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La Thaïlande peut-elle encore se targuer d’être une démocratie ?

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Le parti Move Forward, large vainqueur des élections de 2023 mais empêché depuis d’accéder au pouvoir, a été dissous par la Cour constitutionnelle mercredi 7 août. Pour ce chroniqueur thaïlandais, il s’agit d’une atteinte flagrante à la volonté populaire. Et cette décision risque de se retourner contre ceux qui l’ont prise.

La peur a fini par l’emporter à la Cour constitutionnelle, qui a exprimé [mercredi 7 août] ses craintes de voir disparaître la monarchie si le premier parti d’opposition, Move Forward, poursuivait sa route, et si son charismatique leader, Pita Limjaroenrat, continuait d’exercer des fonctions politiques. Elle a donc ordonné la dissolution du parti. Une dizaine de cadres du mouvement, parmi lesquels Pita Limjaroenrat et Chaithawat Tulathon, son actuel secrétaire général, ont par ailleurs été bannis de la vie politique pour dix ans.

La Thaïlande peut-elle encore se targuer d’être une démocratie quand elle balaie en toute impunité, ou presque, le choix de 14 millions d’électeurs et le résultat des législatives de mai 2023, alors même que les citoyens réclament une réforme de la monarchie, qu’ils ne veulent plus voir considérée comme une institution semi-divine digne de l’Europe médiévale ?

La Cour constitutionnelle assure que cette décision était indispensable à la préservation de la monarchie. Elle justifie son verdict par la proximité des cadres du parti, et notamment de Pita Limjaroenrat, avec le mouvement prônant une réforme de la royauté, voire, pour les plus radicaux, son abolition pure et simple.

Dompter les plus jeunes par la terreur

La Cour pense-t-elle la monarchie si fragile qu’elle estime nécessaire de dissoudre un parti et de bannir ses cadres de la vie politique pour avoir seulement promis de réformer la loi de lèse-majesté, pourtant jugée anachronique, excessivement sévère, injuste et cruelle par une bonne partie de la jeunesse thaïlandaise ?

À défaut de pouvoir séduire les jeunes électeurs avides de changement, les juges sont visiblement persuadés de devoir les dompter par la terreur. Ou tout au moins de devoir faire peur aux élus qui veulent les représenter, et plus encore à leurs chefs de file qui descendent dans la rue, jusqu’à les contraindre à l’exil ou à les jeter en prison pour avoir enfreint la loi qu’ils rêvent de réformer.

La sanction prononcée contre Move Forward vient compromettre toute tentative de réforme pacifique par la voie des urnes. Cette décision ne fera que renforcer l’hostilité vis-à-vis de la Cour constitutionnelle et de cette monarchie que les juges prétendent vouloir protéger.

Par Pravit Rojanaphruk – Khaosod / Courrier International –  8 août 2024 

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