il se venge en voulant salir la police par ce témoignage absurde ».

Rien de tel au Laos, selon les familiers du pays

Une théorie partagée par beaucoup de monde en ville, mais après tout : nous n’en savons
rien. Une certitude finalement : la procédure décrite par Tanguy Jacob ainsi que son
expérience carcérale, ne correspond à rien d’existant ici au Laos.

Gavroche-thailande.com – 16 août 2023

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