Le Cambodge face à une surpopulation carcérale record
Selon la Licadho, le Cambodge fait face à une explosion carcérale marquée par des détentions provisoires massives et une surpopulation extrême, nécessitant des réformes immédiates.
Les établissements pénitentiaires cambodgiens affichent aujourd’hui une surpopulation sans précédent. D’après le groupe de défense des droits Licadho plus de la moitié des prisons fonctionnant à 200 % de leur capacité ou plus,
Suivi de l’évolution carcérale
Depuis 2010, la Licadho suit l’explosion de la population carcéral. Elle avait déjà averti en 2018, alors que certains centres atteignaient 175 % de leur capacité, que le pays figurerait parmi les systèmes pénitentiaires les plus surpeuplés au monde. En juillet 2023, le World Prison Brief classait le Cambodge au deuxième rang mondial pour le taux d’occupation de ses prisons.
Capacité des établissements et répartition territoriale
Sur les 19 prisons surveillées, 18 dépassent leur capacité, dont 11 opèrent à plus du double de la capacité prévue, totalisant plus de 45 000 détenus à la fin de 2024, soit une augmentation de 23 % par rapport à décembre 2023. le Cambodge compte généralement une prison par province, à l’exception de Kampot qui partage actuellement son établissement avec Kep en raison de travaux.
Détentions provisoires : un facteur déterminant
La Licadho souligne que près de 75 % des personnes détenues en décembre 2024 étaient en détention provisoire, sans condamnation définitive, critiquant ainsi le recours systématique à l’incarcération comme réponse par défaut aux infractions.
Réactions officielles et ajustements controversés
Plusieurs responsables, notamment du Département général des prisons, ont reconnu la surpopulation et évoqué des réformes telles que l’extension des capacités. Toutefois, la Licadho déplore que les modifications apportées, en particulier la reconstruction de la prison de Kampot qui a divisé les cellules existantes, aient aggravé les conditions. Le directeur du département des prisons générales, Chhorn Sanath, a renvoyé les questions au porte-parole Kheang Sonadin, qui n’a pas pu être joint par Camboja News, pour un commentaire. Le secrétaire d’État du ministère de la justice, Chin Malin, n’a pas non plus pu être joint.
Cas extrêmes de surpopulation
La prison de Kandal, conçue pour 600 détenus, en accueille désormais plus de 3 900, affichant un taux d’occupation de plus de 650 %. À Phnom Penh, la prison pour hommes de Prey Sar, également appelée Centre correctionnel 1 (CC1), détient plus de 8 000 personnes, soit près de 400 % de sa capacité, le directeur Nouth Savna n’ayant pas répondu aux sollicitations via Telegram.
Conséquences sanitaires et préoccupations humanitaires
Les conditions de détention exiguës engendrent d’importants problèmes de santé et soulèvent de graves préoccupations en matière de droits humains, notamment concernant les besoins sanitaires non satisfaits des femmes et des mineurs incarcérés, conformément aux normes internationales.
Mesures de transfert et projets d’aménagement
Face à la crise, le directeur de la prison provinciale de Kandal, Em Nimol, a confirmé que l’établissement, prévu pour 3 000 détenus, en abrite désormais près de 4 000, en grande partie à cause des arrestations liées à la drogue. Il a également précisé que la surpopulation provoque des difficultés telles que des troubles du sommeil et des problèmes de santé. En 2024, plus de 1 400 détenus ont été transférés vers d’autres établissements et le Ministère de l’Intérieur a validé un projet de relocalisation du Centre de réhabilitation de la toxicomanie sur un site de 10 hectares dans le district de Kandal Stung.
Appel à des réformes systémiques
Malgré certaines mesures correctives, la Licadho appelle à des réformes immédiates et globales pour résoudre la crise de surpopulation. Parmi les propositions figurent la limitation de la détention provisoire, l’octroi de cautions aux détenus éligibles, l’usage d’alternatives à la détention pour les infractions non violentes ainsi que la libération des personnes détenues sans fondement légal, le tout dans le strict respect des normes internationales en matière de droits humains, notamment en accordant des cautions aux mineurs, aux personnes enceintes et aux mères avec enfants.
Par Khuon Narim – CamboJA New / Lepetitjournal.com – 28 février 2025
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