Ham Nghi, empereur déchu et artiste méconnu, bientôt à l’honneur à Hue
De Ham Nghi (1871-1944), l’Histoire retient surtout qu’il a été le huitième souverain de la dynastie des Nguyen, que son règne a été particulièrement éphémère (d’août 1884 à septembre 1885), qu’il a ensuite tenté de résister tant bien que mal à l’emprise coloniale des Français pendant trois ans avant d’être finalement arrêté et déporté en Algérie…
Ham Nghi n’est pas seulement un empereur déchu, c’est aussi un artiste peintre. Une rétrospective de ses œuvres est organisée pour deux semaines et débutera le 25 mars à Hue.
Ham Nghi n’est pas seulement un empereur déchu, c’est aussi un artiste peintre, qui va découvrir sa vocation en exil, grâce à Marius Reynaud, qui lui donne ses premiers cours. A partir de 1899, il est autorisé à se rendre en France métropolitaine, où il fréquente l’atelier d’Auguste Rodin, puis le salon de Judith Gauthier. Il va alors commencer à produire ses premières œuvres, dans une veine postimpressionniste.
Empereur déchu et artiste
En 1904, il épouse une Française, Marcelle Laloë, dont il aura trois enfants. La même année, il expose pour la première fois dans la rotonde du musée Guimet.
Ensuite, il consacre la majeure partie de son temps à son art, passant des journées entières à contempler et à peindre la nature environnante. Il vit entre l’Algérie et la France métropolitaine, où il acquiert même un château, en Dordogne.
Il meurt le 14 janvier 1944 dans sa villa Gia Long, à El Biar, en banlieue d’Alger. C’est là qu’il est enterré.
Un peu plus de huit décennies se sont donc écoulées depuis le décès d’Ham Nghi, le temps pour ses œuvres de tomber dans l’oubli et pour le personnage de rester pour la postérité l’auteur d’un édit impérial, l’édit de Can Vuong (1885), qui est un appel à la résistance contre le colonialisme.
Il aura fallu toute l’obstination de l’une des descendantes pour que le huitième empereur de la dynastie des Nguyen soit enfin reconnu comme artiste peintre, et célébré comme tel à Hue, dans son ancien palais.
1885: Ham Nghi quitte le palais impérial et prend le maquis avec Ton That Thuyet, le second régent. 140 ans après, ses œuvres font l’objet d’une exposition au palais Kien Trung. C’est donc en artiste que l’Empereur réinvestit Hue…
140 ans après à Hue
Ce retour, posthume et artistique, c’est à Amandine Dabat (dont il est le trisaïeul) qu’il le doit.
Docteure en Histoire de l’art (Sorbonne Université), titulaire d’un master en Études vietnamiennes (Université Paris-Diderot), cette dernière est l’auteur d’un ouvrage intitulé Ham Nghi, Empereur en exil, artiste à Alger, paru en 2019.
Et aujourd’hui, elle nous présente une rétrospective des œuvres (20 toiles, en tout) de son impérial ancêtre, la première à être organisée au Vietnam.
L’exposition, prévue pour deux semaines, débutera le 25 mars et se tiendra donc au palais Kien Trung, dans l’enceinte de la cité impériale. Intitulée « Trời, Non, Nước | Panorama allusif », elle est organisée par le magazine Art Republik Vietnam, et également soutenue par le Centre de conservation des monuments historiques de Hue et l’Institut français du Vietnam. Amandine Dabat en est la co-commissaire avec Ace Le, lui-même commissaire et grand spécialiste de l’art vietnamien, dont les équipes ont travaillé d’arrache-pied pour faire connaître et reconnaître Ham Nghi, précurseur de l’art moderne vietnamien…
Lepetitjournal.com – 19 mars 2025
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