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En Birmanie, les jeunes fuient la conscription obligatoire imposée par la junte militaire

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De plus en plus de jeunes Birmans fuient leur pays pour échapper à l’enrôlement dans l’armée, qui manque cruellement de recrues.

Les jeunes Birmans cherchent à fuir l’enrôlement dans l’armée, et c’est la conséquence logique de l’annonce en février par la junte militaire au pouvoir de la conscription obligatoire dès ce mois d’avril. Tous les hommes de 18 à 35 ans, 27 ans pour les femmes, peuvent être appelés pour une durée de deux ans – voire plus pour celles et ceux qui auraient une expertise particulière comme les ingénieurs ou les médecins par exemple.

De quoi donc pousser des milliers de jeunes à fuir. La conscription obligatoire, c’est “la voie vers la mort” affirme Ko Thakka dans le journal indépendant birman The Irrawady, “une condamnation à mort : la junte utilisera les jeunes appelés comme des boucliers humains”. Six millions d’hommes et sept millions de femmes sont ainsi susceptibles d’être convoqués.

Le journal raconte toute l’organisation de l’exode de ces jeunes, une fois passé le choc de l’annonce de la junte en février : Chaque jour, des milliers de gens font la queue devant l’ambassade thaïlandaise, à Rangoun, et l’office des passeports, à Mandalay, dans l’espoir d’obtenir des visas et des autorisations de déplacement. Les parents qui le peuvent envoient leurs enfants à l’étranger. Aucun ne veut rejoindre les rangs de l’armée, qui elle, veut recruter 5000 jeunes chaque mois.

Et pour cause : l’armée birmane est de plus en plus fragilisée et manque cruellement de main d’œuvre dans ses rangs.  Début avril la junte a perdu l’un des principaux poste frontière de la Birmanie apprend-t-on sur CNN, celui de Myawaddy, où des centaines de militaires ont déposé les armes face à l’armée de la Karen National Union (KNU), un des groupes rebelles qui combattent le pouvoir militaire. La junte birmane avait même demandé à la Thaïlande l’autorisation de faire atterrir trois avions sur l’aéroport de Mae Sot, de l’autre côté de la frontière, pour évacuer des hommes et du matériel.

Pas de doute pour le journal Nikkei Asia, il s’agit d’“un des revers les plus cinglants pour le régime” depuis sa prise de pouvoir lors du coup d’État du 1er février 2021 contre le gouvernement élu d’Aung San Suu Kyi. Sur la chaine allemande DW News, le spécialiste de la Birmanie Christopher Gunness affirme que le pouvoir de la junte s’effrite.

Pour comprendre ce qui se passe, il faut remonter au 27 octobre dernier explique-t-il, lorsqu’une alliance a eu lieu dans le nord du pays à la frontière chinoise, contrôlée par les rebelles avec sans doute la complicité de la Chine selon le spécialiste. Contrôle qui s’est rapidement étendu à d’autres zones frontalières proches de l’Inde, du Bangladesh et maintenant de la Thaïlande. Selon lui “la perte de Miyawaddi est un coup dur, puisque rien qu’en un an un milliard de dollars d’échanges commerciaux a transité via ce poste frontière”

A court d’argent donc, l’armée birmane a aussi perdu des milliers de soldats tués, blessés, capturés ou qui ont déserté : de quoi la laisser désespérément à court de recrues, au point d’enrôler de force notamment les Rohingyas note le Myanmar Now. Les Rohingyas pris entre les feux de la guerre, privés de citoyenneté et de liberté de mouvements, se disent pris pour la cible par l’armée.

Selon un éditorial de The Irrawaddy datant de février, la junte birmane est donc en train de “creuser sa propre tombe” en instaurant cette circonscription obligatoire, qui incite les jeunes Birmans soit à s’exiler, soit à rejoindre les rangs de la résistance armée.

La Thaïlande a d’ailleurs récemment admis que le régime militaire était peut-être en train de s’effondrer rappelle la BBC, et que le pays devait se préparer à accueillir des dizaines de milliers de réfugiés. Deux millions de personnes ont déjà été déplacées dans le pays à cause des combats.

Par Laura Dulieu – Radio France Culture – 18 avril 2024

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