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Nos corps empoisonnés : le combat d’une vie

Si sa plainte a été jugée irrecevable par la justice française, Tran To Nga n’en finit d’engranger les soutiens… L’énergie et l’opiniâtreté qu’elle déploie dans son combat pour la reconnaissance des victimes de l’agent orange forcent l’admiration et parfois même l’inspiration.

Celle de Marine Bachelot Nguyen, en tout cas, qui a voulu faire de ce combat un spectacle, un spectacle intitulé Nos corps empoisonnés, qui a fait les riches heures du festival d’Avignon 2023 et que le public vietnamien va bientôt pouvoir découvrir puisqu’il est programmé pour le 5 novembre à l’I.D.E.C.A.F de Ho Chi Minh-ville, pour le 9 novembre au théâtre Nguyen Hien Dinh de Danang, et pour le 15 novembre au lycée français Alexandre Yersin de Hanoï.

C’est l’Institut Français du Vietnam qui organise la tournée, en collaboration avec Lumière d’Août, qui est un collectif d’auteurs et de metteurs en scène fondé en 2004 à Rennes, dont Marine Bachelot Nguyen (qui a notamment été en résidence à la villa Saïgon en 2018) fait partie.

Nos corps empoisonnés nous plonge donc dans l’histoire de Tran To Nga, une Franco-vietnamienne engagée dans de multiples combats anti-impérialistes, féministes, écologiques.

Jeune résistante dans le maquis pendant la guerre du Vietnam, Tran To Nga est alors exposée, comme tant d’autres, à des épandages d’agent orange. Aujourd’hui, depuis la France où elle vit, elle mène un procès historique contre plusieurs firmes agro-industrielles américaines, qu’elle tient pour responsables des ravages de ce poison dans les organismes et dans la terre.

Un vrai-faux monologue

Porté par Angélica Kiyomi Tisseyre-Sékiné, une jeune actrice française d’origine japonaise et vietnamienne, ce récit théâtral qu’est Nos corps empoisonnés entrelace texte, performance, vidéo et images d’archives pour raconter la vitalité de corps blessé et contaminé, toujours en lutte et en résilience.

C’est un récit à la 1ère personne, qui joue sur les âges, les époques et leurs décalages. Il faut savoir qu’Angélica Kiyomi Tisseyre-Sékiné a l’âge qu’avait Tran To Nga quand elle était combattante dans le maquis.
 

Conçu avec un dispositif scénographique, vidéo et lumière élaboré, Nos corps empoisonnés reste un spectacle qui se veut sobre : gravité du sujet oblige… La création vidéo mêle images d’archives d’hier et d’aujourd’hui, des images de Tran To Nga filmées lors d’entretiens, travaillées et articulées pour qu’elles soient des partenaires de jeu de l’actrice, et qu’elles confèrent au spectacle une dimension plastique, visuelle et sensorielle.

« Nous avons choisi de manier avec prudence le sensationnalisme des images de malformations dues à l’agent orange sur des enfants, des fœtus… La monstruosité du crime humain et politique nous semble aussi intéressante à évoquer et raconter à travers les mots et le récit. C’est celui-ci qui est central, porté par l’actrice et sa présence », nous explique Marine Bachelot Nguyen.

Le combat de Tran To Nga

 

« La biographie et le combat judiciaire de Tran To Nga ont fait l’objet de nombreux articles de presse, et de plusieurs vidéos ou films documentaires récents. Mon objectif a été de travailler un monologue sensible et singulier qui navigue entre les époques, crée des ponts et des surprises : ce n’est pas le biopic hagiographique qui m’intéresse, mais la façon dont le corps et l’âme de cette femme vont se raconter et se déployer auprès des spectateurs et spectatrices. Comment l’histoire et le monde viennent circuler dans son corps, dans ses cellules, dans son imaginaire. Comment plus généralement la violence politique globalisée du 20e et du 21e siècles s’inscrit et résonne dans les organismes, vient fabriquer des maladies mortifères mais aussi des anticorps et des résiliences, des muscles physiques aussi bien que mentaux, et constitue des êtres à la fois ordinaires et exceptionnels », nous dit-elle encore.

Connue et reconnue dans le milieu des Lettres et du spectacle vivant, Marine Bachelot Nguyen explore volontiers l’alliance de la fiction et du document, les croisements du corps et du politique, les questions féministes et postcoloniales.

Nos corps empoisonnés a été créé en mars 2023 à Paris avant de partir en tournée en Bretagne (Guingamp, Rennes, Lorient) puis en Avignon, pour le festival OFF. Plus récemment, la spectacle a accompagné la cérémonie au cours de laquelle Tran To Nga a été faite citoyenne d’honneur de Villejuif. C’était le 26 septembre dernier.

Pour en savoir plus sur les spectacles : https://ifv.vn/fr/evenement/spectacle-nos-corps-empoisonnes-par-marine-bachelot-nguyen/#/

Lepetitjournal.com – 22 octobre 2024

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