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Une pétition contre le Pheu Thai et Thaksin, pour déloyauté envers la monarchie

L’avocat ultraroyaliste Teerayut Suwansakon, agissant en tant que simple citoyen, a déposé le jeudi 10 octobre une requête auprès de la Cour constitutionnelle, lui demandant d’ordonner à Thaksin Shinawatra et au Pheu Thai de cesser de saper le système démocratique avec le roi comme chef de l’État. Teerayut Suwansakon n’en est pas à son coup d’essai puisqu’il fut à l’origine de celle aboutissant à la dissolution du parti Move Forward en août dernier. 

Cette fois, sa pétition déposée de 5000 pages demande la dissolution du Pheu Thai, parti au pouvoir et allègue que celui-ci et Thaksin Shinawatra portent atteinte à la monarchie constitutionnelle.

Thaksin Shinawatra lourdement chargé par Teerayut

Selon cette pétition, L’argumentaire des griefs imputés à Thaksin tient en 6 points principaux :

1- Thaksin aurait utilisé le parti au pouvoir (sous entendu le PT) pour contraindre les fonctionnaires de l’État à lui accorder des privilèges spéciaux pendant sa détention dans un service de première nécessité de l’hôpital général de la police, lui évitant ainsi l’emprisonnement. Teerayut soutient que cela violait le mandat du roi exigeant que Thaksin purge un an de prison après une grâce royale qui a réduit sa peine initiale de 8 ans.

2- Thaksin est accusé d’avoir négocié avec l’ancien Premier ministre cambodgien Hun Sen (avec qui il entretient d’excellentes relations) sur des revendications territoriales croisées, en utilisant le parti au pouvoir pour faciliter les discussions qui permettraient au Cambodge d’exploiter les ressources naturelles dans la zone contestée. Autrement dit, conduire la Thaïlande à céder un territoire maritime superposé au Cambodge.

3- Thaksin aurait ordonné au Pheu Thai de réécrire, avec le Move Forward (aujourd’hui disparu), la charte parrainée par la junte pour amender la constitution à son avantage.

4- Thaksin aurait représenté le Pheu Thai dans les négociations avec les partenaires de la coalition concernant la sélection d’un nouveau Premier ministre après la destitution de Srettha Thavisin, des discussions ayant eu lieu à la résidence de Thaksin le 14 août dernier, jour du renvoi de Srettha pour violation de l’éthique.

5- Thaksin aurait donné pour instruction au Pheu Thai d’expulser le parti Palang Pracharat de la coalition au pouvoir, ce que le parti a fait selon Teerayut. Il faut nuancer cette accusation : seule la faction du général Prawit Wongsuwon a été exclue du gouvernement car la faction assimilée à Thamanat Prompao est, elle, bien présente.

6- Thaksin aurait demandé au Pheu Thai d’adopter des politiques basées sur sa vision exprimée dans une conférence-évènement dans un palace « 5 étoiles » bangkokien le 22 août dernier, vision que l’on retrouve dans le discours de politique générale énoncé par sa fille Paetongtarn, nouvelle cheffe de gouvernement.

Teerayut Suwansakon demande donc au tribunal d’empêcher Thaksin d’instrumentaliser le Pheu Thai pour prendre le contrôle de l’administration nationale. Le considérant comme une menace pour l’honneur de l’institution royale et le système des partis politiques en Thaïlande.

Une guerre juridique contre Thaksin et le Pheu Thai menée en arrière plan par le général Prawit ?

Il est intéressant de rappeler le pedigree du pétitionnaire Teerayut. Il fut l’avocat de Suwit Thongparasert, plus connu sous le nom de « Buddha Isara », ancien moine activiste à l’origine du coup d’État militaire du 22 mai 2014. En compagnie du parrain politique du Sud, Suthep Thaugsuban, pour évincer du pouvoir Yingluck Shinawatra, sœur de Thaksin et tante de l’actuelle Première ministre.

Ce coup de force de l’armée provoquant une décennie de junte militaire était animé par le général Prawit Wongsuwon (en compagnie de Prayut Chan-o-cha et d’Anupong Paochinda avec qui il formait les influents 3-P). Teerayut Suwansakon a admis avoir demandé conseil au secrétaire général du parti Palang Pracharat, Paiboon Nititawan, sur la pétition à déposer contre Thaksin et le PT. Qui oserait imaginer que le général Prawit Wongsuwon, chef du PP, n’ait pas été au moins informé d’une telle action ? Voire acteur de son contenu ?

Embarrassé, Paiboon a reconnu que Teerayut avait bien discuté avec lui d’une telle pétition, mais que le parti n’y était pas mêlé. Personne n’est dupe. Ni les observateurs, ni la presse. Prawit Wongsuwon est en ce moment même sous les projecteurs concernant ses trop nombreuses absences au Parlement, ce qui lui a valu une plainte d’un ex-porte parole du PT et son acceptation de restituer ses indemnités.

En réalité, le général-député Prawit semble très en colère d’avoir été évincé de l’architecture gouvernementale présente, ses hommes y compris, notamment son frère Patchawarat Wongsuwon, ancien vice-Premier ministre en charge des Ressources naturelles dans la coalition dirigée par Srettha Thavisin. Prawit se sait grandement rétrogradé et quoi de mieux que de charger son adversaire Thaksin et le Pheu Thai de déloyauté royale pour revenir dans le jeu politique ?

Par Philippe Bergues – Gavroche-thailande.com – 12 octobre 2024

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