Infos Cambodge

Le Cambodge s’apprête à lancer le PrEP injectable pour freiner le VIH

Le Cambodge introduit un traitement préventif injectable contre le VIH dès mai, ciblant les jeunes et populations clés, avec une attention portée à la confidentialité.

Le Cambodge s’apprête à introduire, dès ce mois de mai, le Cabotegravir, une forme injectable à action prolongée de la prophylaxie pré-exposition (PrEP), dans l’objectif de réduire significativement les nouvelles infections au VIH. Cette avancée, saluée par les experts de la santé, suscite de nombreux espoirs, à condition que sa mise en œuvre respecte la confidentialité et soit centrée sur les besoins des communautés les plus exposées.

Qu’est-ce que la PrEP ?

La prophylaxie pré-exposition, ou PrEP, est une méthode préventive hautement efficace contre le VIH destinée aux personnes séronégatives exposées à un risque accru d’infection. Elle repose sur la prise régulière de médicaments antirétroviraux avant toute exposition potentielle au virus. Disponible sous forme de comprimés depuis 2019 au Cambodge, la PrEP est désormais proposée sous forme injectable à action prolongée. Contrairement à la prophylaxie post-exposition (PEP), qui intervient après un contact à risque, la PrEP s’anticipe et s’inscrit dans une démarche de prévention continue. Pour y accéder, une consultation médicale est requise, assortie d’un suivi régulier.

Une première phase expérimentale ciblant les personnes à risque

L’annonce a été faite en avril par Uok Vichea, directeur adjoint du Centre national pour le VIH/SIDA, la dermatologie et les maladies sexuellement transmissibles, et relayée par le quotidien Kampuchea Thmey. Selon lui, 7 000 personnes ayant plusieurs partenaires sexuels recevront l’injection mensuelle dans trois cliniques de Phnom Penh, avant un passage à une administration bimensuelle. Ce groupe cible est considéré comme particulièrement vulnérable.

Un tournant pour les populations clés

Les associations de lutte contre le VIH voient dans ce projet un tournant majeur pour la prévention, notamment chez les hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes (HSH), les personnes transgenres, les travailleurs et travailleuses du sexe et les usagers de drogues injectables.. Toutefois, elles mettent en garde contre les risques de violation de la vie privée, susceptibles de décourager les bénéficiaires potentiels. La réussite du programme repose sur la création d’un climat de confiance, avec des services sécurisés, discrets et pilotés par les pairs.

Une approche sensible, tournée vers les jeunes

Seum Sophal, militant de longue date au sein du Health Action Coordinating Committee, appelle à une approche à la fois sensible et multifactorielle, en particulier pour les jeunes. Il rappelle que près de la moitié des nouveaux cas de VIH concernent les 15-24 ans. Si des progrès ont été faits auprès des générations plus âgées, les jeunes, souvent peu familiers des services de santé liés au VIH, nécessitent des messages adaptés.

Pour Seum Sophal, la clé réside dans le partenariat avec des groupes communautaires  afin de porter la parole auprès des publics concernés. Il propose un modèle de pair-à-pair : former de jeunes membres issus de ces groupes pour devenir éducateurs et ambassadeurs du PrEP.

Des services inclusifs et confidentiels

Selon Seum Sophal, les services de santé doivent être accueillants, non stigmatisants et spécifiquement conçus pour ces jeunes populations. Il insiste sur le respect absolu de la confidentialité. La communication doit être accessible, en langage simple, avec des supports adaptés à l’âge. Pour lutter contre les idées reçues et les craintes liées au VIH ou au PrEP, il préconise la normalisation des discussions sur la santé sexuelle, la contraception et les relations affectives.

Seum Sophal recommande aussi un meilleur accès via des centres communautaires, des cliniques mobiles ou la télémédecine, afin de surmonter les obstacles logistiques : « Il faut que l’accès au PrEP soit facile et discret, en évitant les files d’attente interminables ou les procédures trop complexes. »

Le lieu, l’horaire et les soignants comptent

Math Toeuth Misy, femme transgenre et directrice de l’association Bandanh Chaktomuk, réseau national des HSH, insiste sur trois éléments essentiels : le lieu, l’horaire et le personnel. Pour elle, les bénéficiaires se sentent plus à l’aise lorsqu’ils sont accueillis dans des lieux familiers, entourés de leurs pairs. L’attitude du personnel médical est décisive pour instaurer la confiance.

Elle demande également une plus grande flexibilité horaire : ouverture des cliniques pendant la pause déjeuner ou après 17 heures, afin de s’adapter aux personnes ayant un emploi à temps plein.

La représentation communautaire, un pilier de confiance

Math Toeuth  Misy souligne l’importance d’intégrer des personnes issues des communautés concernées dans les dispositifs de prévention. Si les jeunes militants jouent un rôle croissant, les membres plus âgés restent essentiels grâce au lien de confiance qu’ils ont construit. Employer ces anciens renforce l’acceptabilité du programme et valorise leur expérience dans un secteur en mutation.

Elle appelle aussi à une représentation des communautés à tous les niveaux de gouvernance, notamment dans les conseils communaux.

Renforcer l’engagement en ligne et dans les territoires

Avec 18 ans d’expérience dans le plaidoyer contre le VIH,Math Toeuth  Misy salue le travail des cliniques comme le RHAC pour leurs campagnes de sensibilisation, mais déplore le manque d’audience des contenus VIH sur les réseaux sociaux. Elle invite à adopter des formats plus créatifs : vidéos, animations ou dessins animés.

Elle estime que les influenceurs peuvent jouer un rôle déterminant, à condition qu’ils s’engagent de manière désintéressée : « On a besoin de gens prêts à diffuser ces messages sans être rémunérés, simplement pour aider. »

Une mobilisation collective pour un accès élargi

Pour Math Toeuth Misy, la prévention ne relève pas uniquement de l’État : toutes les organisations et groupes de plaidoyer doivent unir leurs efforts. Elle réclame une distribution du PrEP injectable dans tout le pays, et pas seulement à Phnom Penh, citant les provinces de Battambang, Banteay Meanchey, Siem Reap et Preah Sihanouk comme prioritaires.

Actuellement, le Cambodge propose deux traitements de prévention : le PrEP (prophylaxie pré-exposition) et le PEP (post-exposition). Si le PrEP est disponible sous forme de comprimés depuis 2019, les versions injectables ou intra-utérines ne sont pas encore proposées.

Lepetitjournal.com – 16 mai 2025

En poursuivant la visite de ce site, vous acceptez l’utilisation de traceurs (cookies) vous permettant juste d'optimiser techniquement votre navigation. Plus d’informations

En poursuivant la visite de ce site, vous acceptez l’utilisation de traceurs (cookies) vous permettant d'optimiser techniquement votre navigation. Aucune information sur votre utilisation de ce site ne sera partagée auprès de quelconques médias sociaux, de sociétés commerciales ou d'agences de publicité et d'analyse. Cliquer sur le bouton "Accepter", équivaut à votre consentement.

Fermer