Birmanie : une réalisatrice documentaire condamnée à vie, symbole de la répression sans bornes de la junte contre le droit à l’information
Reporters sans frontières (RSF) appelle à la libération de Shin Daewe, ancienne journaliste et réalisatrice documentaire birmane, récemment condamnée à la prison à vie, la peine la plus lourde infligée à un journaliste depuis que la junte militaire a repris le pouvoir par la force en Birmanie, il y a près de trois ans.
Le 10 janvier 2024, l’ancienne journaliste et réalisatrice de films documentaires primés à l’international Shin Daewe a été condamnée à la prison à vie par un tribunal militaire dans la sinistre prison d’Insein, située près de Rangoun, l’ancienne capitale située dans le centre de la Birmanie. Elle a été condamnée à la peine maximale sur la base de l’article 50(j) de la loi antiterroriste pour un prétendu “soutien” au terrorisme. Il s’agit à ce jour de la peine la plus sévère prononcée contre un journaliste depuis le retour au pouvoir de la junte en février 2021.
Shin Daewe, 50 ans, a été arrêtée et fouillée par des soldats le 15 octobre dans une gare routière de Yangon, alors qu’elle venait récupérer un drone qu’elle avait commandé pour filmer un documentaire. Au cours de sa détention, elle a été interrogée et aurait été victime d’actes de torture selon son mari, qui a observé des traces de coups telles que « des points de suture sur sa tête et des plaies sur ses bras » lors de ses deux visites en prison.
« En condamnant une réalisatrice de documentaires à la prison à vie sous prétexte de terrorisme, la junte militaire illustre l’étendue de son arbitraire et de son acharnement. Nous appelons la communauté internationale à intensifier la pression sur le régime birman pour obtenir sa libération, ainsi que celle des 64 autres journalistes et défenseurs de la liberté de la presse détenus dans le pays. Cédric Alviani – Directeur du bureau Asie-Pacifique de RSF
Professionnelle des médias renommée, Shin Daewe traite depuis plusieurs années de divers sujets politiques et sociaux liés à la Birmanie. Dans le passé, elle a travaillé comme journaliste vidéo pour Democratic Voice of Burma (DVB) avant de se lancer dans une carrière de documentariste. Plusieurs de ses documentaires ont été récompensés par des prix internationaux, à l’image du court-métrage Now I Am 13, réalisé en 2013, qui présente l’histoire d’une adolescente privée d’accès à l’éducation dans le centre du pays.
Peu après le coup d’État militaire du 1er février 2021, la junte a lancé une politique de terreur contre le journalisme, publiant rapidement une liste noire des médias interdits. Depuis, quatre journalistes ont été tués par l’armée : le photographe indépendant Aye Kaw ; le fondateur de l’agence de presse Khonumthung Pu Tuidim ; le chef d’édition du Federal News Journal Sai Win Aung ; et le photoreporter indépendant Soe Naing.
La Birmanie, qui se situe dans les limbes du Classement mondial de la liberté de la presse établi par RSF en 2023, à la 173e place sur 180 pays, est devenue la deuxième plus grande prison de journalistes après la Chine.
Reporters Sans Frontières (RSF) – 11 janvier 2024
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