Camp de déplacés en Birmanie : « Ma maison a tremblé » sous l’impact de la bombe
Des rescapés d’une attaque meurtrière fouillent les décombres de leurs habitations en bambou et en tôle, tentant de retrouver leurs possessions, dans le camp de Mong Lai Hkyet, en Birmanie, près de la frontière avec la Chine.
Des rescapés d’une attaque meurtrière fouillent les décombres de leurs habitations en bambou et en tôle, tentant de retrouver leurs possessions, dans le camp de Mong Lai Hkyet, en Birmanie, près de la frontière avec la Chine.
« Même ma maison a tremblé quand la bombe a frappé le camp », en fin de soirée lundi, a décrit à l’AFP une habitante de Laiza, une ville située à deux kilomètres de là, qui souhaite rester anonyme pour des raisons de sécurité.
Le camp de Mong Lai Hkyet, qui abrite environ 600 personnes en temps ordinaire, est quasiment désert mercredi, ses accès filtrés par des combattants de l’Armée d’indépendance kachin (KIA), groupe rebelle contrôlant la zone, dans l’État de Kachin.
L’explosion a été ressentie jusqu’à Laiza, où elle a brisé les vitres de l’hôpital, où certains des 56 blessés de l’attaque sont soignés, selon l’habitante du camp.
Au total, vingt-neuf personnes ont été tuées et des dizaines d’autres blessées
Les morts ont été enterrés mardi après-midi. Les réfugiés entonnaient des chants chrétiens et déposé des couronnes de fleurs, tandis que les cercueils en bois étaient descendus sous terre.
Les rebelles, qui contrôlent des pans entiers de l’État de Kachin, à majorité chrétienne, imputent la responsabilité de l’attaque à l’armée birmane, qui aurait utilisé un drone transportant « une énorme bombe » selon le porte-parole de la KIA, le colonel Naw Bu.
De son coté, l’armée birmane nie son implication, évoquant une explosion dans un entrepôt de la KIA contenant environ 105 tonnes de nitrate d’ammonium et d’armes.
« Spirale sans fin »
Le camp de Mong Lai Hkyet est situé sur les plus grandes mines de jade du monde, et où le conflit entre l’armée et les rebelles de l’ethnie Kachin, qui dure depuis des décennies, s’est intensifié depuis que l’armée a pris le pouvoir lors d’un coup d’État en 2021 qui a renversé le gouvernement démocratiquement élu d’Aung San Suu Kyi.
Laiza, nichée à la frontière chinoise, est le quartier général de la KIA, qui y a formé et équipé d’autres groupes rebelles luttant contre l’armée en Birmanie.
L’Etat Kachin compte environ 100.000 déplacés internes, selon les Nations unies.
Des bombardements lors d’un concert organisé par la branche politique de la KIA avaient tué quelques 50 personnes en octobre 2023.
La junte avait affirmé que les accusations selon lesquelles il s’agissait de frappes aériennes de l’armée n’étaient que des « rumeurs ».
La Birmanie s’enfonce dans une « spirale sans fin de violences militaires », la junte recourant de plus en plus aux tueries de masse et aux frappes aériennes, a rapporté fin septembre l’agence onusienne des droits humains.
« Nos proches sont morts, leurs biens et leurs vies sont menacés « , a affirmé l’habitante de Laiza. « Il faut réinstaller les déplacés et trouver un nouvel hébergement pour les blessés ».
Agence France Presse / Courrier International – 11 octobre 2023
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