La contrefaçon en Thaïlande : un défi pour l’économie et l’image du pays
Bien qu’officiellement illégale, la contrefaçon est largement répandue et représente un problème majeur en Thaïlande. Elle englobe la production et la distribution de produits qui imitent des marques déposées sans autorisation, enfreignant ainsi les droits de propriété intellectuelle.
En Thaïlande, les produits contrefaits les plus courants incluent les cosmétiques, les produits pharmaceutiques, l’électronique et les vêtements. Ces articles, souvent vendus à des prix nettement inférieurs à ceux des originaux, attirent à la fois les résidents locaux et les touristes à la recherche de bonnes affaires.
Selon les statistiques du Department of Intellectual Property (DIP) sous le ministère du Commerce, entre janvier et juin 2024, 747 cas d’infraction à la propriété intellectuelle ont été enregistrés, entraînant la confiscation de 1,723,914 articles contrefaits. Bien que le nombre de cas ait diminué de 20,19 % par rapport à l’année précédente, la hausse de 33,73 % des articles saisis indique la gravité de la situation.
Sur le plan légal, la Thaïlande offre des outils tant civils que criminels pour lutter contre les infractions à la propriété intellectuelle : les poursuites criminelles, généralement plus efficaces, impliquent des raids de police, la saisie de produits contrefaits et des poursuites devant le tribunal spécialisé en propriété intellectuelle et commerce international (IPIT Court).
Les douanes, quant à elles, ont le pouvoir de saisir des biens contrefaits de manière proactive et les produits saisis sont souvent détruits lors de cérémonies officielles pour montrer la détermination du gouvernement à éradiquer ce fléau.
Le conseiller économique de l’ambassade de France en Thaïlande, Jean Sol-Macher, a récemment assisté à une de ces cérémonies de destruction de produits contrefaits, où il a été rappelé que le gouvernement thaïlandais fait de la lutte contre la contrefaçon une priorité.
En effet, l’impact de cette pratique illégale sur l’économie est particulièrement palpable pour la France, le deuxième pays le plus touché par cette industrie illégale après les États Unis, subissant près de 7 milliards d’euros de pertes par an, ce qui met en danger près de 40 000 emplois.
Malgré ces efforts, de grandes villes comme Bangkok continuent d’attirer chaque année des milliers de touristes séduits par un vaste marché de la contrefaçon. Dans les rues mais aussi dans des centres commerciaux comme le MBK Center, les contrefaçons de vêtements et accessoires de grandes marques se vendent ouvertement.
Attirés par des prix défiant toute concurrence, certains touristes se laissent facilement tenter, sans se rendre compte qu’ils enfreignent des lois qu’ils respecteraient chez eux.
Les moyens mis en place pour combattre la contrefaçon rencontrent de nombreux obstacles. Avec l’augmentation des importations de contrefaçons, il est devenu difficile de traquer les grandes chaînes de production car il se traite souvent de vendeurs locaux, qui fabriquent des contrefaçons simples comme des vêtements ou des accessoires en profitant de leurs compétences artisanales.
De plus, des enquêteurs anonymes ont signalé que les plus redoutés des dealers cachent souvent des entrepôts de contrefaçons importées, notamment dans la province de Sa Kaeo, près de la frontière thaïlandaise avec le Cambodge. Ces produits, souvent fabriqués en Chine, sont introduits clandestinement en Thaïlande ou les contrebandiers expérimentés, protégés par la corruption et des menaces de violence, réussissent à opérer sans crainte.
La corruption constitue néanmoins le défi majeur : un vendeur de montres contrefaites a révélé qu’il payait régulièrement des pots-de-vin à la police pour éviter les répressions. Ce climat d’impunité rend donc les efforts de lutte contre la contrefaçon encore plus complexes. De même, des entrepreneurs, parfois d’anciens licenciés de marques, continuent à produire des articles contrefaits en ignorant les droits d’auteur et les marques tout en bénéficiant de ressources adéquates.
La lutte contre la contrefaçon en Thaïlande représente certes un défi considérable pour les autorités locales, cependant il concerne de nombreux autres pays du globe, qui en subissent les conséquences. Malgré des efforts juridiques significatifs, la réalité du marché de la contrefaçon demeure complexe et enracinée dans la culture de consommation.
La sensibilisation des consommateurs, tant thaïlandais que internationaux, est essentielle pour réduire l’impact de ce marché illégal sur l’économie mondiale et protéger la santé des consommateurs. La situation appelle à une action concertée, tant au niveau national qu’international, pour combattre ce fléau qui menace l’intégrité des marchés légitimes.
Par Youssef Fisly – Thailande-fr.com – 6 octobre 2024
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